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Fiches voxographiques Disney, 4ème partie: De Crapaud à Peter Pan

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Voici la suite de la synthèse des recherches sur les premiers doublages Disney que j'ai effectuées en collaboration avec François Justamand (La Gazette du Doublage), Olikos (Grands Classiques) et Greg Philip (Film perdu). 



LE CRAPAUD ET LE MAITRE D'ECOLE (1949)

Le crapaud et le maître d’école (nommé aussi Contes d’automne et de printemps) est composé de deux moyens-métrages de 1949, La mare aux grenouilles et La légende de la vallée endormie, qui ont connu dans la francophonie des trajectoires séparées (et assez floues, malgré nos recherches) avant d’être rassemblés en VHS au Québec en 1999 et en DVD en France en 2003.

La légende de la vallée endormie : doublage français d’origine (enregistrement en mai 1972 1, première sortie française inconnue) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 1

Narrateur : Roland Ménard 1 (Dialogues)
Narrateur : José Bartel1 (Chant et parlé/chanté)
Ichabod : José Bartel 1
Brom Bones : José Bartel 1
Un villageois : Henry Tallourd1 (« et n’ont pas de peau sous les os »)
Un villageois : Henry Tallourd1 (« avec une raie au milieu »)
Chœurs : Anne Germain 1, Claudine Meunier 1, etc.
Remarques :
-Doublage exploité sur le DVD volume 1 du coffret « Contes et légendes ».
-Les choristes sont issus des grands groupes français de jazz vocal (The Blue Stars of France, Les Double Six) et la partition paraît avoir été écrite pour eux : le swing est parfait, les harmonies (simplifiées dans le redoublage) parfois audacieuses pour du Disney.

La légende de la vallée endormie : second doublage français (enregistrement dans les années 90, sortie française en 1999) :
Narrateur et personnages masculins : Daniel Beretta 2 (Dialogues et chant)
Remarque : Doublage exploité sur le DVD « Le crapaud et le maître d’école ».

La mare aux grenouilles : doublage français d’origine (enregistrement dans la période 1969-1973, première sortie française inconnue) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 3
Direction artistique : Serge Nadaud3
Adaptation : Louis Sauvat3

Crapaud Baron Têtard : Roger Carel 2 (Dialogues)
Crapaud Baron Têtard : Henry Tallourd 1 (Chant)
Cyril Trottegalop : Francis Lax 2
M. Rat surnommé "Raton" : Jacques Ciron 2
M. Taupe surnommé "Taupinet" : Teddy Bilis2
McBlaireau : Maurice Nasil 4
Le procureur : Paul-Emile Deiber 2
L'huissier : Fernand Fabre 5
M. Moustache : Guy Piérauld 2
Le facteur : Serge Nadaud 5
Le juge : Albert Medina 6
Un journaliste : Jean Michaud 2
Narrateur : Jean Berger 2
Remarque : Doublage exploité en VHS.

La mare aux grenouilles : doublage d’une scène supplémentaire (2003)
McBlaireau : Jean-Pierre Denys 7
Créanciers : Michel Feder 3 et Patrice Paris 3 
Remarque : Doublage exploité en DVD (doublage des années 70 et scène supplémentaire avec doublage récent). Curieusement cette très courte scène supplémentaire a été doublée, et juste après une autre répliqué a été « oubliée » et laissée en V.O.

Fiches voxographiques du Crapaud et le maître d’école réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 11 juin 2017.
Sources : 
1Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios  (Remerciements à Anne Germain),        
3Carton VHS/DVD/Blu-Ray (Remerciements à Chernabog),


CENDRILLON (1950)

Doublage français d'origine (sortie française le 1erdécembre 1950) :
Société : Léon et Max Kikoïne RKO Films 1
Studio : C.T.M. Gennevilliers 1
Direction artistique : Daniel Gilbert 1
Direction musicale : Georges Tzipine 1
Adaptation : Louis Sauvat 1
Supervision : Victor Szwarc 1
Enregistrement : Jacques Boutiron 1 et Marcel Ormancey 1

Cendrillon : Paule Marsay 2 (Dialogues)
Cendrillon : Paulette Rollin 2 (Chant)
Le Prince : René-Marc 3 (Dialogues)
Le Prince : Dominique Tirmont 2 (Chant)
Mme de Trémaine : Helena Manson 2
Anastasie : Marcelle Lajeunesse 4
Javotte : Simone Boin ? 2 
Marraine la Bonne Fée : Lita Recio 2
Jac : Jacques Bodoin 2
Autres souris : Jacques Bodoin 2, Georges Hubert1, Paulette Rollin 2 et Casti et Lanci1
Le Roi : Camille Guerini 2
Le Grand Duc : André Bervil 5
Le messager et valet de pied : Marcel Rainé 5
La narratrice : Mony Dalmès 2
Chanteuse soliste du générique : Eliane Dorsay 2
Remarques :
- Doublage exploité au cinéma de 1950 à 1977 et sur la VHS québécoise de 1988. Nous en avons une copie mais de qualité améliorable, toute nouvelle source est la bienvenue (danslombredesstudios@gmail.com).
-La chanson d’introduction est chantée du début à la fin par une chanteuse soliste (Eliane Dorsay) accompagnée par les chœurs neutres de la V.I. alors que dans la V.O. elle est chantée principalement par un chœur, avec un passage soliste.
-Les attributions de voix pour les souris (voix vari-speedées) posent problème :
Jacques Bodoin a déclaré à « La Gazette du Doublage » avoir doublé Jac et Gus. Paulette Rollin se souvenait avoir doublé Suzy (en plus de Cendrillon). Georges Hubert et « Casti et Lanci » (duo inconnu. Si vous avez des informations sur ces comédiens ou comédiennes je suis preneur) sont crédités au générique.
En trafiquant la chanson des souris (merci Greg Philip) il est possible d’entendre les voix telles qu’elles ont été enregistrées à l’époque avant d’être accélérées et pitchées. Jacques Bodoin double certainement Jac en prenant une voix proche de Louis Armstrong, et Georges Hubert double peut-être Gus (mais rien n’est certain, car il peut s’agir aussi de Jacques Bodoin (imitateur) prenant une autre voix). Suzy ne semble pas être doublée par Paulette Rollin, mais par une chanteuse avec une voix caricaturale à la Marie Bizet. C’est assez cacophonique, pas toujours « en place », et chanté par un petit groupe (trois ou quatre hommes dont certains chantent en voix de fausset, et trois ou quatre femmes).

Redoublage partiel de la version de 1950 (sortie française le 6 décembre 1978)
La narratrice : Martine Sarcey 6
Chanteuse soliste du générique : Danielle Licari 7
Remarques :
-Doublage exploité au cinéma en 1978. Seul le générique et la narration ont été redoublés, le reste du film contient le doublage de 1950. La seule trace que nous avons de ce redoublage partiel est un enregistrement pirate fait au cinéma à l’époque par mon collaborateur Gilles Hané (dans ses souvenirs, la disposition des noms du doublage de 1950 avait été changée dans le générique (une colonne « hommes » et une colonne « femmes ») et le nom de Danielle Licari ajouté). Toute nouvelle source audio est la bienvenue (danslombredesstudios@gmail.com).
-Le texte de la chanson est le même que dans le doublage de 1950 (à part la phrase « Ouvre vite des yeux tout grands » qui est changée en « Prononce ton vœu tout bas »). Le texte de la narration est en revanche modifié même si on retrouve beaucoup de mots communs.
-La narration est a priori de Martine Sarcey, mais les voxophiles ne sont pas  tous d’accord, certains pensant à Michèle Montel.

Second doublage français (enregistrement du 4 au 12 février 19918, sortie française en 1991)
Société : S.I.S.1
Studios : S.I.S. 8et Télétota 8
Direction artistique : Bruno Lais 1
Direction musicale : Claude Lombard 1
Adaptation : Claude Rigal-Ansous 1
Enregistrement : Bruno Bourgade 1

Cendrillon : Dominique Poulain 1
Le Prince : Emmanuel Jacomy 9 (Dialogues)
Le Prince : Michel Chevalier 1 (Chant)
Mme de Trémaine : Jacqueline Porel 1
Anastasie : Barbara Tissier 1
Javotte : Dominique Chauby 1
Marraine la Bonne Fée : Claude Chantal 1
Le Roi : Jacques Deschamps 1
Le Grand Duc : Jean-Luc Kaiser 1
Le messager et valet de pied : Raymond Baillet 8
Aboyeur de la cour : Bernard Musson 8
Jac : Emmanuel Jacomy 1
Gus : Jacques Frantz 1 (Dialogues)
Gus : Jean Stout 3 (Chant)
Luke : Maurice Decoster 1
Suzy : Claude Lombard 8
Souris mâle 1 : Pascal Germain 8
Souris mâle 2 : Alexandre Strack 8
Souris mâle 3 : Fabien Briche 8
Souris femelle 1 : Marie Gamory 8
Souris femelle 2 : Sylvie Georges 8
Narratrice : Brigitte Virtudes 1
Chanteuse soliste du générique : Claude Lombard 3
Chœurs : Claude Lombard 3, Claude Chauvet 3, etc.
Remarques :
-Doublage exploité de 1991 à nos jours, en salles, VHS, DVD, etc.
-Chaque voix de souris fut vari-speedée à une vitesse différente, selon des directives reçues de Disney.

Fiches voxographiques de Cendrillon réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 11 juin 2017.
Sources : 
1Carton VHS/DVD/Blu-Ray,
3Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios(Remerciements à Claude Chauvet et Fred Taïeb),
Lecture conseillée :
Mon hommage à Paulette Rollin (première voix chantée de Cendrillon).



       ALICE AU PAYS DES MERVEILLES (1951)

Doublage français d'origine (enregistrement en juin 19511, sortie française le 1er décembre 1951) :
Société : RKO – Léon et Max Kikoïne 1
Studio : C.T.M. Gennevilliers 1

Alice : Marie-Claire Marty 1(Dialogues et Chant)
Le Chat Tigre : Yves Furet1
Le Chapelier toqué : Marcel Carpentier2
La Reine de Coeur : Germaine Kerjean2
Monsieur Lapin : Paul Villé2
Dodo : Jean Brochard2
La soeur d'Alice : Gilberte Aubry1
La poignée de porte : Jacques Beauchey2
La Rose : Jacqueline Morane2
Iris : Lita Recio3
Marguerite : Cécile Didier4
Liseron : Rolande Forrest3
Le trio de cartes : Les Frères Jacques1 (Chant)
??? : Jacques Bodoin1
??? : Marcel Rainé1
Remarque : Doublage exploité en salles de 1951 à 1973, et perdu depuis. Nous n’avons pu reconstituer qu’un tiers de ce doublage (grâce à des émissions d’époque contenant des extraits). Si vous possédez des éléments (bobines 16 mm d’époque, etc.), prière de me contacter à danslombredesstudios@gmail.com

Second doublage français (enregistrement en octobre/novembre 19743, sortie française le 19 mars 19755)
Société et studio: S.P.S. 6
Direction artistique : Jean-Pierre Dorat  6
Direction musicale : Georges Tzipine  6
Adaptation dialogues et chansons : Louis Sauvat 6

Alice : Séverine Morisot 6(Dialogues)
Alice : Victoria Germain 6 (Chant)
Le Chat de Chester : Roger Carel 6
Le Chapelier Toqué : Jacques Ciron6
Le Lièvre de Mars : Claude Rollet 6
La Chenille : Philippe Dumat 6
La Reine de Coeur : Paule Emanuèle6
Le Roi de Coeur : Teddy Bilis6
Tweedledee : Jacques Balutin 6
Tweedledum : Albert Augier 6
Le morse : André Valmy 6
Le charpentier : Gérard Hernandez6
Le lapin blanc : Guy Piérauld 6
Dodo : Jean-Henri Chambois 6
La soeur d'Alice : Evelyn Selena 6
La poignée de porte : Georges Atlas 6
Bill le lézard : Francis Lax 6
L'oiseau apeuré : Lita Recio 6
La Rose : Paula Dehelly 6
Chanteuse soliste "Par un beau matin de mai fleuri" et générique : Danielle Licari3
Le loir : Linette Lemercier6
L'aigle : Francis Lax6
La tulipe jaune : Claire Guibert6
Bouton : Linette Lemercier6
Violette : Lisette Lemaire6
Iris : Gisèle Preville6
Marguerite : Eleonore Hirt6
L'As : Serge Lhorca6
Le Deux : Pierre Leproux6
Le Trois : Teddy Bilis6
Le trio de cartes : Michel Barouille3, Jean Cussac3, Jean Stout3 et  Jean-Claude Briodin ?3(Chant)
Maman huître : Marie Francey3
Les huîtres : Linette Lemercier6, Sylviane Margollet6, Sylvie Feit6, Claude Chantal6 et Lisette Lemaire6
Les pensées : Linette Lemercier6, Sylviane Margollet6, Sylvie Feit6, Claude Chantal6 et Lisette Lemaire6
Les "Blue Bonnet" : Linette Lemercier6, Sylviane Margollet6, Sylvie Feit6, Claude Chantal6 et Lisette Lemaire6
Choeurs : Michel Barouille3, Jean Cussac3, Jean Stout3, Jean-Claude Briodin ?3, Danielle Licari3, Françoise Walle3, Anne Germain3, Géraldine Gogly3, Nicole Darde ?3, etc.
Remarques :
 -Doublage exploité de 1974 à nos jours en salles de cinéma, VHS et DVD.
-Dans certaines éditions DVD, la chanson « Peignons les roses en rouge » est laissée dans son premier doublage.

Fiches voxographiques d’Alice au pays des merveilles réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 11 juin 2017.
Sources :
1François Justamand / La Gazette du Doublage (remerciements à Marie-Claire Marty, Gilberte Aubry, Jacques Bodoin, archives CNC)
3Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Anne Germain, Philippe & Babette Dumat),
6Carton VHS/DVD/Blu-Ray (remerciements à Hercule).
Lecture conseillée :
Interview de Marie-Claire Marty (première voix d’Alice) pour La Gazette du Doublage.



PETER PAN (1953)

Doublage français d'origine (enregistrement en mai 19531, sortie française le 18 décembre 1953) :
Société : Léon et Max Kikoïne RKO Films 2
Sous-traitant chansons : Synchro Music 1
Studio : C.T.M. Gennevilliers 2
Direction artistique : Daniel Gilbert 2
Direction musicale : Georges Tzipine 2
Adaptation dialogues et chansons : Louis Sauvat 2
Supervision : Victor Szwarc 2
Enregistrement : Paul Boistelle 2

Peter Pan : Claude Dupuy 2
Wendy : Marie-Claire Marty 2 (Dialogues)
Wendy : Mathé Altéry 1 (Chant)
Capitaine Crochet : Jean-Henri Chambois 2
Monsieur Mouche : Camille Guerini 2
Jean : Gérard Petit 2
Michel : Jean-Jacques Duverger 2
Monsieur Darling : Georges Hubert 1
Madame Darling : Jacqueline Francell 3
Narrateur : Jacques Beauchey 4
Chanteuse soliste générique : Mathé Altéry 1 
Grand chef indien : Marcel Rainé 1 (Dialogues)
Enfant perdu Renard : Renée Dandry 5
Pirate haut violet (M. Starkey): Pierre Morin 4
Pirate haut vert : Pierre Michau 4
Pirate haut rouge : Pierre Morin 4
Pirate borgne à gilet (Mullins): Jacques Beauchey 4
Sirènes : Gilberte Aubry 1Jacqueline Francell 3 et Nelly Benedetti 4
Chœurs d’enfants : Marie-Claire Marty 1, etc.
Remarque : Doublage exploité de 1953 à 1991 en salles et dans la première VHS québécoise (1990). Nous avons numérisé ce doublage en entier.

Second doublage français (enregistrement en mai 19925, sortie française en 1992)
Société : Dubbing Brothers 2
Studio : Dubbing Brothers- Epinay 5
Direction artistique : Philippe Videcoq 2
Direction musicale : Georges Costa 2
Adaptation dialogues: Philippe Videcoq 2
Adaptation chansons: Luc Aulivier 2
Supervision : Lori Rault 5

Peter Pan : Hervé Rey 2
Wendy : Séverine Morisot 2 (Dialogues)
Wendy : Bénédicte Lécroart 2 (Chant)
Capitaine Crochet : Jean-Henri Chambois 2
Monsieur Mouche : Teddy Bilis 2
Jean : Charles Pestel 2
Michel : Pauline Bandelier 2
Monsieur Darling : Jean-Henri Chambois 2
Madame Darling : Marie-Brigitte Andréi 2
Narrateur : Michel Gudin 2
Chanteuse soliste générique : Bénédicte Lécroart 2 
Grand chef indien : Jean Stout 5 (Chant)
Enfant perdu Ours : Michel Mella 5
Enfant perdu Renard : Sauvane Delanoë 6
Enfant perdu Lapin : Sophie Arthuys 7
Enfants perdus Ratons Laveurs : Marine Boiron 8
Pirate haut violet (M. Starkey): Laurent Hilling 9
Pirate haut vert : Mario Santini 7
Pirate petit (Bill Jukes) : Henri Labussière 5
Pirate accordéoniste (Skylights): Olivier Constantin5
Pirate « et aucun signe de cette fillette » : Mario Santini 5
Sirène brune : Magali Barney 9
Squaw : Jane Val ? 7
Choeurs d’enfants : Donald Reignoux 9Karine Costa 9, etc.
Choeurs d’adultes : Georges Costa 5Michel Costa 5, Claude Chauvet 5, etc.
Remarques :
-Doublage exploité de 1992 à nos jours en salles, VHS, DVD, etc.
-Cas très rare, Jean-Henri Chambois reprend son rôle de Crochet quarante ans après l’avoir doublé dans le premier doublage. Il double également Monsieur Darling, corrigeant ainsi une erreur faite dans le premier doublage où la voix de Monsieur Darling avait été confiée à un autre comédien (Georges Hubert).

Fiches voxographiques de Peter Pan réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 11 juin 2017.
Sources : 
1François Justamand / La Gazette du Doublage(Remerciements à Marie-Claire Marty), 
2Carton VHS/DVD/Blu-Ray, 
3Bastoune / Dans l'ombre des studios (Remerciements à François Justamand), 
5Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (Remerciements à Claude Chauvet et Fred Taïeb),
9Darkcook / Nouveau forum doublage francophone(Remerciements à Donald Reignoux).

ET LA SUITE ? 
3) Mélodie du Sud / Coquin de printemps / Mélodie Cocktail / Danny le petit mouton noir
4) Le Crapaud et le Maître d'école / Cendrillon / Alice au Pays des Merveilles / Peter Pan

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Fiches voxographiques Disney, 5ème partie: De La Belle et le Clochard à Merlin l'Enchanteur

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Voici la suite de la synthèse des recherches sur les premiers doublages Disney que j'ai effectuées en collaboration avec François Justamand (La Gazette du Doublage), Olikos (Grands Classiques) et Greg Philip (Film perdu). 



LA BELLE ET LE CLOCHARD (1955)

Doublage français d'origine (enregistrement en juin 19551, sortie française le 14 décembre 1955) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.)2
Direction artistique : André Lorière 2
Adaptation des dialogues : Max Eddy 2
Adaptations des chansons : Henry Lemarchand 2

Lady : Claude Winter 2 (Dialogues)
Lady : Claire Leclerc 1 (Chant)
Le Clochard : Henri Allegrier-Ebstein 2
Darling : Jacqueline Ferrière 2 (Dialogues)
Darling : Claire Leclerc 1 (Chant)
Jim Chéri : Georges Hubert 3
Peggie : Marie Francey 2 (Dialogues)
Peggie : Anita Love 1 (Chant)
Jock : Paul Faivre 2
Cesar : Camille Guérini 2
Tante Sarah: Cécile Dylma 2
Si et Am : Claire Leclerc 1 (Dialogues et chant)
Tony : Nicolas Amato ? 3 (Dialogues)
Tony: Michel Roux (de l'Opéra) 1 (Chant)
Le Castor : Paul Villé 2
Bouledogue : Marcel Rainé 3
Boris le lévrier russe : Stéphane Audel  3
Policier devant le parc : Paul Bonifas 3
Promeneur devant le parc : René Hiéronimus 4
Agent de la fourrière qui arrête Peggy et Clochard: Pierre Michau ? 3
Agent de la fourrière qui interpelle Bill: Marcel Painvin 3
Vendeur de muselières : Maurice Porterat 3
Docteur : Paul Bonifas 3
Femme à la réception: Cécile Dylma 5
Hommes à la réception : Jean D'Yd 3 et Claude Bertrand 3
Un bébé chien : Marie-Martine 4
Remarques :
-Doublage exploité en salles de 1955 à 1988 et dans la VHS québécoise de 1987. Nous avons pu le numériser grâce à la VHS québécoise mais toute nouvelle source est la bienvenue (danslombredesstudios@gmail.com). La VHS ne contient pas les crédits français d’époque, en revanche nous avons pu les avoir grâce à une copie VHS d’une bobine 35 mm.
- Claire Leclerc (chant de Lady/Darling/Siamois) et Anita Love (chant de Peggie) s’étaient déjà retrouvées sur le doublage des chansons du film Les hommes préfèrent les blondes (1953) où elles doublaient respectivement Marylin Monroe et Jane Russell.
-Le chœur final est laissé dans sa Version Internationale (chœur neutre).
-Contrairement à la V.O. , dans cette V.F. le « Bella Notte » change complètement de paroles entre l’ouverture (chantée par un chœur) et la scène des spaghettis (chantée par Tony et Jo,  avec reprise des choeurs). Je trouve les paroles de l’ouverture particulièrement belles, les voici :
« Mets ton manteau tout brodé de points d'or
Sur la Terre, nuit si belle.
Viens apporter à celui qui s'endort
Un doux rêve, nuit si belle.

Sur les amants qui s'adorent, tu sembles veiller toujours.
Tu es plus belle que le jour,  et plus douce que l'aurore.
Tous les poètes ont sans cesse chanté
Ta beauté, ô nuit si belle.
Ta beauté, ô nuit si belle. »

Deuxième doublage français (enregistrement en février-mars 19894, sortie française pour Pâques 1989) :
Société : Société Industrielle de Sonorisation (S.I.S.)2
Direction artistique : Jacqueline Porel 2
Direction musicale : Jean Cussac 2
Adaptation des dialogues : Claude Rigal-Ansous 2
Adaptations des chansons : Charles Level 2

Lady : Dominique Chauby 2 (Dialogues)
Lady : Claude Lombard 4 (Chant)
Le Clochard : Patrick Poivey 2
Darling : Martine Messager 2 (Dialogues)
Darling : Claude Lombard 4 (Chant)
Jim Chéri : Guy Chapelier 2
Peggy : Evelyn Selena 2 (Dialogues)
Peggy : Marie Ruggeri  4 (Chant)
Jock : Roger Carel 2
Cesar : Georges Atlas 2
Tante Sarah: Paule Emanuèle 2
Si et Am : Claude Lombard 4 (Dialogues et chant)
Tony : Jean Stout 4 (Dialogues et chant)
Jo : Roger Carel 6 (Dialogues)
Jo: Jean Cussac 4 (Chant)
Le Castor : Jacques Deschamps 4
Chanteur soliste "Paix sur Terre" : Jean-Claude Corbel  4
Toughy le vieux chien : Guy Piérauld 6
Saucisson-à-pattes le teckel : Roger Carel 4
Boris le lévrier russe : Jean Lescot 6
Pedro le chihuahua : Michel Mella ?4
Policier devant le parc : Georges Berthomieu 6
Promeneur devant le parc : Roger Carel 6
Agent de la fourrière qui arrête Peggy et Clochard: Marc Alfos 7
Agent de la fourrière qui interpelle Bill: Jacques Deschamps 6
Agent de la fourrière Bill: Jean Lescot 6
Vendeur de muselières : Georges Berthomieu 6
Docteur : Marc Alfos 7
Fermier en colère: Georges Berthomieu 8
Femmes à la réception : Paule Emanuèle 5Evelyn Selena 6 et Dominique Chauby 6
Hommes à la réception : Guy Chapelier 6
Chœurs : Jean-Claude Corbel  4, Jean Cussac 4, Jean Stout 4, Dominique Poulain 4, etc.
Remarque : Doublage exploité entre 1989 et 1996 en salles, VHS et Laserdisc. Nous l’avons intégralement numérisé.

Troisième doublage français (enregistrement en février-mars 19974, sortie française le 25 juin 1997) :
Société : Dubbing Brothers2
Direction artistique : Nathalie Raimbault 2
Direction musicale : Georges Costa 2
Adaptation des dialogues : Claude Rigal-Ansous 2
Adaptations des chansons : Charles Level 2
Responsable de production : Dalila Mesli 2
Superviseur : Fred Taïeb 2

Lady : Barbara Tissier 6 (Dialogues et chant)
Le Clochard : Guillaume Lebon 6
Darling : Sophie Deschaumes 2(Dialogues et chant)
Jim Chéri : Michel Papineschi 6
Peggy : Marie Ruggeri 2 (Dialogues et chant)
Jock : Pierre Baton 2
Cesar : Pascal Renwick 6
Tante Sarah: Paule Emanuèle 6
Si et Am : Sophie Deschaumes 2 (Dialogues et chant)
Tony : Gérard Rinaldi 2 (Dialogues et chant)
Jo : Gérard Hernandez 2 (Dialogues et chant)
Le Castor : Eric Metayer 6
Chanteur soliste "Paix sur Terre" : Olivier Constantin 2
Toughy le vieux chien : Gérard Surugue 6
Saucisson-à-pattes le teckel : Michel Mella 4
Boris le lévrier russe : Jacques Frantz 6
Bouledogue : Roger Carel 6
Pedro le chihuahua : Eric Metayer 4
Policier devant le parc : Michel Vocoret 6
Promeneur devant le parc : Henri Labussière 6
Agent de la fourrière qui arrête Peggy et Clochard: Marc Alfos 6
Agent de la fourrière qui interpelle Bill: Gérard Surugue 4
Vendeur de muselières : Patrick Préjean 6
Docteur : Patrick Préjean 4
Fermier en colère: Gérard Rinaldi 4
Femmes à la réception : Lucie Dolène 6 et Evelyne Grandjean 6
Hommes à la réception : Michel Vocoret 4, Henri Labussière 6 et Patrick Préjean 6
Chœurs : Olivier Constantin4, Georges Costa  4, Michel Costa 4, Jean Stout 4, Dominique Poulain 4, etc.
Remarques :
-Doublage exploité à partir de 1997 en salles, DVD, VHS, Blu Ray, etc.
-Marie Ruggeri reprend huit ans après l’avoir doublé le rôle de Peggy, en faisant cette fois-ci la voix parlée en plus de la voix chantée. Marc Alfos reprend également le rôle de l’agent de la fourrière.
-A part de très légères différences (notamment le « tu veux que je te tue ? » de Tony qui devient en 97 « tu veux que je te torde le cou ? »), les adaptations de 89 et 97 sont quasiment identiques.

Fiches voxographiques de La Belle et le Clochard réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 2 juillet 2017.
Sources : 
1François Justamand / La Gazette du Doublage(Remerciements à Claire Leclerc),
2Carton VHS/DVD/Blu-Ray, 
4Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios (Remerciements à Marie-Martine, Marie Ruggeri, Jean Cussac et Nathalie Raimbault),


LA BELLE AU BOIS DORMANT (1959)

Doublage français d'origine (sortie française le 16 décembre 1959) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 1
Direction musicale : Georges Tzipine 2
Adaptation des dialogues : Pierre-François Caillé 1
Adaptation des chansons : Henry Lemarchand 1

Princesse Aurore / Eglantine : Irène Valois 3 (Dialogues)
Princesse Aurore / Eglantine : Huguette Boulangeot 3 (Chant)
Prince Philippe : Guy Severyns 3 (Chant, et certainement dialogues)
Maléfique : Jeanne Dorival 3
Flora : Henriette Marion 3
Pâquerette : Colette Adam 4
Pimprenelle : Jacqueline Ferrière 5
Roi Stéphane : Jacques Berlioz 6
Roi Hubert : Raymond Rognoni  3
Aboyeur de la cour : Maurice Nasil 6
Choeurs : Chœur Marguerite Murcier 1
Remarques :
-Doublage exploité de 1959 à 1980 en salles et perdu depuis. Nous n’avons pu en reconstituer qu’un quart à partir d’extraits sur films super 8 ou émissions de télévision de l’époque. Ce doublage est très recherché, toute aide est la bienvenue (danslombredesstudios@gmail.com).
-Les chœurs du générique d’introduction étaient laissés en V.O.
-Pierre-François Caillé signe une adaptation remarquable, très théâtrale.
« Qu’une forêt de ronces devienne son tombeau,
Dans un nuage de mort, qu’elle croisse inextricable.
Assouvis ma vengeance, je la veux implacable,
Que la malédiction règne autour du château ».

Second doublage français (enregistrement en janvier 19817, sortie française le 25 mars 1981) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 1
Direction artistique : Jacqueline Porel 1
Direction musicale : Jean Cussac 1
Adaptation des dialogues et des chansons : Natacha Nahon 1

Princesse Aurore / Rose : Jeanine Forney 1 (Dialogues)
Princesse Aurore / Rose : Danielle Licari 1 (Chant)
Prince Philippe : Guy Chapelier 1 (Dialogues)
Prince Philippe : Olivier Constantin 1(Chant)
Maléfique : Sylvie Moreau 1
Flora : Paule Emanuèle 1
Pâquerette : Marie-Christine Darah 1
Pimprenelle : Jeanine Freson 1
Roi Stéphane : René Bériard 1 (Dialogues)
Roi Stéphane : Henry Tallourd 7(Chant)
Roi Hubert : Roger Carel 1 (Dialogues et chant)
La Reine : Jacqueline Porel 4
Aboyeur de la cour : Marc François 8
Un sbire de Maléfique : Marc François 8
Choeurs : Jean Cussac 7, Anne Germain 7, Danielle Licari 7, Claude Chauvet 7, etc.
Remarques :
-Doublage exploité de 1981 à nos jours en VHS, Laserdisc (avec les crédits… du premier doublage) et DVD.
-Lors de l’enregistrement des chœurs, la console de la S.P.S. est tombée en panne, si bien que les choristes ont dû faire les pistes de re-recording sans aucun support musical dans le casque.

Fiches voxographiques de La Belle au Bois dormant réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 29 juin 2017.
Sources :
1Carton Laserdisc/VHS/DVD/CD,
2Hercule / Nouveau forum doublage francophone (d’après CD québécois),
4Gilles Hané / Dans l'ombre des studios(remerciements à Colette Adam),
7Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Gilles Hané, Anne Germain, Jean Cussac et Claude Chauvet)
Lecture conseillée :
L’article que j’ai co-écrit avec Gilles Hané sur les deux doublages de La Belle au Bois dormant.



                    LES 101 DALMATIENS (1961)


Doublage français d’origine (sortie française le 16 décembre 1961) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 1
Adaptation des dialogues : Pierre-François Caillé 1 et Geneviève Labbe de Champgrand 1
Adaptation des chansons : Henry Lemarchand 1

Pongo : Roger Carel 2
Perdita : Sophie Leclair 2
Cruella d’Enfer : Lita Recio 2
Roger : Roger Rudel 2(Dialogues)
Roger : Jean Cussac 3 (Chant)
Anita : Claude Chantal  2 (Dialogues)
Nanny : Henriette Marion 2
Jasper : Claude Bertrand 2
Horace : Paul Bonifas 4
Le Sergent Tibbs : Jacques Aveline ?
Le Capitaine : Fernand Rauzena 4
Le Colonel : Jacques Berlioz 4
Le Danois : Georges Atlas 4
Lucy : Hélène Tossy 5
Le Colley : Duncan Elliott 4
Le Labrador : Pierre Leproux 4
Rolly : Marie-Martine 5
Lucky : Marie-Martine 3 (sur certaines répliques)
Biscotte : Marie-Martine 3 (sur certaines répliques)
Penny : Marie-Martine 3 (sur certaines répliques)
Cadpig : Elisabeth Boda ? 3
Wizzer : Marie-Martine 3
Rover : Marie-Martine 3 (1èreréplique « Mais on n’a pas été volé, etc. »)
Rover : Dominique Collignon-Maurin3 (2èmeréplique « On ne les a pas comptés, etc. »)
Spotty : Dominique Collignon-Maurin3 (1ère  réplique « Ca serait pas les derniers arrivés, etc. »)
Spotty : Marie-Martine 3 (2èmeréplique « Gare aux bandits, etc. »)
Divers petits dalmatiens : Dominique Collignon-Maurin 3, Marie-Martine 3, etc.
Vache Princesse : Hélène Tossy 5
Vache Reine : Claude Daltys 4
Vache Duchesse : Madeleine Duhau 5
Le prêtre : Jean-Roger Caussimon 4
Le mécanicien : Maurice Pierrat 4
L’annonceur des Kanine Krunchies : Michel Gudin 4
Le présentateur du jeu télé : Duncan Elliott 4
L’inspecteur Graves (jeu télé) : René Blancard ? 4
Mlle Hortense Birdwell (jeu télé) : Claude Daltys 4
M. Simpkins (jeu télé) : Gérald Castrix 4
Chanteuse soliste à la radio : Michèle Conti 3
Un maître (ambiance off) : Claude Bertrand 3(« Assez, j’te dis ! »)
Remarques :
-Doublage exploité en salles et VHS québécoise de 1961 à 1994.
-L’adaptation de Pierre-François Caillé est là encore un petit bijou, notamment sur les dialogues entre Horace et Jasper, pleins d’expressions « des faubourgs » et d’argot.
-Les dernières notes du film sont chantées par un petit chœur dans la V.O. , et par Roger (Jean Cussac) et Anita (peut-être Janine de Waleyne, ou Michèle Conti qui chante le petit passage radio) dans la V.F.
-Les voix de quatre personnages secondaires importants n’ont toujours pas été identifiées (Patch (le très bavard petit dalmatien), Sergent Tibbs, Puce et Grognard), mais aucune ne correspond à celle de Pierre Morin, apparemment crédité par erreur au générique.
-Il y a une erreur pendant la conversation entre Nanny, Jasper et Horace. Jasper (Claude Bertrand) prend soudain la voix d’Horace (Paul Bonifas) sur la réplique « Et c’est pour votre sécurité, madame ». Le suivi des voix des petits dalmatiens est également très aléatoire, parfois en raison de problèmes de scripts, et d’autres fois de façon moins pardonnable (comme par exemple lors de l’échange Rover/Spotty lorsque le Sergent Tibbs fait une reconnaissance dans la maison de Cruella).
-Comme pour d’autres Disney, les premiers voxophiles à s’être penchés sur ce film ont commis de nombreuses erreurs, qui depuis sont reproduites partout sur internet (par exemple, Jacques Berlioz indiqué comme voix d’Horace).

Doublage d’une chanson jamais doublée (1995) :
La chanson « Kanine Krunchies », curieusement remplacée par un instrumental pour la sortie française d’époque (1961), est doublée par un petit chœur d’enfants pour la sortie en salles de 1995. Le chœur ne dépareille pas avec le reste du doublage et paraît d’époque.
Direction musicale : Georges Costa 3
Supervision : Fred Taïeb 3
Remarque : Doublage exploité de 1995 à nos jours en salles, VHS, DVD, etc.

Fiches voxographiques des 101 Dalmatiens réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 2 juillet 2017.
Sources :
1Carton VHS/DVD/CD/Sacem,
3Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Jean Cussac , Gilles Hané, Marie-Martine, Bruno Conti, Benoît Trotot, Georges Costa et Fred Taïeb),


MERLIN L'ENCHANTEUR (1963)

Doublage français unique (sortie française le 16 décembre 1964) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 1
Direction artistique : Serge Nadaud 1
Adaptation des dialogues : Maurice Griffe 1
Adaptation des chansons : Christian Jollet 1
Supervision : W.J. Hardouin 1

Merlin : Alfred Pasquali  1
Arthur « Moustique » : Dominique Collignon-Maurin 1
Madame Mim : Lita Recio 1
Archimède : René Hiéronimus 1
Sir Hector : Claude Bertrand 1
Sir Kay : Jacques Balutin 1
Sir Pellinore : Jacques Ciron 1
Le Chevalier Noir : Armand Mestral 1
La Cuisinière : Henriette Marion 1
Le Narrateur : Jean-Pierre Duclos 1
Chanteur soliste de « L’épée dans l’enclume » : Jean Cussac 1
Un Chevalier (off) : Serge Nadaud 2 (« C’est un miracle opéré par le ciel, etc. »)
Remarques :
-Alfred Pasquali double Merlin avec une maîtrise extraordinaire, jonglant avec les mots et les borborygmes du personnage comme s’il en était la voix originale.
-Dominique Collignon-Maurin est crédité par erreur sous le nom de Jean-Dominique Morin.
-Le petit chœur final est laissé en V.O. mais le texte est de toute façon incompréhensible.
-Merlin l’enchanteur (1963) est considéré comme étant le premier long-métrage d’animation Disney à avoir connu un doublage à sa sortie et à ne pas avoir été redoublé (intégralement ou partiellement) ou avoir subi de retouches par la suite.

Fiches voxographiques de Merlin l’enchanteur réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 2 juillet 2017.
Sources :
1Carton VHS,


ET LA SUITE ? 

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Fiches voxographiques Disney, 6ème partie: De Mary Poppins à L'Apprentie Sorcière

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Voici la suite de la synthèse des recherches sur les premiers doublages Disney que j'ai effectuées en collaboration avec François Justamand (La Gazette du Doublage), Olikos (Grands Classiques) et Greg Philip (Film perdu). 


MARY POPPINS (1964)

Doublage français unique (enregistrement en décembre 19641, sortie française le 1er septembre 1965) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Direction artistique : Serge Nadaud 2
Direction musicale : André Theurer 1
Adaptation des dialogues : Louis Sauvat 2
Adaptation des chansons : Christian Jollet 2

Mary Poppins : Eliane Thibault 2 (Dialogues et Chant)
Bert / M. Dawes Senior : Michel Roux 2 (Dialogues et Chant)
M. Banks : Roger Tréville 2 (Dialogues et Chant)
Mme Banks : Nicole Riche 3 (Dialogues et Chant)
Jane Banks : Elisabeth Boda 2 (Dialogues et Chant)
Michael Banks : Benjamin Boda 2 (Dialogues et Chant)
Oncle Albert : Richard Francoeur 4(Dialogues et Chant)
Sergent Jones : Fernand Fabre 5
Ellen, la gouvernante : Hélène Tossy 2 (Dialogues et Chant)
Mme Brill, la cuisinière: Germaine Michel 3 (Dialogues et Chant)
Katie Nounou : Françoise Fechter 6
Amiral Boom : Jacques Hilling 1
M. Binnacle, canonnier de l’Amiral Boom : Jean Daurand 5
M. Dawes Junior, un banquier : Alfred Pasquali  1
M. Mousley, un banquier : Jacques Balutin 1
M. Tomes, un banquier : Paul Villé 3
M. Grubbs, un banquier : Henri Virlojeux 1
Deuxième cliente de la banque : Henriette Marion 6
Le chef caissier : Georges Atlas 3
La femme aux oiseaux : Henriette Marion 5
Le parapluie-perroquet : René Hiéronimus 1
Le bélier : Jean Cussac 1
Les brebis : Anne Germain1,  Jeanette Baucomont 1et Janine de Waleyne 1
Le cheval : Pierre Marret 1
La vache : Jean Cussac 1
Les oies : Anne Germain1,  Jeanette Baucomont 1et Michelle Dornay 1
Le cochon : Pierre Marret 1
Pingouin « Toujours avec vous, Mary Poppins » : Hubert de Lapparent 3
Pingouin « Vous êtes notre préférée » : Jean Cussac 1
Le gardien du carrousel : Georges Hubert 5
Le renard : Roger Crouzet 3
Le jockey : Jacques Ciron 1
Premier juge de la course hippique : Jacques Hilling 3
Deuxième juge de la course hippique : Alfred Pasquali 3
Troisième juge de la course hippique : Jean-Henri Chambois 1
Premier journaliste : Georges Atlas 5
Deuxième journaliste : Henri Virlojeux 3
Troisième journaliste : Jacques Ciron 1
Le musicien battu par sa femme : Jacques Marin 1
Chœurs : au moins douze femmes (parmi lesquelles Christiane Legrand 2, Jeanette Baucomont 1, Janine de Waleyne 1, Claude Chauvet 1, Anne Germain 1, Alice Herald 1, Michelle Dornay 1, etc.) et douze hommes (parmi lesquels Claude Germain 1, Georges Thery 1, Guy Marly 2, Jean Cussac 1, Pierre Marret 1, José Germain 1, etc.)
Remarques :
-Dans le générique final, il y a une erreur qui est assez rare dans l’histoire du doublage : les noms de certains choristes (Anne Germain, Jeanette Baucomont, etc.) et comédiens doublant de petits rôles et ambiances (Hubert de Lapparent, Paul Villé, etc.) sont mentionnés (sans attributions de rôles), alors que sont oubliés de nombreux comédiens/rôles importants (Jacques Hilling/Amiral Boom, Nicole Riche/Mme Banks, Françoise Fechter/Katie Nounou, etc.).
Cette erreur a donné lieu à une première fiche voxographique erronée (faite par un voxophile qui avait attribué au petit bonheur la chance les noms de Paul Villé, Anne Germain, etc. à des rôles importants), qui circule encore sur le net.
Alors qu’Anne Germain m’a elle-même attesté, avec son excellente mémoire : 1) ne pas doubler Mme Banks, 2) n’avoir été que choriste (et avoir participé au petit groupe d’oies et brebis) dans le film, 3) que Mme Banks était doublée par la voix habituelle de Shirley MacLaine, à savoir Nicole Riche (voix qui est par ailleurs clairement reconnaissable par tout passionné de doublages des années 50/60) ; et qu’en plus de ça son nom n’est même pas associé à un rôle au générique (si encore c’était le cas, on pourrait comprendre d’éventuelles réserves)….il est encore impossible aujourd’hui de la remplacer par Nicole Riche sur Wikipedia, en raison d’un ou plusieurs modérateurs aussi bornés que de mauvaise foi.
-Dans la scène de la banque, deux répliques de Dawes Jr « Aux mille et une affaires d’entreprises » et « charbonnages »sont dites par un autre comédien que Pasquali (mais lequel ?). Autre problème (venant certainement de la détection), la réplique « Investissements, actions de sociétés » est prononcée par Roger Tréville/Banks alors qu’elle devrait l’être par Michel Roux/Dawes Sr.
-L’adaptation de Christian Jollet pour les chansons montre –particulièrement pour ce film-  ses limites avec cette curieuse « médecine à couler ».

Fiches voxographiques de Mary Poppins réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 7 janvier 2018.
Sources :
1Rémi Carémel / Dans l’ombre des studios (remerciements à Elisabeth Boda, Anne Germain, José Germain, Alice Herald et Claude Chauvet),
Lecture conseillée :
Mon interview (en trois parties) d’Eliane Thibault, voix française de Julie Andrews dans Mary Poppins.


LE LIVRE DE LA JUNGLE (1967)

Doublage français d’origine (enregistrement en octobre 19681, sortie française le 11 décembre 1968) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Direction artistique : Henri Allegrier-Ebstein 2
Adaptation des dialogues : Louis Sauvat 2
Adaptation des chansons : Louis Sauvat 2 et Christian Jollet 2
Supervision : Wally J. Hardouin 2

Mowgli : Pascal Bressy 2 (Dialogues et Chant)
Baloo : Claude Bertrand 2 (Dialogues)
Baloo : Jean Stout 2 (Chant)
Bagheera : René Arrieu 2 (Dialogues)
Bagheera : José Germain 1 (Chant)
Shere Kahn : Jean Martinelli 2 (Dialogues)
Shere Kahn : Jean Stout 1 (Chant)
Le Roi Louie : José Bartel 2 (Dialogues et Chant)
Kaa : Roger Carel 2 (Dialogues et Chant)
Shanti : Lucie Dolène 2
Colonel Hathi : Jean Martinelli 2 (Dialogues)
Colonel Hathi : Pierre Marret 2 (Chant)
Winifred : Germaine Kerjean 2
Junior : Gaston Guez 2
Buzzie : Jacques Hilling 2 (Dialogues)
Flaps : Léonce Corne 1 (Dialogues)
Ziggy : Maurice Nasil 1 (Dialogues)
Dizzy : Jacques Balutin 1 (Dialogues)
Rama : Jacques Degor 2
Akela : Henry Djanik 2
Singes : Henri Charrett 2, René Hiéronimus 2 et Paul Bisciglia 2
Quatuor vocal des vautours « Tes vrais amis » : Vincent Munro 1 (ténor lead), Jean Cussac 1 (ténor 2), José Germain 1 (basse 1), et Pierre Marret 1(basse 2)
Chœur « La Patrouille des éléphants » : Jean Stout 1 (lead « s’achemine pesamment »), Jean Cussac 1, José Germain 1, Vincent Munro 1, etc.
Remarques :
-Jean Cussac est crédité par erreur au générique (à la place de José Germain) en voix chantée de Bagheera (l’erreur fut corrigée dans le dossier de presse). Il a bien participé au doublage, mais comme choriste (quatuor des vautours, chœur des éléphants) et assistant du directeur musical (André Theurer ou Georges Tzipine). Il se peut que ce soit lui qui fasse la voix de Bagheera sur la réplique parlée « Oh, y a pas de doute » à la fin du film.
-Jean Stout m’a dit avoir, en plus de Baloo, été la voix chantée du Colonel Hathi et de Shere Kahn. Pour Hathi il semble que ce soit bien Pierre Marret (comme indiqué au générique) mais que Jean Stout soit choriste lead (« s’achemine pesamment ») du chœur des éléphants.
-Au générique, la mention « de la Comédie-Française » est accolée au nom de René Arrieu.
-Petite erreur : Ziggy (doublé par Maurice Nasil) parle avec la voix de Jacques Balutin (Dizzy) sur la réplique « Allons-y les gars » et avec celle de Léonce Corne (Flaps) sur « avec sa queue en flamme il a filé aussi vite qu’une comète ».
-Doublage exploité de 1968 à nos jours en salles, diffusions télé (avec parfois le carton du redoublage partiel de 1997 !), VHS, Blu Ray (avec le carton du redoublage partiel de 1997) et dans des éditions DVD récentes.

Redoublage partiel de la version de 1968 (enregistrement vers 1997) :
Shanti : Claire Guyot 2
Remarques :
-Dans ce redoublage partiel, seule la voix de Lucie Dolène a été remplacée (par Claire Guyot), par « représailles » de Disney envers Lucie (qui venait de gagner son procès pour les droits de Banche-Neige et les sept nains).
-Doublage exploité de 1997 à 2007 dans certaines éditions DVD.

Fiches voxographiques du Livre de la Jungle réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 7 janvier 2018.
Sources :
1Rémi Carémel / Dans l’ombre des studios (remerciements à Anne Germain, José Germain, Jean Cussac, Jean Stout et Philippe Videcoq-Gagé),
2Carton VHS / Livre-disque Disneyland Records / DVD / Dossier de presse (remerciements à François Justamand).
Lecture conseillée :



LES ARISTOCHATS (1970)


Doublage français unique (enregistrement en mars 19711, sortie française le 8 décembre 1971):
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Direction artistique : Henri Allegrier-Ebstein 2
Direction musicale : André Theurer 2
Adaptation des dialogues : Louis Sauvat 2
Adaptation des chansons : Christian Jollet 2
Supervision : Wally J. Hardouin 2

Thomas O' Malley : Claude Bertrand 2 (Dialogues et Chant)
Duchesse : Michèle André 2 (Dialogues)
Duchesse : Anne Germain 1 (Chant)
Berlioz : Mark Lesser 2 (Dialogues)
Berlioz : Nicolas Cour 1 (Chant)
Marie : Vanina Vinitzki 2 (Dialogues)
Marie : Isabelle Germain 1 (Chant)
Toulouse : Vladimir Vinitzki 2 (Dialogues)
Toulouse : Olivier Cour 1 (Chant)
Edgar : Jean-Henri Chambois 2
Mme Adelaïde de Bonfamille : Denise Grey 2
Georges Hautecourt : Alfred Pasquali 2
Roquefort : Roger Carel 2
Napoléon : Jacques Dynam 2
Lafayette : Roger Carel 2
Scat Cat : José Germain 2 (Chant)
Chat Chinois : Henri Tallourd 2
Chat Anglais : Steve Gadler 2
Chat Italien : Albert Augier 2
Chat Russe : Michel Seldow 2
Frou-Frou : Jacques Provins 2
Amelia Jacasse : Nicole Riche 2
Amélie Jacasse : Sylviane Mathieu 2
Oncle Waldo : Jacques Hilling 2
Le laitier : Fernard Rauzéna 3
Chanteur soliste du générique "Les Aristocats" : Maurice Chevalier 2
Chœurs : José Germain 1, Henri Tallourd 1, Michel Barouille 1, etc.
Remarques :
-Claude Bertrand assure à la fois les dialogues et le chant pour O’Malley, ce qui n’est pas le cas dans Le Livre de la Jungle (Baloo) et Robin des Bois (Petit Jean), où Jean Stout le remplace sur les chansons.
-Les duos Alfred Pasquali (Le Notaire)/Denise Grey (Madame) et Jacques Dynam (Napoléon)/ Roger Carel (Lafayette) sont extraordinaires d’humour et de vitalité ; on sent le plaisir du jeu, la générosité des interprètes ; bref, on est au théâtre.
-Les noms des enfants doublant les chatons en voix parlées et chantées ont été difficiles à « dépatouiller » : les contrats étaient signés par leurs parents, leurs souvenirs sont lointains et d’une période où ils n’étaient qu’enfants. En recoupant leurs témoignages et ceux d’Anne et José Germain, j’ai établi une fiche qui je pense est correcte, même si la participation d’Olivier Cour (grand frère de Nicolas) reste assez floue (pour Toulouse), et qu’un autre ancien enfant choriste (Bruno Conti, fils de la choriste Michèle Conti) se souvient avoir doublé Berlioz dans « Des gammes et des arpèges » (il est probable qu’il n’ait passé qu’un essai, et que cet essai ait été remporté par Nicolas Cour, car Anne Germain se souvenait bien de Nicolas, et les souvenirs de celui-ci sur le doublage sont assez précis).
-L’adaptation de Christian Jollet montre là encore quelques limites pour les chansons : certaines tournures sont alambiquées, la prosodie n’est pas fantastique et du coup plusieurs mots sont difficilement compréhensibles.
-Dans la chanson « Thomas O’Malley », le prénom « Giuseppe » est prononcé « à la française » (« Gi-ou-seppe ») au lieu de « Giouseppé ». Cela sonne curieusement.
-Petites coquilles dans le générique de début : Michèle « Andrée » (au lieu de André), « Christian » Lesser (au lieu de Mark), Vladimir et Vanina « Vinitzvi » (au lieu de Vinizki) et « P.H. » Chambois (au lieu de J.H. pour Jean-Henri).
-Albert Augier (le Chat italien) est crédité par son seul nom (« Augier »), comme au temps où il faisait du music-hall comme imitateur.
-Petite erreur de montage audio sur le premier « Quel chat chouchou » du générique, qui semble mis en re-recording sur une autre piste.

Fiches voxographiques des Aristochats réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 7 janvier 2018.
Sources :
1Rémi Carémel / Dans l’ombre des studios (remerciements à Anne Germain, Isabelle Germain, José Germain, Nicolas Cour, Vanina Vinitzki, Mark Lesser et Bruno Conti),
2Dossier de presse d’époque,
Lectures conseillées :
-Mon portrait de José Germain (voix chantée de Scat Cat) pour La Gazette du Doublage (2007).
-L’hommage à Claude Bertrand (O’Malley) par François Justamand pour La Gazette du Doublage.


L'APPRENTIE SORCIÈRE (1971)

Premier doublage français (enregistrement en mars 19721, sortie française le 25 octobre 1972) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Studio : Studios de Boulogne 1
Direction artistique : Serge Nadaud 2
Direction musicale : Georges Tzipine 2
Adaptation des dialogues : Louis Sauvat 2
Adaptation des chansons : Christian Jollet 2
Supervision : Jack Cutting 1

Eglantine Price : Mony Dalmès 2 (Dialogues)
Eglantine Price : Eliane Thibault 2 (Chant)
Emelius Browne : Philippe Dumat 2 (Dialogues)
Emelius Browne : Francis Linel 2 (Chant)
Carrie Rawlins : Séverine Morisot 2
Charlie Rawlins : Fabrice Bruno 2
Paul Rawlins : Christophe Bruno 2
Mme Hobday, responsable du centre d’accueil : Lita Recio 2
Général Taegler : Gérard Ferrat 2
Colonel Heller : Jean Berger 2
M. Jelk, le prêtre : Jean-Pierre Dorat 2
Swinburne, homme de main du libraire : Georges Atlas 2
Le libraire : Henri Virlojeux 2
Capitaine Greer : Jacques Marin 2
Le Merlu : Jean-Henri Chambois 2
L’Ours : Jacques Dynam 2
Le Lion : Claude Bertrand 2
L’Oiseau : Jacques Ciron 2
Le vieux fermier peignant le panneau : Paul Villé 3
La femme récupérant des enfants au centre d’accueil : Marie Francey 1
Le sergent moustachu de la garde territoriale : Pierre Collet 1
Vendeur russe : Pierre Marret 1
Vendeur d’antiquités : José Germain 1
Vendeuse de cristaux : Anne Germain 1
Vendeur de bijoux : Henri Tallourd 1
Vendeur de tableaux : Jean Stout 1
Vendeuse de bijoux: Marie Francey 4
Le chef de gare : Fernand Fabre 1
Sergent allemand : Hans Verner 3
Voix-off « centre d’accueil d’enfants, musée fermé » : Marie Francey 5
Voix-off lecture journal : Jean Berger 1
Chœurs : Anne Germain 1, Géraldine Gogly 1, Françoise Walle 1, Henri Tallourd 1,Jean Stout 1, etc.
Remarques :
-Malgré tout le talent des quatre interprètes, le raccord voix parlée/voix chantée n’est pas « évident » pour Miss Price (Mony Dalmès/Eliane Thibault) et Emelius Browne (Philippe Dumat/Francis Linel), les différences entre voix parlées et chantées sont trop flagrantes.
-Les chœurs de la marche de la garde territoriale et de la marche des armures sont repiqués sur la V.O. Le chœur du générique est remplacé par un instrumental dans le premier mixage du doublage (salles, Laserdisc) et repiqué sur la V.O. dans le mixage récent (DVD version exclusive or).
-Petites coquilles dans le carton doublage : « Franicis » (au lieu de Francis) Linel et « Patrice » (au lieu de Fabrice) Bruno.
-Dans le dossier de presse français, Bernard Uzan est crédité comme voix d’un vendeur. Il s’agit certainement d’une erreur car aucun vendeur ne correspond à son âge ni à sa voix.
-Doublage exploité en salles, Laserdisc, diffusions télé, DVD version exclusive or (avec  le carton du 2ème doublage !).

Redoublage partiel de la version de 1972 (enregistrement vers 1979-1981) :
Mme Hobday, responsable du centre d’accueil : Lita Recio 6
Remarques :
-Le montage de 1972 (qui faisait 117 mn) a subi de nombreuses coupes. Pour des questions de logique liées à ce nouveau montage, certaines répliques ont été corrigées ou rajoutées, parmi lesquelles une de Mme Hobday (Lita Recio), qui en parlant aux enfants n’entend plus « défiler la territoriale » (puisque la scène est coupée), mais leur demande de rester tranquilles (en entendant les bruits de la moto de Miss Price, ajoutés au montage).
-Doublage exploité en VHS (montage de 98 mn).

Deuxième doublage français (enregistrement en mars 20031, sortie française en 2003)
Société et studio : Cinéphase 1
Direction artistique : Barbara Tissier 1
Direction musicale : Georges Costa 1
Adaptation des dialogues originaux : Louis Sauvat 2
Adaptation des chansons originales : Christian Jollet 2
Adaptation des nouveaux dialogues et des nouvelles chansons : Philippe Videcoq-Gagé 1
Enregistrement : Vincent Demortain 1

Eglantine Price : Brigitte Virtudes 2 (Dialogues et Chant)
Emelius Browne : Bernard Alane 2 (Dialogues et Chant)
Carrie Rawlins : Camille Donda 2 (Dialogues et Chant)
Charlie Rawlins : Maxime Baudoin 2 (Dialogues et Chant)
Paul Rawlins : Gwenvin Sommier 2 (Dialogues)
Paul Rawlins : Louis Pottier 2 (Chant)
Mme Hobday, responsable du centre d’accueil : Marion Game 2
Général Taegler : Jean-Pierre Denys 7
Colonel Heller : Marc Perez 7
M. Jelk, le prêtre : Eric Legrand 2
Swinburne, homme de main du libraire : Nicolas Marié 2
Le libraire : Pierre Baton 2
Capitaine Greer : Philippe Dumat2
Le Merlu : Gérard Dessalles 8
L’Ours : Pascal Renwick 9
Le Lion : Richard Darbois 2
L’Oiseau : Jean-Claude Donda 8
Le vieux fermier peignant le panneau : Georges Aubert 1
La femme récupérant des enfants au centre d’accueil : Hélène Otternaud 7
M. Widdenfield, le vieux garde du centre d’accueil : Jacques Dynam 1
Le sergent moustachu de la garde territoriale : Pascal Casanova 10
Vendeur de sculptures : Olivier Constantin 11
Vendeur russe : Olivier Constantin 1
Vendeur d’antiquités : Olivier Constantin 1
Vendeuse de cristaux : Francine Chantereau 1
Vendeur d’armes anciennes : Georges Costa 1
Vendeur de bijoux : Michel Costa 1
Vendeur de tableaux : Jacques Mercier 1
Vendeuse de fripes : Martine Latorre 1
Premier vendeur de livres : Olivier Constantin1
Deuxième vendeur de livres : Daniel Beretta 8
Le chef de gare : Jean-Pierre Denys 7
Voix-off « centre d’accueil d’enfants, musée fermé » : Sylvie Genty 7
Voix des actualités radio : Bernard Metraux 11
Voix-off lecture journal : Bernard Alane 1
Chœurs : Francine Chantereau 2, Dominique Poulain 2, Martine Latorre 2, Magali Bonfils 2,Michel Costa 2, Georges Costa 2, Olivier Constantin 2, Jean-Marie Marrier 2, Jacques Mercier 2 et Jean-Claude Briodin 2.
Remarques :
-Philippe Videcoq-Gagé est l’auteur des dialogues et chansons supplémentaires ; pour ce qui est de ce qui avait déjà été adapté en 1972 (premier montage), il a laissé presque à l’identique le travail fait par Louis Sauvat (dialogues) et Christian Jollet (chansons) à l’époque, mais a quand même tenu à modifier quelques passages des chansons « L’âge de vos beaux rêves » et « Eglantine » qui lui paraissaient mal tournées, voire proches du contre-sens.
-Les chœurs du générique, de la marche de la garde territoriale, et de la marche des armures sont repiqués sur la V.O.
-Philippe Dumat et Jacques Dynam sont les seuls comédiens à avoir participé aux deux doublages, mais ils n’ont pas conservé leurs rôles entre le premier et le deuxième doublage.
-Doublage exploité en DVD édition longue 134 mn (avec  le carton du 1er doublage !).

Fiches voxographiques de L’Apprentie sorcière réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 7 janvier 2018.
Sources :
1Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Anne Germain, Philippe Dumat, Philippe Videcoq-Gagé, Barbara Tissier, Jean-Claude Donda, Georges Costa et Michel Costa),
2Carton DVD/Dossier de presse (remerciements à Christian R., Copin et FX),

Evelyn Selena : Rencontre avec une drôle de dame (Partie 1/3)

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Entretiens réalisés entre le 30 mars 2017 et le 17 février 2018 (remerciements à David Gential).

Des grands drames shakespeariens aux séries télé de l’après-midi, des comédies les plus délurées aux plus sombres thrillers, c’est avec la superbe voix de la comédienne Evelyn Selena que se sont exprimées sur les écrans français Meryl Streep (Out of Africa), Glenn Close (Les Liaisons Dangereuses), Carrie Fisher (Star Wars ép. IV-V-VI), Helen Mirren (The Queen), Jacqueline Bisset (Airport), Judi Dench (Philomena), Jane Fonda (La Maison du Lac), Jaclyn Smith (Les Drôles de Dames), Jane Seymour (Docteur Quinn, femme médecin) ou bien encore Linda Gray (Dallas).  
Outre son talent, on retient d’Evelyn Selena sa lucidité et un amour à la fois passionnel et intransigeant pour son métier, qui ne laisse aucune place à la médiocrité et à l’amateurisme. Sans langue de bois et avec une pointe de nostalgie, elle m’a généreusement accordé cet entretien.


DLODS : Evelyn Selena, comment êtes-vous devenue comédienne ?

Mon vrai nom est Evelyn Schetrit (et non pas Benchétrit comme on peut le lire sur internet), je suis née à Casablanca le 19 juillet 1939. Mes parents aimaient les prénoms anglophones donc ils m’ont appelée Evelyn (sans « e ») et ma sœur Gladys. Maman était mère au foyer, et papa travaillait dans une société d’alimentation. Il était doué pour le dessin et la musique –il jouait du violon- et avait voulu que ma sœur et moi prenions des cours de piano. J’aimais beaucoup la musique mais les cours étaient difficiles, je prenais des coups de règle (rires). Quand mon père est parti en Palestine alors que j’avais neuf ans, on s’est installé chez ma grand-mère et nous n’avions plus les moyens de payer des cours de musique. Le directeur du conservatoire de Rabat a gentiment accepté que je vienne répéter sur le piano du conservatoire après les cours, et je restais souvent jusqu’à vingt-deux heures. J’adorais ça, mais sans professeur à mes côtés je ne pouvais pas progresser, je stagnais.
Ma mère m’a alors inscrite dans un cours au conservatoire, sans me dire ce que c’était. Je suis arrivée dans la classe, et il y avait quelqu’un qui chantait. Le professeur me demande « -Tu t’appelles comment ? Qu’est-ce que tu veux faire ? » « -En tout cas je ne sais pas chanter. » «- Qui est-ce qui chante ? » « -Celle juste avant, elle chantait » « -Tu ne connais pas tes classiques, elle joue Rosine dans « Le Barbier de Séville », et dans cette scène elle chante ».
Il me demande de monter sur scène, de faire semblant d’attendre l’autobus, et de faire comprendre ce qui arrive dans ma vie à ce moment-là. Je m’exécute, il me félicite et me demande où je suis née « - Ici, au Maroc. » « -Tu te fous de moi ? Tu n’as pas d’accent !».
Et je lui explique comment j’avais perdu l’accent marocain quelques temps plus tôt : un jour notre instituteur était venu à l’école, très triste, en nous expliquant qu’il n’aurait pas la force de nous faire cours car il venait de perdre sa maman, et qu’il allait à la place nous lire Les Pauvres Gens de Victor Hugo. C’était tellement magnifique quand il lisait, tout était différencié comme des notes de musique dans la prononciation, le présent, les imparfaits, les « é » et « è ».
Comme j’adorais sa façon de parler, de prononcer cette langue, j’ai commencé à me corriger, pour perdre mon accent « du cru » et ma sœur a suivi. Je me faisais engueuler par mes copines à l’école : « Oh, comme tu es devenue ! Oh la la, la Marie-Chantal ! » (rires). C’était l’insulte, mais je m’en foutais complètement !

DLODS : Vous avez donc intégré ce cours de théâtre au conservatoire de Rabat…

Oui, et comme je n’avais pas d’accent, j’ai sauté une classe. J’ai joué Lucinde dans Le médecin malgré lui, puis une italienne qui allait se faire exécuter dans Le Procès de Mary Dugan. Je parlais en italien et ne comprenais pas un mot de ce que je disais. Et puis mon maître, qui avait perdu sa femme, a été remplacé par un comédien membre de la troupe qui enregistrait pour Radio Maroc des montages radiophoniques le mardi, des poétiques le mercredi, des textes pour enfants le jeudi et une pièce le vendredi soir.
Il nous a auditionnés, a parlé de moi à ses amis, ils m’ont engagée au départ pour dire un bout de phrase « Si vous me permettez une suggestion » … et finalement j’ai fait le rôle principal. Sous le nom d’Evelyn Flore, ils m’ont engagée dans d’autres pièces, aussi bien à la radio que sur scène, j’ai par exemple joué la petite Rosette dans On ne badine pas avec l’amour.

DLODS : Bien que déjà professionnelle, pensiez-vous à ce moment-là devenir comédienne ?

Je ne voulais pas forcément être comédienne, car je pensais qu’il fallait venir à Paris, et à quinze ans ce n’était pas dans mes projets. Mais j’avais envie de continuer la troupe alors que maman souhaitait que j’arrête. Pour la convaincre, je lui disais que comme papa ne nous envoyait pas de pension alimentaire, travailler à Radio Maroc –en plus d’un petit boulot aux P.T.T.- ne pouvait que mettre du beurre dans les épinards. A l’époque au Maroc l’argent des enfants n’allait pas dans une banque, et il n’y avait pas d’assurance maladie, d’allocations familiales, de retraite, il n’y avait que les français qui venaient au Maroc qui avaient le droit à tout. Nous non, donc sept ans me sont passés sous le nez pour le décompte de ma retraite.
J’ai donc continué avec la troupe, on m’a donné un chaperon pour me surveiller, en journée on m’enfermait dans la chambre d’hôtel pour ne pas que je sorte (rires). Un jour on m’a proposée de me payer au mois « comme tout le monde ». « Comme tout le monde » c’était vite dit car je touchais l’équivalent de 150 francs par mois alors que les adultes touchaient dans les 1500 ou 2000 francs, ce qui était énorme pour le Maroc.
Amidou
Ca a duré cinq ans de plus comme ça. Et puis on a décidé de me faire homologuer par la radio à Paris. J’ai enregistré une scène classique, une scène moderne et le poème « Le dormeur du val » de Rimbaud. Et le jour de mes vingt ans, le dix-neuf juillet, je reçois une lettre de Paris. « Evelyn a été appréciée par le jury, elle est homologuée à la R.T.F. en première catégorie, Paris ». Or il n’y avait personne de mon entourage à part le chef de troupe, qui était payé au niveau de la première catégorie, alors on m’a dit « Tu la mets en sourdine, Evelyn. On ne passe jamais pour la première fois en première catégorie, tu acceptes ce qu’on te donne et puis c’est tout ». Et à la place de 150 ils m’ont donné 170 francs (rires). Ils me disaient, « si tu n’es pas contente, il y a la troupe arabe ». Il y avait en effet, en parallèle de notre troupe, une troupe arabe dont faisait partie Amidou à l’époque. Ils n’avaient pas le même répertoire, mais ils étaient payés la moitié des comédiens français pour le même travail et le même nombre d’heures, ce qui était particulièrement injuste.
Et puis un jour ils m’ont finalement augmentée à 750 francs, et c’est là que je suis partie (rires). Il commençait à y avoir des tensions dans le pays, les français partaient en masse. Etant marocaine et juive, je suis partie pour la France tant qu’il était encore temps, le 1erseptembre 1961. Et à Paris j’ai contacté Georges Chamarat, de la Comédie-Française, que j’avais rencontré au Maroc.

DLODS : Vous l’aviez rencontré dans quelles circonstances ?

Georges Chamarat
Des comédiens français dont Chamarat étaient venus jouer une pièce au Maroc. Notre troupe était chargée de les accueillir et de les emmener promener, déjeuner, etc. Georges Chamarat a trouvé que j’avais du tempérament, un regard très intense, et m’a dit que si un jour je comptais venir à Paris -ce qui n’était pas encore mon intention à ce moment-là- il me ferait préparer le concours d’entrée  du Conservatoire. Il a tenu parole et a été merveilleux.
Il m’a fait préparer Camille de On ne badine pas avec l’amourLes caprices de Marianne et une pièce moderne. Comme ma sœur, en cours chez Raymond Girard, présentait elle aussi le concours, il m’a prévenu que si le jury savait qu’on était sœurs, il y aurait des chances qu’il n’en retienne qu’une sur deux. Du coup, il m’a demandé de changer de nom et de ne pas reprendre le pseudonyme que j’avais pris à Radio Maroc («Evelyn Flore, ça fait cabaret ! Tu vises la Comédie-Française, il faut trouver autre chose…»). Comme la mère de mon petit fiancé de l’époque m’avait tiré les cartes et avait vu que j’étais née sous l’influence bénéfique de la lune, mon fiancé, qui avait fait du grec ancien, m’a dit « La lune en grec, c’est Selenae ». J’ai proposé d’enlever le « e » car je ne trouvais pas ça joli, en lui demandant « C’est toujours valable ? Elle sera toujours la déesse de la lune ? » (rires), il a approuvé et je suis devenue Evelyn Selena.
Au concours d’entrée j’arrive première sur trois-cent candidates. J’ai ma photo dans les journaux, « la petite marocaine découverte par un sociétaire de la Comédie-Française », on aurait dit qu’il était allé faire des fouilles archéologiques (rires).

DLODS : Vous vous êtes donc retrouvée dans la classe de Georges Chamarat ?

Oui, avec Michel Creton et Marlène Jobert. René Simon voulait que j’aille dans sa classe au Conservatoire. Je lui ai dit que ce n’était pas possible, après tout ce que Georges Chamarat avait fait pour me faire venir du Maroc. « Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Va avec Chamarat, tu le regretteras ». René Simon avait du pif, il sentait la personnalité des gens.

DLODS : A l’issu de vos études au Conservatoire, comment s’est déroulé le concours de sortie ?

En coulisses, j’entendais les journalistes pronostiquer que j’aurais un premier prix. Malheureusement tout ne s’est pas passé comme je l’espérais. Ce n’est pas pour me dédouaner, mais j’avais répété tout le temps une scène avec le même élève-comédien, qui en tant que « réplique » lors du concours doit se mettre en retrait pour vous donner l’avantage. Je devais rentrer côté jardin et le retrouver côté cour au bout de la scène, un peu sur ma gauche, pour que je me retrouve presque face public. Je commence la tirade de Bérénice : « Non, laissez-moi vous dis-je, etc. » j’entre comme une furie et je ne le vois pas. Il y a eu dans la salle des éclats de rire, car évidemment ne le trouvant pas où il devait être, je le cherchais partout. Il était au fond du plateau. Il n’a plus bougé, c’était foutu pour moi, je me suis retrouvée de dos tout le temps. Quand je suis sortie, j’ai senti deux bras qui m’étreignaient, c’était Fernand Ledoux « Ma petite tragédienne… » et Maurice Escande « Ce n’est pas grave, tu ne rentreras pas au Français mais tu travailleras ailleurs ». J’ai quand même eu trois premiers accessits.

DLODS : Pouvez-vous nous parler de vos premières expériences théâtrales à Paris ?

Après mon concours d’entrée au conservatoire je reçois un coup de fil de Jean Vilar. Pour moi c’était le top du top, mieux que la Comédie-Française, pour laquelle à part quelques comédiens qui faisaient du cinéma comme Louis Seigner, Georges Chamarat ou Annie Ducaux, je ne connaissais pas grand-monde, car quand j’allais en vacances à Paris en août elle était fermée.
Je vais voir Vilar qui me convoque en fin de matinée, il me dit « Ma fille Dominique est au conservatoire avec vous ». Je n’avais pas fait le rapprochement avec Dominique (que j’aimais bien), car elle était aussi blonde qu’il était brun, et avait des yeux bleus tandis que lui avait le type méditerranéen. Il me dit qu’il cherche une comédienne pour jouer le rôle d’Elise dans L’Avare. J’étais très émue, sollicitée pour jouer dans cette grande bâtisse où Gérard Philipe avait triomphé. Je lui donne mon accord, sous réserve d’avoir l’autorisation du Conservatoire.  Et là, en rentrant chez moi, ma mère m’annonce qu’on a essayé de me joindre pendant mon absence. C’était la Comédie-Française, qui me convoquait à une lecture. Je dis à l’administrateur que je ne peux pas, car Jean Vilar veut que je joue dans L’Avare. Il me répond « C’est bien mais vous ne pourrez pas le faire. Il faut une autorisation pour travailler à l’extérieur du Conservatoire et si vous êtes là aujourd’hui c’est que vous êtes distribuée dans la pièce « La fourmi dans le corps » de Jacques Audiberti. Les répétitions commencent incessamment sous peu et dans deux mois c’est la première. »
Donc j’ai abandonné Elise de L’Avare pour jouer une grenouille, avec le masque qui va avec. Et j’avais une intervention où j’étais les jambes de Nabuchodonosor. Quand je suis sortie de ma loge avec les deux jambes qui pendouillaient autour du cou, quelqu’un a dit « Ah merde, vous avez la tête à la place du sexe », j’étais dans un état pas possible. Dans la distribution, il y avait Georges Descrières, Berthe Bovy, Thérèse Marney et Hélène Perdrière.
Perdrière c’était un poème, elle arrivait toujours petite, menue, fragile dans son tailleur bleu ciel avec des bijoux somptueux autour du cou. Il y avait dans la pièce une comédienne qui était au conservatoire avec moi, qui faisait une autre partie du corps de Nabucchodonosor (rires), Jeanne Colletin, qui était une fille ravissante, élégante, très raffinée. Elle court vers Hélène Perdrière « -Ah qu’est-ce que vous êtes jolie ! Qu’est-ce que ce tailleur vous va bien ! Quelle merveille ! » et Perdrière lui répond «- Mon p’tit. C’est un petit solde de chez Dior. Je ne pourrais pas me permettre d’acheter autre chose que des soldes de chez Dior, avec les bijoux bien entendu. Vous devriez faire ça, c’est très important pour votre carrière »« -Ah oui ». On n’avait pas de quoi bouffer, et elle nous disait qu’il fallait faire les soldes de chez Dior (rires).

DLODS : Plus tard vous avez retrouvé quelques comédiens de la Comédie-Française dans des tournées en Afrique…

Oui, j’ai joué plusieurs classiques en tournée, comme Le Barbier de Seville, Volpone ou Le Misanthrope. Je me souviens très bien du Misanthrope, je m’étais liée d’amitié avec Jacques Ciron, délicieux camarade, avec qui je riais beaucoup. Il y avait souvent des choses très drôles qui étaient dites involontairement par des spectateurs dans les réceptions officielles d’après-spectacle et on s’en délectait. Je me souviens de cette dame « complimentant » Jacques Toja : « Vous avez fait preuve d’une grande élégance en jouant moins bien afin de ne pas faire de l’ombre à vos partenaires, qui eux ne sont pas de la Comédie-Française ». Il ne savait plus où se mettre (rires) !
  
DLODS : Vous avez également joué des pièces de divertissement, notamment aux côtés de Franck Fernandel.

Ca m’a fait beaucoup de peine d’apprendre sa disparition il y a six ans. Quel dommage, un type gentil, la crème des hommes, il vous aurait donné sa chemise. Il disait souvent «Mon père, ce radin », mais je crois que Fernandel n’était pas radin mais terriblement économe, il avait eu peur toute sa vie de manquer d’argent. Franck et moi avons joué dans la pièce Bienheureuse Anaïs, où Claude Bertrand (légende du doublage, voix de Roger Moore, ndlr) jouait un camionneur ; j’ai eu deux rôles. J’ai tout d’abord commencé par remplacer Catherine Rouvel qui partait en tournage huit jours avant la fin, je me suis donc coupé les cheveux pour uniquement huit représentations (rires). Puis à mon retour de vacances j’ai repris le rôle de Maryse Mejean.

Evelyn Selena et Franck Fernandel dans Bienheureuse Anaïs, extrait pour Discorama (1963)

DLODS : Au théâtre, à la télévision ou au cinéma, on vous a souvent fait jouer avec l’accent pied noir (Rodriguez au pays des merguez) ou celui du midi (films avec Fernandel père ou pièces avec le fils, et Le Rémouleur de Ventabren pour la télévision).

Je crois que je les ai vexés à un moment en répondant à une interview « On ne m’engage que pour des marseillaiseries ». Du coup, quand j’ai travaillé ensuite avec Fernandel il a dit « Non je ne veux pas de cette petite, elle s’imagine qu’elle prend l’accent du midi mais c’est l’accent pied noir qu’elle fait ». Et c’est le comédien Max Amyl qui a insisté, qui a lui a dit « -Fernand, allez la voir dans la pièce où joue votre fils en ce moment » « -Ah, c’est la petite qui a remplacé Catherine Rouvel et Maryse Méjean ? D’accord, mais tu la prends sous ta responsabilité ». Max m’a dit « Attention, tu prends l’accent ! Sinon il va être fâché  ».
J’ai donc tourné dans La cuisine au beurre (Gilles Grangier, 1963) avec Bourvil et Fernandel,  dans le film ils m’invitaient tous les deux au cinéma, je leur disais « Mais qu’est-ce que vous avez avec le cinéma en ce moment ? ».

DLODS : Fernandel avait la réputation de demander à être toujours filmé de face, en gros plan, au détriment des seconds rôles qui lui donnaient la réplique…

En effet, l’assistant est venu me chercher et m’a dit «- Tu fais la petite serveuse. Quand Fernandel te prend par les épaules, tu ne te retournes pas » «- Elle est où la caméra ? » « -Dans ton dos ». Finalement, Fernandel a dit « Attends, elle est mignonne la petite, on ne va pas la mettre de dos ». Et il m’a mise… de profil (rires). C’était ça ou rien, alors j’ai rien dit. C’était trognon.

Evelyn Selena, Bourvil et Fernandel dans La Cuisine au beurre (1963)

Ca s’est passé différemment sur le tournage d’Heureux qui comme Ulysse (Henri Colpi, 1970) où je jouais sa filleule. Là j’ai eu droit à un premier plan et j’étais mignonne, gironde. On devait tourner la dernière scène, je le recevais à déjeuner, j’avais cuisiné des farcis et comme ils sont arrivés en retard, les farcis étaient loupés, et j’étais en colère. Alors je disais à Fernandel « Raconte ce que tu veux, mais mes farcis ils sont ratés à cause de toi ». Et Rellys, qui jouait mon père, disait « Oh, elle mouline comme sa mère ». On se retrouve en bas de la maison au moment du départ, Fernandel, Rellys et moi, la caméra entre nous. Le chef opérateur vient, me prend par les épaules, me dit « Ne bouge pas » et il me met face caméra, obligeant Fernandel à se mettre de profil. Ca m’a un peu déstabilisée, et j’ai joué la scène différemment de ce que nous avions répété. Quand le tournage de la scène a été terminé, j’étais exsangue, je crois que si on m’avait poussée je serais tombée. Et je vois le chef op qui me fait un signe comme quoi c’était bon. C’était bon pour lui, mais était-ce bon pour le metteur en scène et Fernandel ? Il y a eu un silence. Et Fernandel a dit « Elle est bien, la petite. Tu l’as répétée tu étais en colère et là tu me l’as jouée boudeuse, et je me demande si ce n’est pas ça qui était le mieux ». J’ai entendu le « Ouf » de soulagement de tout le plateau (rires).

Donc Fernandel a été adorable, mais la femme du metteur en scène (Henri Colpi) beaucoup moins.
Elle était originaire d’Afrique du nord. Je lui demande son prénom, elle me répond «  Yasmina », que je trouvais magnifique, alors je lui dis « -Déjà vous dites le nom et on a l’impression de respirer le jasmin »« -C’est quoi ça ? »« -En arabe, Yasmina veut dire « jasmin » ». C’est la dernière chose que j’aurais dû dire, elle n’a pas apprécié du tout. Elle m’a dit « -Vous savez j’ai le pouvoir de couper vos scènes », « -Je vous en prie faites donc, ce n’est pas avec ça que je vais me faire remarquer, j’ai fait ce film pour Fernandel », « -Ca va vous coûter très cher ». Elle m’a laissé comme ça. Je n’avais pas la possibilité de parler à son mari. Vers 17h, je rencontre l’assistante de Fernandel qui était une femme de caractère avec un accent du midi qui roulait les « r ». « -Qu’est-ce qu’il y a petite, y a quelque chose qui ne tourne pas rond ?» « -Ca va », « -Non, raconte-moi… ». Alors je lui raconte. « -Mais de quoi je me mêle ? C’est le problème de Monsieur Fernand et pas elle »« -Je vous en prie ne dites rien. Mon rôle n’est pas suffisamment marquant pour que je réclame quoi que ce soit » « -Je vais quand même en parler à Monsieur Fernand car je n’aime pas qu’on se foute de lui comme ça. A sept heures moins le quart vous venez dans le hall et vous n’en bougez pas. Monsieur Fernand sera au courant et arrivera. »
Tous les jours avant de tourner Fernandel disait au chef cuisinier de l’hôtel « Alors ce soir tu me fais les sardines « à la queue en l’air » » ou « le merlan en colère ». Ce soir c’étaient les sardines.
Fernandel me voit, attend que la femme d’Henri Colpi arrive, et me dit « Petite viens t’asseoir ici », il me fait asseoir sur l’accoudoir de son fauteuil. Et il se met à bavarder, à parler de son fils comme si on était de vieux amis. L’autre elle avait la tronche qui s’allongeait, pas du tout heureuse, et puis au moment de passer à table il a dit « Petite, tu viens avec nous. Je ne te l’ai pas dit ce matin ? J’aurais dû». J’ai dîné à sa table et il n’a pas invité Colpi et sa femme. Quand le tournage s’est terminé je suis allée dire au revoir à Henri Colpi, je lui ai dit « Je regrette beaucoup ce qu’il s’est passé avec votre femme, je n’ai pas compris, je lui ai dit un compliment et elle l’a mal pris » alors il m’a répondu « Je ne me fais pas de soucis pour vous, vous avez su renverser la situation ». Ah bon ? Qu’est-ce que j’ai renversé ? Et je n’ai plus revu ni l’un ni l’autre, et Fernandel est décédé peu de temps après…

Evelyn Selena, Fernandel et Rellys dans Heureux qui comme Ulysse (1970)

DLODS : On vous retrouve à vos débuts dans un téléfilm, Cette nuit-là à Bethléem (1967) avec Michel Serrault et Roger Carel.

C’était un téléfilm sur la nativité. On a tourné ça à La Mer de Sable, le parc du comédien Jean Richard (qui était un homme très gentil et sensible), où il avait recueilli des animaux de cirque « à la retraite ». Il avait rapporté du sable et constitué des grandes dunes, qui n’étaient pas faciles à grimper.
C’était la nuit, en automne, et il faisait un froid glacial alors qu’on était habillé de bric et de broc et allongés sur le sable comme si on allait bronzer (rires). Mais le ciel était d’une pureté étonnante, on voyait les étoiles qui brillaient, c’était superbe, et on aurait vraiment dit la nuit de la nativité.

DLODS : Vous avez tourné le premier rôle féminin d’une jolie série, Jack (1975), d’après Alphonse Daudet.

Ce sont de très beaux souvenirs. On a tourné ça avec beaucoup d’amour, de conviction, de goût, dans la plus grande gentillesse de tous, techniciens  et comédiens. On a passé neuf mois ensemble, à traverser la France. Un jour le directeur de production a eu l’idée de financer un repas de Noël hors du tournage. J’avais trouvé ça formidable, et du coup on faisait ça à chaque fin de semaine de tournage, le vendredi soir on restait un soir de plus et on se faisait un grand banquet. Je disais au technicien « Tu achètes ce que tu veux et tu me donnes la note ». C’était très sympa.
Malheureusement, il y a eu le démantèlement de l’O.R.T.F. à ce moment-là, on devait passer sur la Deux et la directrice qui avait accompagné le projet a été mutée sur la Trois… et nous aussi. A l’époque la Trois n’était pas diffusée partout, et nous n’avions pas droit à la publicité, les journaux de programmes télé faisaient leur une sur les programmes de la Deux. Donc Les Gens de Mogador (dans laquelle jouaient quelques personnalités du spectacle, alors que nous n’étions pas connus) a eu droit à la première page, et nous la deuxième. Elle a été rediffusée bien plus tard, mais sur le câble.

DLODS : Dans la série, le rôle de votre fils, Jack était joué à trois âges différents et donc par trois comédiens, dont deux que vous avez retrouvé plus tard au doublage, William Coryn et Dominique Collignon-Maurin.

Dominique devait avoir dix-huit ans, c’était un personnage extraordinaire, sortant de toutes les conventions, par un froid de loup il dormait dans sa tente, et il arrivait nu dans sa couette. Je faisais la grimace au moment de lui faire la bise car il n’avait pas pris de douche. Le metteur en scène lui disait «- Je vais tourner une autre scène en attendant que tu prennes ta douche » « -Ah, je suis sûr que c’est Selena qui s’est plainte, hein, c’est toi Evelyn ! » « -Mais non, je n’ai rien dit,  je ne me suis plainte à personne, j’ai juste fait la grimace.» « -Petite bourgeoise de merde !» (rires). Et maintenant on s’adore.
Quant à William Coryn, il ne parlait pas beaucoup, mais il était adorable. A chaque fois, je le voyais dans un coin en train d’écrire, « -Mais qu’est-ce que tu fais ? On est tous dehors en train de prendre le soleil, à regarder la nature magnifique autour de nous et toi tu restes à l’intérieur… » « -J’écris des poèmes ». C’était trop mignon, et sa maman était adorable aussi.
Le troisième garçon, qui jouait le plus petit Jack, était plus long à la détente, moins à l’aise sur un tournage que William et Dominique. Quand je l’embrassais il restait raide comme une porte. Sa mère lui disait « Evelyn est très gentille, elle t’aime beaucoup, alors fais un effort, tu dois faire comme si c’était ta maman. »

Evelyn Selena et William Coryn dans Jack (1975)

DLODS : Pour la télévision, vous avez fait avec Francis Huster une lecture de la correspondance entre George Sand et Alfred de Musset.

Je reçois un coup de fil du producteur d’Aujourd’hui madame, « -Vous avez tourné « Jack », on m’a dit beaucoup de bien de vous. Connaissez-vous Musset ? » « -Oui, je suis rentrée au conservatoire avec des scènes des « Caprices de Marianne » et de « On ne badine pas avec l’amour » » « -Et George Sand ? » «-Oui, j’adore George Sand » « -On aimerait que vous lisiez ses lettres échangées avec Musset» « -Super, et qui fera Musset ? » « -Francis Huster ».  
J’avais déjà entendu des choses dites par Huster, qui m’avait choquées, on lui disait « -Vous êtes le nouveau Gérard Philipe. » et lui répondait « -Oui, mais je crois que je suis meilleur que lui, car ce que j’ai il ne l’avait pas. J’ai sa folie, sa jeunesse, il était primesautier, il volait dans les airs, mais il manquait de mystère et moi j’ai du mystère ». Il ne fallait pas toucher à Gérard Philipe. La rose que j’avais achetée pour sa mort je l’ai toujours, j’avais vingt ans à l’époque. Personne ne lui a dit de faire preuve d’humilité, de penser aux comédiens qui avaient joué la même pièce avant lui, et dont personne n’a eu à redire de leur travail.
Huster disait aussi qu’il recevait des sacs postaux de lettres d’amour d’un couvent. Vous connaissez des nonnes qui ont la télé, vous ? On lui passait tout. Il y a des gens qui attirent la sympathie, mais qui sont comme on appelle en Italie les maquilleurs, des « truccatore ». Une autre fois je prenais un café avec une amie au drugstore Matignon, et juste devant moi il donnait un cours à un comédien en lui disant « Ecoute, je n’ai aucun reproche à te faire, tu parles juste, mais je veux que tu dises « je t’aime » comme tu dis « je vais aller pisser » », il trouvait ça extraordinaire, et l’a répété plusieurs fois bien fort, pour que tout le monde en profite.

Evelyn Selena et Francis Huster, lecture de la correspondance Sand / Musset (1978)

Donc, pour en revenir à l’émission, je demande au producteur d’organiser une rencontre avec Huster pour que nous puissions répéter. Il me rappelle en me disant « -Monsieur Huster ne veut pas venir, car si Musset et Sand s’écrivent c’est qu’ils ne sont pas ensemble, chacun est dans son coin, lui est à Paris et vous à Marseille, par exemple. »  «  -Je veux bien le croire mais j’aimerais savoir quel style il va aborder, afin de ne pas être à côté. On ne parlait pas hier comme on parle aujourd’hui. »
Il a refusé, et nous n’avons pas répété. Et après la lecture, nous sommes interviewés tous les deux, lui parle pendant un moment de son actualité qui était évidemment riche en projets, et moi je raconte que je joue au Théâtre Lucernaire Punk et Punk et Colegram avec Gérard Hernandez et Sady Rebbot. Je précise que ça fait partie d’un recueil de pièces d’Arrabal qu’il a appelé son « théâtre-bouffe » (comme l‘opéra-bouffe), et là Huster me coupe en disant « Théâtre bouffe ? » en faisant semblant de manger. J’étais tétanisée devant tant de bêtise…

DLODS : On a parlé de théâtre, de cinéma et de télévision, mais vous avez fait aussi très tôt énormément de radio.

C’est magnifique la radio, vous pouvez être comme vous êtes, les gens vous imaginent comme ils veulent. J’avais une jolie voix -je peux le dire, maintenant que ce n’est plus le cas-, chargée d’émotion, et ça a plu aux gens. J’ai fait beaucoup de poétiques, mais j’ai lu aussi des romans à l’eau de rose. Une fois, la production a reçu un courrier « Si Evelyn a des problèmes, elle n’a qu’à venir, on prendra soin d’elle, on lui trouvera un mari et elle pourra avoir une vie heureuse », c’était trop mignon.
Il y avait aussi des lectures de romans -avec l’auteur sur le plateau- auxquels je ne comprenais rien du tout. Dans ces bouquins on ne dit pas « je t’aime », on tourne autour du pot pendant des heures avant de faire comprendre qu’on a des sentiments pour une personne. Soubeyran, la réalisateur, m’avait dit «- Pourquoi tu fais la gueule ? » « -Nous au Maroc, on y va direct. Là au bout de quinze pages, la fille elle se tire ! »(rires).

DLODS : Vous avez enregistré de nombreux épisodes des Maîtres du Mystère

Pierre Billard
C’est toujours grâce à Georges Chamarat, qui avait donné mon nom à Pierre Billard en lui disant que j’étais dans sa classe et qu’il fondait des espoirs sur moi. J’ai été appelée tout de suite, et je me suis retrouvée avec des gens comme Rosy Varte, Robert Marcy, etc. qui ont tous été adorables avec moi.
Il y avait un côté très artisanal qu’on ne retrouve plus aujourd’hui.





Suite de l'interview ici : Deuxième partie et Troisième partie.


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Evelyn Selena : Rencontre avec une drôle de dame (Partie 2/3)

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Deuxième partie de mon interview d'Evelyn Selena (Première partie ici et Troisième partie ici).

Dans l’ombre des studios : Comment en êtes-vous venue au doublage ?

Grâce au syndicat des acteurs, un directeur artistique m’avait convoqué à Technisonor sur les Champs Elysées car il cherchait une petite marocaine pour doubler un documentaire sur le jamboree, cette grande réunion mondiale des scouts. J’ai commencé à parler comme je vous parle maintenant et le directeur artistique m’a interrompu en me demandant de prendre l’accent « Vous ne pouvez pas parler comme on parle chez vous ? ». Je lui ai dit que j’étais marocaine mais pas arabe et que je ne savais pas prendre l’accent. Il s’est énervé, je me suis mise à pleurer et il est parti en claquant la porte. Je reste seule en me demandant s’il faut que je parte ou que je reste, et soudain j’entends derrière moi « Ne pleurez pas, mademoiselle, tout ce qu’il prend pour des défauts sont pour moi des qualités. Séchez vos larmes et donnez-moi votre nom et votre numéro de téléphone ». C’était Roland Ménard, la voix française de
Roland Ménard
(c) La Gazette du Doublage
Marcello Mastroianni. Il m’a encouragée, et c’est grâce à lui que j’ai fait du doublage. Il était comédien mais également directeur de plateau : il dirigeait à l’époque pour C.I.C., Les Films Jacques Willemetz, etc.
Quand j’étais appelée sur un film pour une ou deux phrases, ou cinq lignes, je demandais à rester parce qu’il y avait sur le plateau des gens comme Martine Sarcey, Nadine Alari, Jean Martinelli, Raymond Loyer, Jacqueline Ferrière, Claire Guibert, des sociétaires du Français, etc. et pour moi c’était un enchantement, je retrouvais les voix que j’avais mémorisées lorsque j’allais au cinéma en Afrique du nord, je ne connaissais pas leurs noms mais je reconnaissais leurs voix, c’était là dans un petit coin de ma tête. J’étais émerveillée de les retrouver en chair et en os et c’est comme ça que j’ai appris le métier, que j’ai vu les petits trucs, les ficelles qui permettaient d’être en place et de ne pas faire perdre trop de temps à un plateau. Qu’est-ce que je suis contente d’avoir connu ces gens-là, mon métier tout d’un coup a pris une autre couleur, je me disais « Merde, je suis à côté de ces types-là,  j’enregistre avec eux et ça ne les dérange pas, ils ne sont pas incommodés par mon jeu».

DLODS : Vous avez commencé à travailler dans le doublage au début des années 60 alors que vous étiez encore au Conservatoire. Ce n’était pas trop compliqué d’obtenir les autorisations pour travailler ?

C’était normalement interdit, mais Roger Ferdinand, qui dirigeait le Conservatoire à ce moment-là, m’avait plutôt à la bonne et me transmettait les convocations, il était presque devenu mon agent (rires).« Mademoiselle Selena vous êtes attendue à la radio avec Monsieur Pierre Billard pour « Les Maîtres du Mystère ». Il y a aussi Monsieur Elie Fabrikant qui vous a appelé pour un doublage  », et je partais.
Ca a intrigué un élève de ma classe. Il me demande un jour « -Pourquoi tu es convoquée chez le directeur ? » et je réponds, naïve « -Parce que je travaille. La radio appelle directement le directeur pour savoir s'il est possible qu’on me libère. Le doublage aussi »« -Ah bon, tu fais du doublage où ? » « -Au studio Francoeur. » «- Ah, c’est marrant, j’habite à côté, je pourrais y aller en pantoufles ». Le temps passe, et curieusement Elie Fabrikant ne m’appelle plus. Un jour, je le croise et je lui demande «-Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Je sais que je n’ai pas terminé le film que je devais faire ». Et il me dit « -Ecoutez mademoiselle, j’ai été très gentil avec vous, très patient, je vous ai prise avec bonheur, sans histoire, car vous étiez douée pour ça, mais je n’ai pas du tout apprécié que vous m’envoyiez quelqu’un de votre part » « -Mais je ne vous ai envoyé personne » « -Et ce jeune comédien qui m’a dit « Je viens de la part d’Evelyn Selena », c’est quoi ? » «- Je ne vous l’ai pas envoyé, je lui ai juste dit où je travaillais et avec qui » « -En tout cas c’est une bonne recrue, mais je n’ai pas du tout apprécié votre intervention ».

DLODS : A vos débuts, avez-vous été inspirée par des comédiens ou comédiennes en particulier ?

Jacqueline Ferrière
(c) La Gazette du Doublage
J’avais une immense admiration et une grande amitié pour deux couples, Jacqueline Ferrière et Raymond Loyer, et Paule Emanuèle et Jean-Claude Michel.
Jacqueline Ferrière, j’étais en admiration sur ce qu’elle faisait sur Ava Gardner, ça sortait merveilleusement, alors qu’il n’y avait aucune ressemblance possible, elle était aussi blonde qu’Ava Gardner était brune. Mais elles avaient la même stature.
C’étaient des gens qui faisaient bien leur métier, c’était propre, net, sans compromission, sans saleté autour. Je ne vois pas Jean-Claude appeler un studio et dire« Dites donc, vous doublez un film avec Sean Connery, c’est moi qui devrait le faire ». Jamais. Alors que d’autres l’auraient fait… et l’ont fait.
C’étaient des gens biens et irréprochables sur le plan professionnel. Quand Paule parlait de Jean-Claude, c’était mignon comme tout. Un jour, Jean-Claude et moi étions tous les deux à la barre et je lui ai dit « Qu’est-ce que je t’aime, toi alors » et il a fait « Ah bon… ». Je suis contente d’avoir pu lui dire de son vivant.
C’est comme Arlette Thomas, Nadine Alari ou Martine Sarcey, ces femmes étaient des merveilles. Martine, je l’avais perdue de vue depuis des années, j’avais même dit à une secrétaire de la S.O.F.I. qui engageait toujours la même comédienne pour doubler les femmes mûres «- Dis donc, quand tu as besoin de femmes âgées, tu n’as que celle-là à nous envoyer ? »« -Pourquoi, elle n’est pas bien ? »« -Ecoute je ne sais pas si tu as de l’oreille mais, c’est quand même pas très bon… Martine Sarcey et Nadine Alari, quand tu les convoques, elles ne sont pas payées à la ligne et négocient un gré à gré ? »« -Mais pas du tout. »« -Eh bien, pour le même prix tu auras ce qu’il se fait de mieux».

DLODS : Puisqu’on en parle, vous êtes très attentive aux voix et avez une très bonne mémoire des voix de vos camarades, c’est assez rare.

Quand vous faites de la musique vous êtes exercée à tout. A un moment je reconnaissais n’importe quelle voix, que j’associais à un physique (c’est fou le nombre de personnes qui pensaient que j’étais blonde avant de me rencontrer !), maintenant je ne connais pas les nouvelles voix, je trouve qu’elles se ressemblent toutes.
Avant on faisait attention à l’harmonie des voix entre elles sur des doublages. Les deux jeunes premiers devaient avoir de jolies voix, il fallait que ce soit harmonieux en général. Là maintenant vous êtes ici dans ma cuisine, vous écoutez la télé dans la pièce d’à côté, vous ne savez pas qui parle, si c’est le rôle principal, la copine, la voisine, etc.

DLODS : Le doublage actuel semble en effet plus « sobre » ou « aseptisé », moins théâtral qu'à une certaine époque.

Même des gens que je ne portais pas dans mon coeur car ils ne me portaient pas dans le leur, comme Pierre Trabaud, je leur trouvais un charme, quelque chose de bouleversant, d’émouvant.
Roger Carel, que j’adore, apportait de la poésie, de la vie, de l’humour. Quand il prêtait sa voix à son robot doré, Z6PO, dans Star Wars, c’était incroyable, j’avais envie d’adopter R2D2 rien que pour que Roger vienne lui faire des remarques avec sa voix (rires).
Christophe Lemoine
Chez les jeunes c’est plutôt ennuyeux, il n’y a pas grand monde pour prendre la relève, à part peut-être Christophe Lemoine, qui a une vraie personnalité et apporte beaucoup d’invention dans son jeu mais aussi dans sa vie. Quand il était beaucoup plus jeune et doublait les petits garçons, c’était la terreur des ingénieurs du son. Il s’asseyait à côté d’eux quand ils installaient leurs potentiomètres et il les bougeait : « -Qu’est-ce que t’as fait, là ? » « -J’ai rien fait ». Et il repartait comme si de rien n’était (rires).

DLODS : Quel type d’«emplois» aviez-vous à vos débuts au doublage ?

C’est drôle, mais tant que j’avais les cheveux longs avec des nattes je doublais les petites indiennes. Puis au théâtre on m’a demandé de les couper, j’ai coupé mes cheveux au niveau des épaules et j’ai commencé à doubler les petites jeunes filles américaines, puis je me suis coupé les cheveux encore plus courts. Vous aviez entendu parler des distributions de doublage « au physique », vous n’aviez pas entendu parler des distributions « à la coiffure », j’en suis sûre ? (rires).
J’ai donc commencé à doubler pour le cinéma des rôles de gentilles jeunes femmes, comme Jane Fonda. La première fois que je l’ai doublée, c’était dans Maison de poupée (1973) pour Richard Heinz. Richard Heinz (dirigeant du studio Lingua-Synchrone, ndlr) m’a donné des chances extraordinaires, il ne me connaissait pas du tout, il a simplement bavardé avec moi, m’a demandé si je savais prendre l’accent espagnol : « Oui, je viens de jouer une bonne espagnole dans une pièce de Dominique Nohain ». Quelques jours après il m’appelait pour doubler l’un des rôles principaux féminins (Karin Dor, rôle de Juanita de Cordoba) avec accent espagnol dans L’étau (1969) d’Alfred Hitchcock. J’étais bien entourée, quelle distribution !

DLODS : L’adaptation était d’Isabelle Kloucowsky…

Qui était à l’époque mon imprésario !

DLODS : Vous rappelez-vous si, à l’instar des autres acteurs français qui jouaient dans ce film (Claude Jade, Philippe Noiret, Michel Piccoli…) Dany Robin se doublait elle-même?

Richard Heinz
Oui, elle se doublait elle-même. Pour en revenir à Richard Heinz, il m’a peu de temps après donné à doubler dans Une bonne planque (1972) Sophia Loren, qui était belle comme le jour, d’une maladresse touchante. Un jour le film passe à la télévision, je vais au studio Mermoz (où étaient doublés dans un studio les grands films Lingua-Synchrone, et dans l’autre une partie des séries de la S.O.F.I., ndlr) et je rencontre Serge Sauvion qui me fait « -Ah je suis bien content de te voir, toi qui reconnais toutes les voix, est-ce que tu as vu le film hier avec Sophia Loren ? » « -Oui » « -Est-ce que tu peux me dire qui double Sophia Loren ?» « -Ah bon, tu n’as pas reconnu qui faisait sa voix? » « -Ah, c’était formidable, une spontanéité une fraîcheur… » « -Tant mieux, merci ! » « -Pourquoi tu me dis « merci » ? » « -Parce que c’était moi »  « -Génial ma cocotte, je ne t’avais pas reconnue ». C’est resté un signe, à partir du moment où on ne vous reconnaît pas, où on se demande qui c’est, c’est déjà gagné, vous êtes rentrée dans un autre personnage et vous ne faites pas toujours la même chose.
Richard m’a aussi donné un personnage difficile dans Ludwig ou le Crépuscule des Dieux (1972) de Visconti. Je doublais une espèce de comédienne, Lila Von Buliowski (jouée par Adriana Asti), complètement hystérique, venue pour se faire sauter. C’était très difficile car j’avais des pudeurs, et j’ai reçu des tas de compliments pour ce doublage. Il y avait une brochette de comédiens de théâtre extraordinaires, des gens de la Comédie-Française, c’étaient des cadors. William Sabatier était magnifique sur Trevor Howard (Wagner). Pour Romy Schneider il y a eu des tentatives avec plusieurs comédiennes, jusqu’à ce qu’elle vienne se doubler elle-même.

DLODS : Avez-vous souvenir d’autres rôles importants à cette époque-là ?

Oui, Le jour du fléau (1975) sur Karen Black, un doublage dirigé par Jean Lagache, et Airport (1970) sur Jacqueline Bisset.

DLODS : Vous parliez tout à l’heure de Sophia Loren. Dans les doublages de films italiens on retrouvait souvent la même équipe (Helena Manson, vous-même, etc.), est-ce que cela demandait une technique particulière ?

Ce n’était pas le même tempérament, la même manière de jouer que sur les films américains. Les comportements italiens sont beaucoup plus violents et extériorisés, méditerranéens. J’aimais beaucoup les doubler, ça correspondait à mon tempérament.
Il y a aussi une histoire de « familles » de studios : une bonne partie des doublages de films italiens se faisaient chez Jacques Willemetz ; Helena Manson qui n’était pas du tout méditerranéenne travaillait beaucoup pour lui, donc on la retrouvait forcément dans ces doublages-là.

DLODS : Puisqu’on parle de « familles », on vous a souvent retrouvée à l’époque dans les doublages de la S.N.D. (films Fox, dirigés par Michel Gast, Jenny Gerard et Jean Droze).

Oui mais au début chez eux je n’avais forcément des rôles intéressants. Dans les comédiennes d’à peu près mon âge Perrette Pradier et Michelle Bardollet étaient plutôt « installées », tout comme, un peu plus âgées, Arlette Thomas ou Claire Guibert. Ils étaient rassurés d’avoir des comédiennes comme elles, avec qui ils avaient beaucoup travaillé.
Dans Comment se débarrasser de son patron (1980) avec Perrette Pradier et Michelle Bardollet c’est moi qui faisais la nunuche (Jane Fonda), alors que dès que Jane Fonda jouait une grande amoureuse on donnait ça à Perrette Pradier.
A propos de Michelle Bardollet, elle m’a accueillie à mes débuts avec une certaine frilosité, mais ça s’est arrangé quand elle a vu que j’étais en admiration devant son travail. Elle avait tout compris du doublage, faisait ça les doigts dans le nez. Sur Barbra Streisand, c’était une réussite totale, une évidence.

DLODS : Dans les grandes doyennes qui travaillaient beaucoup à la S.N.D., je sais que vous aviez une tendresse particulière pour Lita Recio et Marie Francey…

Ah, Lita Recio. La voir doubler des perroquets est peut-être l’une des choses les plus ridicules que j’ai jamais vue dans ma vie, mais elle était incroyable, quelle personnalité. Elle entretenait un certain mystère sur son âge -Jean Droze disait « Oh ! Ne dis pas son âge, elle va tomber en poussière »- et restait très coquette. Un jour, j’entre en studio et la vois avec « Le Monde » dans les mains. C’est écrit tout petit, même avec une bonne vue vous avez besoin de lunettes. J’arrive et je lui dis « -Bonjour Lita » « -Bonjour », et elle ne se retourne pas pour me faire la bise. «- Ne fais pas semblant de lire Le Monde » « -Mais je ne fais pas semblant, ma grande.» « -Sans lunettes ? » « -Oui, parce que je me suis fait opérer ». Et je la vois un jour à Dubbing à l’heure du déjeuner, maquillée comme un camion volé, la coiffure bouclée, un joli tailleur «- Mais dis donc qu’est-ce que t’es belle » «-Ecoute chérie, je suis invitée à déjeuner par un monsieur. Il est loin d’avoir mon âge, mais c’est quand même un homme donc je dois lui faire honneur  » « -Tu as raison, tu es très belle ».

Marie Francey avait été une très belle femme, et elle était toujours rayonnante, maquillée : les yeux, les cils, le trait d’eye-liner, les pommettes…
Elle me téléphonait pendant des heures, parfois je la laissais parler pendant que je faisais ma vaisselle et quand je reprenais le téléphone elle parlait toujours (rires).

DLODS : Pour la S.N.D. vous avez doublé Carrie Fisher (Princesse Leïa) dans l’ancienne trilogie Star Wars. Quels souvenirs gardez-vous de ce doublage ?

C’était épique, le film hurlait dans tous les sens. Nous l’avons doublé, sous la direction alternée de Michel Gast et Jean Droze, dans un immense studio rue des Portes à Clignancourt, avec un ingénieur du son, Pierre Davanture, qui était un magicien. Il avait une petite console, on mettrait ça dans un film les gens diraient « Mais qu’est-ce que c’est que ce machin- là ?», une taille ridicule comparée aux grandes consoles pour l’enregistrement des musiques qu’on voit dans certains auditoriums à Dubbing Brothers, où les ingénieurs du son ont besoin d’un fauteuil à roulettes pour aller d’un bout à l’autre ; et pourtant, le son qui en sort n’est pas aussi fabuleux que celui de Pierre Davanture.

DLODS : Pensiez-vous au moment de doubler La Guerre des Etoiles (1977) que le film recevrait un tel succès ?

Non, pas du tout. Et pour tout vous dire, je n’aimais pas ça du tout, la science-fiction ne m’intéressait pas. Par contre j’ai aimé Le Retour du Jedi (1983), dans lequel il y avait ces petits bonhommes qui ressemblaient à des ours en peluche qui couinaient, j’ai trouvé qu’il y avait beaucoup de poésie dans ces petits personnages et ça m’a touchée. Ce que je n’aimais pas c’étaient ces grosses machines qui ressemblaient à des grosses araignées ou de grosses sauterelles, qui avançaient en faisant un bruit infernal. Je ne trouvais pas ça intéressant. Dark Vador me faisait peur, je n’aimais pas les personnages qui ne montraient pas leurs yeux, leur visage. Mais bon, je m’y suis faite (rires).

DLODS : Comment trouviez-vous Carrie Fisher ?

Je l’avais trouvée très marrante avec ses nattes en forme d’écouteurs de téléphone dans le premier film, elle était drôle, et dans le style qu’on attendait, un peu désuet. Ensuite elle est devenue plus coquette, plus mignonne, moins « standardiste ». J’ai aimé Le Retour du Jedi, j’ai trouvé qu’il y avait de l’imagination, un délire romantique.

La Guerre des Etoiles (1977) avec les voix de Pierre Hatet (Général Motti), Evelyn Selena (Leïa) 
et Henri Virlojeux (Grand Moff Tarkin)

DLODS : Pourquoi ne l’avez-vous pas doublée récemment dans les épisodes VII et VIII ?

On m’a téléphoné pour me demander si j’avais déjà doublé Carrie Fisher. J’ai dit oui, plusieurs fois, dans la trilogie Star Wars et pour certains téléfilms à la S.O.F.I ou chez Steimer (Jean-Pierre Steimer, gérant de Synchro Mondiale / Synchro Vidéo, ndlr).  « Il y a plusieurs années qui se sont écoulées, il faut que tu viennes faire des essais. ». Leïa n’avait presque aucun dialogue dans le film, et on me demandait de me déplacer pour passer des essais sur un personnage aussi peu loquace. Je leur ai dit que je ne voulais pas faire des essais. Ma voix a changé, tout comme celle de Carrie Fisher, mais mon jeu n’a pas changé, et je crois même au contraire qu’il s’est amélioré. Comme j’ai refusé de passer les essais, j’ai été remplacée par Béatrice Delfe. Mais si j’avais passé l’essai, ils m’auraient certainement évincée dans tous les cas, comme ils ont apparemment écarté Dominique Collignon-Maurin (Luke Skywalker) sur le suivant. Tous les gens de Dubbing Brothers s’arrachent les cheveux à cause de Disney. 

DLODS : Si je vous dis : « J’avais une ferme en Afrique… »

« I had a farm in Africa… » (rires). C’est un très grand souvenir. Je ne sais pas combien d’essais j’ai passés avant de doubler Meryl Streep dans Out of Africa (1985). La directrice de plateau, Jacqueline Porel, ne donnait pas au client le nom des acteurs qui passaient les essais, on était numérotés. J’ai d’abord été numérotée quatre, puis, cinq, etc. et à chaque tour d’auditions c’est moi qui était choisie. Jusqu’au jour où ils se sont fixés en disant « C’est embêtant parce qu’à chaque fois c’est elle qui sort, donc il n’y a pas de doute, mais on ne  la connaît pas, qui est cette fille ? ». Jacqueline leur a expliqué que j’avais fait le conservatoire, joué à la Comédie Française, etc. et elle leur a dit  « Je vais faire le film avec elle, mais si le résultat ne vous plaît pas je vous promets que nous le referons gratuitement avec la comédienne de votre choix. »

DLODS : C’était très classe…

Jacqueline Porel
C’était classe, généreux, preuve d’une grande confiance en moi et en elle… et ça m’a fichu la pression (rires), je n’ai pas dormi les deux ou trois nuits qui ont précédé le premier jour des enregistrements.
J’arrive le matin, je savais qu’il y aurait Claude Giraud donc j’étais en confiance car on s’entendait merveilleusement bien. Il y avait un monsieur qui était là, très british, bien habillé, cheveux gominés, etc. qui me suivait du coin de l’œil, et ça m’impressionnait car je ne savais pas qui c’était. On enregistre la première scène, on écoute, Jacqueline me donne ses indications, ses directives, et à un moment donné la technique nous lâche et je prends pour plaisanter un accent en disant « Je me demande ce que je suis venue faire dans cette histoire ». Et là le monsieur s’anime soudain et me dit « Vous avez pris un accent, vous pouvez le refaire en faisant un essai sur une boucle ? ». Jacqueline était complètement dépassée. Je fais un essai avec ce petit accent. « Vous pouvez le tenir tout au long du  film sans le pousser ou le rétracter ?». Je ne savais pas quoi répondre, je marchais sur la pointe des pieds, car je voyais Jacqueline qui se mangeait les joues, c’était mauvais signe (rires).
Ce monsieur, qui était en fait Philippe Bacon, représentant français d’U.I.P. (Universal-Paramount), a assisté à deux ou trois boucles –notamment la scène où Karen arrive en Afrique et où elle rencontre Finch Hatton au moment de l’arrêt du train-, il m’a dit « Continuez comme ça » et il est parti.
Pendant tout le doublage, le téléphone n’arrêtait pas de sonner, Sydney Pollack appelait Jacqueline, il lui disait beaucoup de choses sur moi qui ne m’ont pas été dites. Le dernier jour on enregistrait toutes les voix-off « I had a farm in Africa, etc. » et moi je venais de perdre un grand ami qui venait de mourir, j’étais en larmes au moment où on enterre Finch Hatton et que Karen fait son discours. Jacqueline me dit, « J’ai reçu un coup de fil de Sydney Pollack il est ravi de ton travail, il y a juste la fin où tu sanglotes alors qu’elle verse une larme à droite, une larme à gauche. C’est un peu trop, c’est une femme qui arrivait à dominer ses émotions », on a refait la scène et Jacqueline m’a dit qu’elle mélangerait les deux prises car il y avait dans la première des choses d’une émotion spontanée qu’on ne pouvait pas retrouver dans la seconde.

Out of Africa (1985) avec la voix d'Evelyn Selena (Meryl Streep)

Peu de temps après je reçois un coup de téléphone de Philippe Bacon « J’ai vu le film, je suis émerveillé par votre travail. Si vous voulez voir le résultat avant que le film ne sorte, je peux organiser une projection dans nos locaux ».
Je suis allée assister à cette projection privée avec une amie qui s’intéressait à mon travail. La projection commence, « J’avais une ferme en Afrique, etc. » et à un moment mon amie me demande «- Quand est-ce que tu parles ? » « -Ca fait depuis quinze minutes qu’on entend ma voix !» « - Quoi ? C’est toi qui fait la vieille ? » (rires).
Et en sortant de là, Philippe Bacon me dit : « J’en ai parlé à Sydney Pollack qui était tellement content qu’il m’a dit « vous direz à la comédienne qui double Meryl Streep que s’il existait des oscars du doublage je serais heureux de le lui en remettre un en mains propres » ».  C’est l’un des plus beaux compliments que j’ai reçus dans ma vie. Chaque fois que je vois le film, je ne rougis pas de mon travail.

DLODS : Nous avons reconnu la plupart des voix de ce doublage, par contre je me demande par qui étaient doublés les comédiens de couleur ?

Certains se doublaient eux-mêmes, c’était le cas du comédien qui jouait le rôle de Farah (Malick Bowens).

DLODS : Même si vous avez continué à la doubler en parallèle dans d’autres films, Meryl Streep a assez rapidement eu une nouvelle voix : Frédérique Tirmont.

Oui, je pense que le changement s’est fait à une période où je ne travaillais plus pour P.M./L’Européenne de Doublage. Frédérique a doublé Meryl Streep dans La mort vous va si bien (1992), puis elle s’est mise à doubler la plupart des actrices que je double : Jaclyn Smith, Helen Mirren, etc.
Parfois pour ne pas me prendre on disait « On a pris unetelle car tu comprends, il lui arrive ça dans sa vie en ce moment, etc. ». C’était d’une grande hypocrisie. Je suis passée dans cette profession pour quelqu’un qui n’avait pas de problème ni matériel ni psychologique tout ça parce que je laissais mes problèmes personnels hors du studio. Je n’avais pas à imposer ça à des gens qui ne connaissent rien de moi. Comme ça embêtait tout le monde que je ne dévoile rien de ma vie privée, ils inventaient.

DLODS : Certains directeurs artistiques vous ont de nouveau distribué sur Meryl Streep ces dernières années…

Je l’ai doublée dans Confidences (à ma psy) (2005), qui n’était pas un film réussi. Ma voix commençait déjà à faire des siennes, mais Béatrice Delfe m’avait dit qu’elle tenait à ce que je le fasse, car comme elle avait été l’assistante de Jacqueline sur Out of Africa, elle me considérait comme la seule voix de Meryl Streep. Plus tard, elle a pris Frédérique Tirmont pour doubler Meryl Streep sur un autre film, je lui ai dit « -Alors, je ne suis plus la seule Meryl Streep pour toi ? » «- Tu as vu Meryl Streep ? Elle a fait un lifting. » « -Donc quand on fait un lifting, la voix aussi rajeunit ? Il faudra que je lui demande le nom de son chirurgien !».
En raison de problèmes de santé, ma voix a certes changé, et je suis fatiguée par ce métier, mais la flamme est toujours là, alors que d’autres comédiennes sont comme des arbres morts dont il ne reste plus que l’écorce.

Meryl Streep en rabbin dans
Angels in America (2003)
Meryl Streep, je l’ai aussi doublée dans une série formidable, Angels in America (2003). Emmanuel Jacomy m’avait convoquée en essayant de me faire croire qu’il me considérait comme la seule voix possible de Meryl Streep, je ne comprenais pas, surtout que c’était fait à Dubbing Brothers où on me remplaçait systématiquement. En arrivant sur le plateau j’ai compris pourquoi : Emma Thompson jouait dans la série et était doublée par Frédérique Tirmont, et évidemment Frédérique ne pouvait pas doubler les deux.
Mery Streep était extraordinaire dans cette série, elle jouait plusieurs rôles dont un rabbin de quatre-vingt-cinq ans, avec l’accent yiddish, je me suis régalée et Emmanuel Jacomy m’a dit qu’il avait été soufflé par mon travail, lui qui m’avait connue sur les Docteur Quinn.

DLODS : Jacqueline Porel vous a confié plus tard une autre grande actrice : Glenn Close. Aviez-vous passé des essais ?

Oui, j’ai passé des essais. J’ai d’ailleurs passé des essais pendant toute ma carrière, on ne m’a jamais déroulé le tapis rouge. Je l’ai d’abord doublée dans Liaison fatale (1987) avec Patrick Floersheim (Michael Douglas). Juste avant que vous arriviez, j’entendais une alerte enlèvement à la télévision, avec la voix de Patrick. Ca m’a émue, j’ai trouvé étonnant qu’ils n’aient pas remplacé sa voix après son décès.

DLODS : Dans Les Liaisons Dangereuses (1988), en tant que spectateur j’ai trouvé le choix de voix pour John Malkovich assez déroutant.

Personne ne sait ce qu’il s’est passé dans la tête de Jacqueline, peut-être a-t-elle été sensible au charme de ce comédien ? Pour Malkovich, tout Paris avait passé les essais sauf Edgar Givry, qui aurait sûrement été bien sur ce rôle, et Guy Chapelier. Guy m’avait appelé en larmes tout un après-midi pour me demander de convaincre Jacqueline de lui faire passer un essai. C’est vrai qu’il m’arrivait de dire à Jacqueline « As-tu pensé à untel pour doubler tel acteur ? » mais ça venait spontanément. J’ai parlé de Guy à Jacqueline, qui a refusé.


Les Liaisons Dangereuses (1988) avec les voix d'Evelyn Selena (Glenn Close) 
et Isabelle Ganz (Uma Thurman)

DLODS : Quelques années plus tard, vous avez doublé de nouveau le rôle de la Marquise de Merteuil, mais cette fois-ci dans Valmont (1986) de Milos Forman, sur l’actrice Annette Bening, était-ce une coïncidence ?

Je ne me souviens plus si j’avais doublé Annette Beining avant, je pense que c’était la première fois. C’était encore dirigé par Jacqueline. Plus tard je l’ai doublée chez Gérard Cohen dans Bugsy (1991).

DSODS : Jacqueline Porel a également eu l’idée de vous distribuer sur Jessica Lange dans Tootsie(1982).

C’étaient mes débuts avec Jacqueline. Elle m’a d’abord dirigée sur Jessica Lange dans Que le spectacle commence (1979) où elle jouait la mort avec une voix très douce, rassurante, presque lénifiante. Puis Jacqueline m’a de nouveau fait passer des essais dans Tootsie(1982). Elle m’a dit « Ta voix va très bien dessus car elle est un peu nunuche, et quand elle se mettra en colère ça ira très bien aussi ».

DLODS : Dustin Hoffman a eu beaucoup de mal en France à trouver une voix « régulière ». Dans Tootsie, il était doublé par Jean-Pierre Cassel…

Jean-Pierre Cassel
Jacqueline avait pensé à Jean-Pierre Cassel qu’elle aimait beaucoup ; peut-être qu’elle voulait aussi faire plaisir au client en lui offrant une star. Elle lui a fait passer des essais, et Cassel arrivait à prendre une voix de tête sans que ça fasse homo, alors que les autres jouaient les homos, ce qui n’était pas utile.
Comme on dit en Afrique du Nord, il avait une « petite tête » (il n’avait pas la grosse tête), il était délicieux, charmant, humble devant son métier. Quand je me trompais, je me mettais dans un état pas possible, me confondais en excuses et il me disait « Il ne faut pas s’énerver, on refait et c’est tout. » n’importe qui d’autre aurait dit « Bon, c’est fini, maintenant chacun sa piste. »
On déjeunait ensemble dans une gargote pourrie, proche de la S.P.S., car dans le quartier il fallait aller loin avant de trouver un resto digne de ce nom. Ca ne le dérangeait pas et il était adorable, il nous parlait de son fils Vincent…

Tootsie (1982) avec les voix d'Evelyn Selena (Jessica Lange) 
et Jean-Pierre Cassel (Dustin Hoffman)

DLODS : Vous avez également doublé la grande Helen Mirren…

La toute première fois que je l’ai doublée c’était dans Excalibur (1981) pour Jenny Gerard et Michel Gast, puis dans Soleil de nuit (1985) pour Jacqueline Porel, et ainsi de suite.

DLODS : Vous souvenez-vous du doublage de The Queen (2006), film pour lequel elle a reçu un Oscar ?

C’était Béatrice Delfe qui dirigeait, j’ai enregistré le rôle pratiquement seule, à part quelques scènes avec un sociétaire de la Comédie-Française. Je me rappelle que j’avais été ravie du rythme donné pour le texte au moment de la bande-annonce, et au moment de doubler le film, je n’ai pas compris car les phrases avaient été modifiées et je me suis heurtée à un texte beaucoup trop chargé. Alors qu’elle est très calme à l’image, prend son temps pour parler, fait des respirations entre les mots, le débit que je devais employer relevait plutôt de la mitraillette. L’adaptateur, Jean-Pierre Carasso, qui écrivait d’habitude divinement bien, avait mis beaucoup trop de mots sur la bande rythmo.

DLODS : Ce genre de mésaventures a dû vous arriver plusieurs fois ?

Oui, dans Murphy Brown (où je doublais Candice Bergen), par exemple, le texte était extrêmement chargé. Je ne suis pas bilingue, mais j’entends ce que je devrais dire ou pas. Il y a un instinct qui vous pousse. On sait qu’il faut trois mots français pour dire un mot en anglais, là j’arrivais à en caser un et demi, mais ce n’était pas facile. Un qui m’impressionne toujours c’est Patrick Poivey, jamais je n’arriverai pas à parler aussi lentement, il vous fait tout passer avec une espèce de certitude, c’est magnifique. C’est Jean Gabin physiquement et vocalement.

Cela m’est également arrivé il y a quelques temps sur une série allemande : je dis au directeur artistique «-Ce n’est pas possible, regarde l’image et écoute mon débit, tu vas voir que je parle à toute vitesse, alors qu’à l’image elle est calme, elle parle doucement, elle s’énerve rarement. Ce n’est pas possible de susurrer avec ce débit-là. ». Le directeur artistique était embêté, j’ai regardé une fois la boucle à blanc, sans le son de la V.O., avec juste le texte et l’image, j’ai dit « On y va ! » et j’ai refait la séquence entière sans me tromper en arrangeant le texte au fur et à mesure. Tout était en place, et dans le bon rythme, détendu. Quand j’ai fini, le directeur artistique me fait un compliment, et demande quelque chose à sa collaboratrice qui descend avec des papiers. Etonnée, je lui demande :« -Qu’est-ce que tu fais ? » «-Comme tu as enlevé des mots, j’ai corrigé le script et recalculé le lignage ». Il avait revu le lignage à la baisse ! J’étais effondrée : « Salaud, vu le travail que j’ai fait, tu aurais dû au contraire m’en compter plus ! »(rires).

DLODS : Vous avez aussi eu la chance de prêter votre voix à Ingrid Bergman dans le redoublage de Casablanca(1942).

Il y avait eu un premier doublage après la guerre, mais il était très abîmé, la conservation des films doublés n’était pas aussi bonne que maintenant. Il manquait des scènes, des tas de trucs, et j’ai été très surprise et heureuse d’être appelée pour doubler ça, et félicitée après coup. C’était chez Steimer, à mes débuts où je ne faisais pas beaucoup de grands rôles. Je ne me souviens plus qui dirigeait ; ce n’était certainement pas Jacques Thébault, comme il doublait Humphrey Bogart.

DLODS : On parlait tout à l’heure de cinéma italien, vous avez également doublé des actrices espagnoles comme Marisa Paredes (Huma Rojo) dans Tout sur ma mère (1999) de Pedro Almodovar….

Marisa Paredes
Le jour où je passe les essais, Jean-Marc Pannetier, qui dirigeait ce doublage, me dit être inquiet. Il n’avait pas trouvé « la » voix pour Agrado. J’ai proposé Catherine Sola, qu’il ne connaissait pas.
Catherine, qui est décédée depuis, était une très belle fille d’origine espagnole, avec de grands yeux verts. Quand on l’entendait on ne savait pas si c’était un homme ou une femme. J’aimais beaucoup cette fille, je trouvais qu’elle avait un naturel, une émotion réelle, elle me donnait des frissons dans des scènes émouvantes. Elle a été choisie par Jean-Marc, et dans ce rôle elle a été étonnante : il s’agit d’un homme qui subit toutes ces opérations pour devenir une femme et qui est finalement reconnu comme rien du tout, personne n’en veut, ni les hommes ni les femmes, une vie de chiotte. Catherine a été très touchée par ça, et a mis ce qu’elle ressentait, elle était formidable.

Suite de l'interview ici (Troisième partie).

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Evelyn Selena : Rencontre avec une drôle de dame (Partie 3/3)

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Troisième partie de mon interview d'Evelyn Selena (Première partie ici et Deuxième partie ici).


Dans l'ombre des studios : Au doublage, on vous a aussi souvent retrouvée sur des grands rôles de séries, principalement pour un studio bien connu des voxophiles, qui s’appelait la S.O.F.I…

J’ai rencontré par hasard Pierre Salva (patron de la S.O.F.I., père de Michel Salva qui a ensuite pris sa succession, ndlr) dans un café, il m’a demandé « Comment ça se fait que vous soyez là tous les soirs ? », il a dû penser que j’étais une entraîneuse (rires). Je lui réponds « Parce que je travaille en face, je joue au théâtre ». Il m’a alors dit qu’il cherchait des voix nouvelles et j’ai commencé à vraiment travailler au doublage grâce à la S.O.F.I. On me donnait de petits rôles à chaque fois différents, pour voir comment je réagissais. Certains comédiens ont joué le même rôle toute leur vie au doublage, on leur a donné une profession, « Si c’est un médecin légiste, on va prendre René Beriard » (rires). Ca n’a pas été mon cas.  J’avais une voix tellement claire, fraîche, il me mettait sur des personnages parfois un peu trop lourds pour moi, je m’en accommodais en essayant de baisser un peu ma voix, mais je n’atteignais pas les graves que je voulais à l’époque. C’est comme ça que j’ai commencé à gravir les échelons dans le monde de la série.

DLODS : Plus tard pour la S.O.F.I., vous avez doublé Jaclyn Smith (Kelly) dans la série Drôles de Dames.

C’était très sympa, un beau souvenir. Le jour des essais j’étais aphone, pas un son ne sortait de ma gorge, j’ai téléphoné au bureau avec le peu de voix que j’avais, on m’a dit « Viens quand même ». En arrivant, quand Michel Salva m’a vue dans cet état-là, il m’a dispensée d’essais et j’ai été acceptée de suite. Perrette et Béatrice ont passé les essais, et le client (Jacqueline Joubert) a mis un moment avant de décider qui doublerait qui. Le choix est finalement devenu celui que vous connaissez aujourd’hui, et heureusement car quand vous entendez Béatrice sur Farah Fawcett, c’est une telle réussite… Quand ça passe à la télévision, je réécoute, je trouve qu’il y a un peps extraordinaire, nous sommes toutes sur le coup, il y a une joie de vivre qui ressort de ces enregistrements et qu’on ne retrouve plus nulle part.

Evelyn Selena, Perrette Pradier, Béatrice Delfe, Jean Berger, Philippe Dumat 
et d'autres comédiens sur le doublage de Drôles de Dames (1977)

DLODS : Qui dirigeait la série ?

Pierre et Michel Salva et Jacques Torrens au début. Puis à partir de 1985, toute une vague de comédiens devenus directeurs artistiques à la S.O.F.I.: Francis Lax, Gérard Dessalles, Philippe Ogouz, Maurice Sarfati, Bernard Tiphaine, etc.

DLODS : Avez-vous gardé des liens proches avec ces « drôles de dames » ?

Je travaille de temps en temps avec Béatrice Delfe, qui est restée une amie. A ses débuts, c’était un exemple de droiture, d’exigence, de courage. Elle était plus jeune que moi, mais elle osait faire des choses auxquelles je ne pensais même pas.

Perrette Pradier n’est plus là. A l’époque, c’était elle la star dans tous les studios : chez Michel Salva (S.O.F.I.), Michel Gast, Jenny Gerard et Jean Droze (S.N.D./P.M./L’Européenne de Doublage), Gérard Cohen (Record Films), etc. Elle travaillait comme une folle, arrivait souvent en premier choix, Béatrice en deuxième et moi en troisième.

DLODS : Dans Drôles de Dames, il y avait aussi Philippe Dumat (Bosley)…

Je l’ai d’abord connu en jouant à ses côtés dans une pièce de Dominique Nohain, il jouait un inspecteur de police. On s’était retrouvé à Villefranche-sur-mer, sur le port, on faisait des photos ensemble. Lui et moi avons immédiatement sympathisé. J’aimais son humour, sa tournure d’esprit, son talent pour raconter des histoires débiles pour le plaisir de nous faire mourir de rire. C’était vraiment quelqu’un de bien. On a énormément travaillé ensemble, il avait une bouche en caoutchouc mousse, il arrivait à « remplir » quand il manquait des mots sur la rythmo.
Dans Docteur Quinn, femme médecin où je doublais Jane Seymour, lorsque Michel Gudin a arrêté de doubler Orson Bean (Loren) et a été remplacé par Raymond Baillet, j’ai été ravie que Philippe prenne le relais (à partir du début de la troisième saison, ndlr).

DLODS : Parmi les personnages célèbres que vous avez doublés, Sue Ellen (Linda Gray) dans Dallas. Quels souvenirs gardez-vous de ce doublage ?

Linda Gray (Sue Ellen)
Au début c’était très sérieux, on se réunissait tous les quinze jours dans le café du trottoir d’en face, rue Mermoz. Michel Salva, qui dirigeait la série, disait « J’ai regardé ce qu’on a fait hier. Dominique, je n’ai rien à te dire, tu es dedans, formidable. Philippe, fais attention, Bobby c’est pas un faux-cul, c’est quelqu’un qui est droit, c’est le contraire de son frère. » Donc il donnait des indications à tout le monde. Arrive mon tour « -Toi, tu vas arrêter de pleurer » «-Oui, mais elle pleure tout le temps », « -Tu laisses l’image. Tu as une émotion, tu as un sanglot, mais je ne veux pas entendre de larmes dans ta voix ». Il avait raison.
Après c’est allé à vau-l’eau car il a laissé la direction à des comédiens pas prêts ni formés à diriger. Chacun faisait à sa façon, pas toujours dans la bonne direction.

DLODS : Le suivi des voix dans les doublages réalisés à la S.O.F.I. était très aléatoire, on s’en rend compte notamment sur des dessins animés, avec des personnages réguliers parfois doublés par trois ou quatre comédiens différents.

C’étaient les secrétaires de la S.O.F.I. qui établissaient les distributions pour les rôles secondaires, sans qu’il y ait aucun suivi. Parfois une secrétaire me demandait « Evelyn, il y a un personnage qui revient, gros, moustachu, par qui il était doublé ? », j’étais devenue l’encyclopédie du doublage de Dallas(rires).
William Sabatier doublait dans Dallas Howard Keel, un acteur que j’adorais pour l’avoir vu dans des films hawaïens (au Maroc on nous passait tous les films hawaïens, avec des comédiennes maquillées comme des camions volés, et des fleurs sur la tête comme Hedy Lamarr, ça nous faisait rêver). Puis dans la série le personnage joué par Howard Keel disparaît, et ils prévoient de mettre William Sabatier sur un autre Howard, Howard Duff, avec les cheveux grisonnants alors que Howard Keel avait les cheveux blanc. J’ai posé la question mais personne ne s'était rendu compte de rien, ils n’ont pas la mémoire des visages, ni l’oreille musicale.

Par ailleurs, sur les plans de travail il y avait les noms des récurrents, et parfois sur certains rôles c’était noté « Michel Salva », ce qui voulait dire « Débrouillez-vous sur le plateau ». Alors quand il y avait Francis Lax sur le plateau, il le faisait en disant que personne n’allait le reconnaître. Je lui disais « Tu rigoles ? Tu fais tout pour qu’on te reconnaisse, avec ton « n’est-ce pas ? » que tu cases tout le temps. Il sert à quoi ce « n’est-ce pas » ? »« -Ca sert ! » (rires).

DLODS : Pourquoi les directeurs de plateau n’étaient-ils pas plus impliqués ?

C’est lié à la création de la Cinq en 1985. Il y a eu un afflux énorme de nouvelles séries en France, et le travail est devenu gigantesque pour les studios de doublage: on travaillait le dimanche, le soir jusqu’à minuit, les jours fériés, etc. et on manquait de comédiens et de directeurs artistiques. Du coup, il y a eu toute une vague de ringards qui a commencé à travailler à ce moment-là (on prenait n’importe qui, même des maîtres-nageurs, profs de sport, etc.), et de nombreux comédiens (comme Philippe Ogouz, Jean-Claude Montalban, Pierre Trabaud, etc.) sont devenus directeurs de plateau à la S.O.F.I. Certains sont restés sympas, comme Francis Lax, et d’autres ont pris la grosse tête.

Une fois, dans un téléfilm ou je doublais Jaclyn Smith qui arrive comme ambassadrice dans un pays de l’Est, Dominique Paturel devait me dire « Je m’appelle Mike Slade, je suis votre subordonné, si vous avez besoin de quoi que ce soit je suis là. Entre nous, mes amis m’appellent Mike ». Pour le remettre à sa place, lui faire comprendre que je n’étais pas son ami, je devais lui répondre « -Très bien, bonsoir Monsieur Slade ». Et le chef de plateau voulait que je dise « Bonsoir, Monsieur Mike », ce qui ne voulait rien dire (on ne dit pas « Madame Evelyn »), et changeait complètement le sens. Je lui ai dit que je refusais de le faire, car on m’aurait fait revenir pour un retake qui m’aurait coûté de l’argent en déplacement, alors que lui aurait été sur un autre plateau pendant ce temps-là en train de gagner de l’argent. Il s’est mis en colère « Toi, l’étrangère, va faire du doublage à Tombouctou et fiche-moi la paix!».

Une autre fois, ce chef de plateau a dit à Bernard Lescrauwaet, ingénieur du son aux auditoriums de Mermoz qui avait une oreille musicale étonnante et des doigts de fée : « Voilà ce qu’on va faire aujourd’hui, tu passes la boucle une fois, on enregistre et on ne réécoute pas ». Bernard, qui était très zen, est devenu écarlate, il n’a pas répondu. « -T’as entendu, je te parle » « -Je m’en vais » « -Pourquoi ? » « -Jusqu’à maintenant j’ai essayé de faire du bon travail, j’ai eu des grands metteurs en scène sur le plateau, des grands réalisateurs français, personne ne m’a demandé une connerie pareille, ce n’est pas maintenant avec toi que je vais commencer à faire de la merde, alors je me tire ».

Un autre de ces directeurs artistiques (qui était venu nous « expliquer nos personnages » sur Drôles de Dames alors que ça faisait cinq ans qu’on doublait la série) a eu une fois, sur un film allemand, plus de retakes que de lignage.

DLODS : Pour en revenir à Dallas, c’était une série tellement populaire, que vous avez parfois reçu du public des réactions assez… inattendues.

On m’a dit un jour, en me jugeant de la tête au pied « Je peux vous poser une question, Madame ? Quand on est mariée à un homme comme J.R. qui vous donne tout ce que vous voulez, vous croyez que c’est bien de le tromper ? ». Une autre fois : « Madame, quand on a un petit enfant, on ne le laisse pas tout seul dans son lit. Ce n’est pas un jardin que vous avez, c’est un parc. Les chevaux ils sont dehors, ça oui. Mais votre bébé, jamais il ne voit le jour. »
C’était vrai car on ne voyait jamais cet enfant dehors, ni même à table pour l’apéritif, dans son landau.
Un jour je vais chez une copine qui tenait une boutique de vêtements. Elle me demande « -Alors, tu viens de Dallas, qu’est-ce qu’il se passe ? » «- Alors là ça tourne à la rigolade » « -Ah bon pourquoi ? » « -Parce qu’elle s’est tapée le père et maintenant il y a le fils qui est là, il est amoureux d’elle, malheureusement il a eu un accident d’avion alors il roule dans une petite charrette ». J’étais morte de rire, et une cliente me dit avec la gorge nouée « Je ne vois pas ce qui vous fait rire, Madame, franchement. » Je regarde ma copine en me demandant ce que j’ai dit de mal. La femme se met à pleurer. « Mon gendre c’est ce qui lui est arrivé. Et la belle-mère, ça ne l’a pas empêché d’avoir le cancer du sein. »
Les gens s’identifiaient à tout ça, à la famille Ewing et il ne fallait pas en dire du mal, pas critiquer, car ils retrouvaient leur propre histoire.

Dominique Paturel et Evelyn Selena rencontrent Larry Hagman et Linda Gray 
dans l'émission Champs Elysées (1986)

DLODS : Vous avez eu l’occasion de rencontrer Linda Gray sur le plateau de l’émission Champs-Elyséesde Michel Drucker, avez-vous pu rencontrer d’autres actrices que vous avez doublées ?

Non, la seule actrice que j’ai rencontrée était Linda Gray, que j’ai vue pendant un court moment sur le plateau de Drucker avec Larry Hagman et Dominique Paturel, je ne l’ai même pas vue en dehors. Quand je suis sortie de ma loge, j’ai vu Michel Drucker assis dans une immense loge où il se faisait démaquiller.  « -Excusez-moi, où sont descendus Larry Hagman et Linda Gray ? » « -Pour quoi faire ? » «- Pour les remercier de leur gentillesse, les Américains sont des gens à part, ils vous parlent comme s’ils vous connaissaient depuis des années, j’aurais aimé dire des gentillesses à Linda Gray » « -Qui êtes-vous ? » « -Comment ça, qui je suis ? Evelyn Selena. Je suis la voix de Linda Gray, vous m’avez interviewée il y a quelques minutes à peine, sur votre plateau en direct ». Il ne me regardait que dans son miroir, ne voulant pas se retourner : «-Si vous n’avez rien d’autre à faire ce soir on organise une fête à l’hôtel » « -Paturel est invité ? » « -Oui » « -Vous êtes très gentil mais comme les autres ont reçu un bristol… ». Je suis partie, et ne suis pas allée à la soirée.

DLODS : En 2012, donc bien des années après l’arrêt de la série, Dallas est revenue avec une nouvelle saison…

Ca m’a fait de la peine de voir ces gens qui étaient si brillants dans la première mouture devenir aussi ravagés. Larry Hagman était brillant à l’époque et là il n’avait plus sa voix ni son regard, il avait perdu beaucoup de poids, ses cheveux. Linda Gray avait déjà été traficotée à l’époque, mais on ne le voyait pas ; là avec les injections tout est ressorti, on a vu tout ce qui avait été fait avant. Il ne restait que ses tics : le mordillement des lèvres, le balancier de hanches quand elle marchait, etc. La fiancée de Bobby ressemblait à un mannequin en plastique qu’on voit dans les vitrines. Je me suis dit « à quoi ça sert, tout ça ? ».
Quant au décor, il était à l'époque très kitch et peut-être signe de mauvais goût, mais on voyait que ça venait de baraques friquées. Là dans la dernière saison quand j’ai vu le décor j’ai dit à Barbara Tissier « Mais ils ont tourné ça à Ikea ? » (rires).

DLODS : Vous avez quand même eu du plaisir à retrouver Dominique Paturel…

Oui, car c’est un bonheur de travailler avec lui. Je déteste les gens qui le remplacent, je ne le supporte pas. Je ne sais pas qui double Michael Caine en ce moment, mais c’est décevant.
Il faut arrêter de prendre les gens pour des cons, le public n’est peut-être pas comédien mais il a de l’oreille. Mon immeuble est grand, et certains savent que je fais du doublage, quelque fois quand un film sortait, on venait m’engueuler « Pourquoi vous n’avez pas doublé « Sur la route de Madison », vous étiez où ? Il est mauvais, ce doublage… ». Une fois je demande dans un magasin « C’est à quel étage, les canapés ? » et là le vendeur me regarde, tétanisé : « Vous n’êtes pas la voix du Docteur Quinn ? » (rires).

DLODS : Cela doit vous épater qu’il y ait de vrais passionnés de doublage.

Oui, je trouve formidable qu’il y ait des gens comme vous ou David Gential qui soient passionnés, convaincus, entêtés, et qui fassent toutes ces recherches bénévolement. Quand David a commencé à contacter des comédiennes, une grande partie l’a envoyée valdinguer. Qu’est-ce que ça fait de perdre un peu temps pour enrichir la passion de quelqu’un ? Qu’on ne dise pas après ça que je suis méchante. Ou alors, il ne faut pas me demander mon avis quand on n’est pas sûr que je donne la réponse attendue.

DLODS : Je sais que vous gardez un bon souvenir de la mini-série franco-irlandaise Les Roses de Dublin(1981), où vous doubliez Bernice Toolan…

Le réalisateur, Lazare Iglesis, voulait un vrai enfant de dix ans pour doubler celui qui jouait mon fils car il en avait marre d’entendre des femmes trop âgées doubler des enfants. Il a fait venir de vrais enfants, et c’était encore plus inécoutable car ce n'étaient pas des comédiens.
Au moment de passer mon essai, Jean Droze me dit « Tu ne connais pas quelqu’un qui pourrait doubler ton fils ? », je lui réponds« -Jackie Berger » « -Je lui en ai déjà parlé mais il n’en veut pas, c’est une fille » et là le réalisateur me dit« -De qui parlez-vous, tous les deux ? » « -De Jackie Berger. Vous devriez la faire auditionner en tournant le dos et en vous laissant guider par sa voix, vous verrez, sur les garçons de 12-13 ans maximum c’est troublant, j’y crois dur comme fer ». J’ai insisté et, avec le soutien de Jean Droze, il a accepté.
Je crois que Jackie fonctionne comme moi, c’est une battante, elle a donné le maximum, et a été prise.
Elle a fait un travail magnifique sur ce petit garçon qui était tellement craquant à l’image, avec des scènes difficiles et bouleversantes. En voix d’enfants c’était la meilleure, elle avait fait une vraie composition de personnage, qu’elle a su garder et adapter. Pendant des années, Francette Vernillat a fait de très jolies choses, mais la voix s’altère au fil des ans.

DLODS : On peut vous entendre aussi dans quelques films d’animation Disney comme Alice au Pays des merveilles(la sœur d’Alice, redoublage de 1974), Pinocchio(la Fée bleue, redoublage de 1975) ou La Belle et le Clochard (Peg, redoublage de 1989)…

J’ai beaucoup aimé La Belle et le Clochard. Patrick Poivey fait partie de ceux que j’aime, qui ont du talent, qui apportent quelque chose d’original. Dans ce film, je ne chantais pas. Je ne comprends pas qu’on ne fasse pas passer des essais aux comédiens sur les chansons, et qu’on prenne souvent des choristes avec des voix très différentes de la voix parlée. Les Claude Bertrand, Philippe Dumat, Roger Carel chantaient bien, et ils étaient souvent remplacés. Dans Les Aristochats, quand Michèle André chante, il y a un phrasé musical d’une justesse incroyable.

DLODS : Vous êtes justement tombée sur un contre-exemple, car c’est une choriste, mon amie Anne Germain, qui chante à la place de Michèle André dans Les Aristochats

Dans ce cas bravo à cette choriste, le raccord était parfait et je me suis fait avoir.

DLODS : Aimiez-vous doubler des dessins animés ?

Pas vraiment, car je n’arrivais pas à modifier ma voix. Sachant que j’ai un tempérament vif dans la vie, on me donnait des hystériques qui beuglaient comme des folles, alors je perdais ma voix, et certains directeurs artistiques s’en fichaient. Il y en a quand même un qui m’amusait, c’était Clémentine, où pour doubler une chienne de la haute société, très snob, j’avais fait une imitation de Jacqueline Porel, avec ce côté « J’ai été élevée par une nurse anglaise et j’ai fait mes études aux Etats-Unis ». Un jour Jacqueline m’appelle : « -Je perds la mémoire, je viens de voir un dessin animé que je ne me souvenais même pas avoir fait, et pourtant c’est ma voix » «- Non, c’est moi, Jacqueline, j’ai voulu te rendre hommage en t’imitant » « -Mais c’est pas possible ! ». Elle était vexée comme un pou (rires).

DLODS : Parmi les hystériques en question, j’ai un petit faible pour votre Milady de Winter dans Albert le cinquième mousquetaire (1994).

L’enregistrement s’est fait dans des conditions particulières. La chaîne voulait des grands noms du théâtre et de la télé donc ils ont pris (en plus de Gérard Hernandez, Francis Lax, etc.) Roland Giraud, Corinne Le Poulain, Christian Alers, Michel Le Royer… et une comédienne connue qui était adorable, pleine d’émotion au cinéma, mais avait une voix étouffée qui ne collait pas avec celle de cette cinglée de Milady, qui est censée hurler sans arrêt. Le studio n’a pas eu le courage de le lui dire, donc ils m’ont demandé de venir tous les soirs pour refaire le travail qu’elle venait de faire dans la journée.
Plus tard ils ont dit à cette comédienne que le dessinateur avait enlevé le personnage de la série. J’aurais préféré qu’ils lui disent la vérité, qu’elle ne pouvait pas abîmer sa voix.
Evidemment c’est retombé sur moi, car quand je me suis mise à enregistrer avec les autres, Roland Giraud ne comprenait pas ce que je faisais là. Gérard Hernandez leur a expliqué la situation, il m’a défendu. Les gens se sont rendus à l’évidence, je n’étais pas une usurpatrice.
Suite à ce doublage, le producteur, Christophe Izard, m’a envoyé un courrier de remerciements et de félicitations.

DLODS : Dans l’équipe il y avait également Serge Lhorca, qui prêtait sa voix à Porthos…

Ah, Serge Lhorca… Je n’ai jamais entendu quelqu’un qui parlait aussi juste, avec autant de sensibilité, c’était une splendeur. Il était dans son monde, il ne comprenait pas l’anglais, l’allemand encore moins. Il parlait espagnol, c’était sa langue. Quand on lui passait la boucle en V.O. il n’écoutait pas : « Ca sert à quoi ? Je ne comprends pas ce qu’il dit »et devant la rythmo il lisait le texte avec un naturel, comme si c’était lui qui avait écrit le texte et qu’il savait ce qui s’était passé avant, ce qui allait venir après, etc. Je ne l’ai jamais vu déjeuner, je lui disais à chaque fois « -Allez, Serge, viens avec nous, on va se retrouver tous ensemble ça va être sympa » «- Non, je vais aller faire ma promenade… », il allait faire une heure de marche et il revenait. Son fils, Denis Llorca, est devenu metteur en scène.

DLODS : Puisqu’on parle de compréhension de l’anglais, je crois savoir que vous appréciez beaucoup Michel Mella…

Michel Mella
J’aime beaucoup Michel Mella, c’est un garçon extraordinaire, plein de pudeurs dans la vie, mais avec un cœur gros comme une maison, d’une générosité pas possible, et quand il joue la comédie il a un naturel -je ne sais pas d’où ça vient- que je lui envie, cette façon de dire les choses de manière quotidienne, c’est magnifique. Je ne sais pas pourquoi il n’est pas employé davantage. Je pense qu’il est trop doué (notamment parce qu’il est complètement bilingue, donc il entend quand il y a des approximations dans l’adaptation), et aujourd’hui il faut prendre des gens qui ferment leur gueule.

DLODS : Avez-vous essayé de faire de la direction artistique ?

Cela ne m’a jamais tenté. Par contre je m’étais dit qu’il faudrait que j’apprenne pour le cas où –cette prévision s’est réalisée, je dois être sorcière !- il m’arrivait quelque chose, que je travaille beaucoup moins et que j’aie besoin d’une porte de sortie. Jacques Barclay m’a dit  « Je n’ai rien à t’apprendre sur la direction d’acteurs car tu es une très bonne comédienne, par contre il faudrait que tu apprennes comment faire un plan de travail et tout ce qui est technique une fois que tu as le film en main ».
J’en ai parlé à Jacqueline Porel, elle a préparé une rame de papier, on aurait dit qu’il y en avait pour cinquante personnes avec cinquante pages chacun. « -Qu’est-ce qu’on fait, Jacqueline ? » «-Tu veux apprendre à diriger ? » « -Oh tu sais, il n’y a rien d’urgent » « -Ah bon, c’est comme tu veux » « -Puisqu’on y est on va le faire », et là elle a gardé le silence, m’a regardé fixement et m’a dit « On ne fait rien, on va déjeuner ». On n’en a jamais reparlé, j’ai su qu’elle avait été beaucoup plus patiente pour apprendre le métier à d’autres comédiens. Parfois il faut laisser tomber et ne pas insister.

DLODS : Avez-vous des regrets dans votre carrière ?

Il y a eu beaucoup d’actes manqués dans ma carrière. J’aurais aimé faire plus de théâtre, de cinéma, et un peu plus de télé comme tout le monde, malheureusement cela n’a pas été possible. Le cinéma, je ne connaissais personne. Le théâtre ce n’était même pas la peine de se présenter, il fallait avoir un nom susceptible de faire venir les spectateurs, être une « tête d’affiche », les gens ne se déplaçaient que pour des personnalités.
Pour ce qui est de la télévision, on parle beaucoup de harcèlement sexuel en ce moment, mais c’était ça tout le temps.
Un jour, un réalisateur médiocre me propose un rôle important dans une mini-série : « -Vous avez un permis de conduire ? » « -Non. » « -Ce n’est pas grave, je peux l’obtenir dans les deux jours, c’est une formalité. Vous savez nager ? » « -Oui. ».
Dans le scénario, il fallait que je parte en voiture sur une route en lacets de Nice à Menton, d’un côté c’était la montagne, de l’autre c’était le précipice… avec le caméraman arrimé sur le capot de la voiture ! Dans ces conditions je devais arriver jusqu’au bord de mer, prendre un canot qui explosait au large, nager jusqu’au rivage, poursuivie par un hors-bord qui ne me rattrapait pas tellement je nageais vite. Je lui dis : « -Même aux jeux olympiques, on ne réussirait pas ce prodige… » « -C’est le miracle du cinéma ! ». Tout était réglé, et là il m’invite à déjeuner pour reparler du rôle. En montant l’étage pour accéder au restaurant il soulève ma robe « -Vous êtes malade ou quoi ?» « -Comment voulez-vous que je vous dirige si je ne vous connais pas bibliquement ?»« -S’il fallait que je couche avec tous les réalisateurs de le la télé pour avoir un rôle je n’en finirais pas !».
Une autre fois, alors que j’étais encore au conservatoire, j’apprends qu’on monte pour la télé On ne badine pas avec l’amour, que je connaissais bien car je l’avais répété pour mon entrée au conservatoire et Georges Chamarat avait été adorable et m’avait distribué quand il avait monté le spectacle. Je vais voir le metteur en scène de la télévision avec un paquet de photos, il les bat comme on bat un jeu de cartes et me dit : « -Et à poil, vous n’avez rien ? » « -Pour le rôle de Camille ? » «-Pour le rôle de Camille… ou un autre » «- Non, j’y penserai peut-être, mais je n’ai encore jamais vu de filles à poil à la télévision ». Finalement, il a pris sa femme, qui n’avait ni l’âge ni le physique du rôle. Quelle chance je peux avoir, moi, là-dedans ? Si vous n’avez pas un appui sérieux qui dit au réalisateur « Allons, tu ne vas pas prendre ta femme pour ce rôle-là, elle pourrait jouer la mère supérieure mais pas Camille… », c’est foutu.
Une autre fois, l'un des plus grands réalisateurs de la télévision m’avait appelée pour un essai. Il y avait une foule devant sa porte, on aurait dit que c’était la guerre et qu’on allait distribuer des morceaux de pain. Alors que j’étais l’une des dernières arrivées, il me fait entrer, et me fait attendre pendant plusieurs heures sans me faire passer d’audition, pour finalement m’avouer : « -Je suis obligé de faire semblant de faire passer des auditions mais on m’a conseillé telle comédienne, car elle est imposée par untel. Mais je vais t’inviter à dîner, je suis sûre que tu n’es jamais montée dans une Mercedes 190 SL » « -Je n’en ai rien à foutre, je veux partir ! ». Il m’a proposé de me raccompagner et j’ai refusé, alors que le quartier des Buttes-Chaumont était dangereux à l’époque, à part les studios de télévision il n’y avait rien, pas d’habitations, et pas de station de taxi.

J’ai tourné un téléfilm, Celui qui n’y croyait pas (1965) pour Jean-Paul Carrère, un monsieur très élégant, très « Jacques Barclay ». Quelques temps après ce tournage, il me convoque pour me dire « -Je cherche un couple de comédiens pour tourner dans une adaptation des « Hauts de Hurlevent », vous avez le tempérament de Catherine, est-ce que ça vous intéresse ? » « -Oh oui, depuis que j’ai vu ce film j’ai toujours rêvé de jouer Catherine, c’est une battante, une fonceuse. » « -J’ai pensé à un comédien pour Heathcliff, mais je ne suis pas sûr de moi, il fait trop bûcheron. Voyez-vous quelqu’un qui ait ce gabarit là tout en étant élégant ? ». Et je lui parle de mon ami Claude Titre, qu’il ne connaissait pas, et lui donne ses coordonnées.
Je venais régulièrement de Nogent-sur-Marne à Paris pour parler avec lui de l’avancée du projet, mais il hésitait encore à me choisir :  « -Vous êtes tellement brune que ça me fait peur !» « -Merle Oberon aussi était brune dans le film… » «-Oui, mais c’était une erreur. » «-Je ne suis pas de votre avis, il ressort physiquement ce qu’elle a intérieurement, elle devient hystérique pour défendre celui qu’elle aime. »
Je n’en entends plus parler, et un jour je vois que ça passe à la télévision. Il avait pris Geneviève Casile, qui est sublime. Et devinez quoi, alors qu’il me reprochait d’être brune, il avait mis à Geneviève Casile, qui est blonde… une perruque brune ! Et Claude Titre jouait Heathcliff, comme il est superstitieux il ne m’avait pas dit qu’il avait participé au tournage, et ne m’a jamais cru quand je lui ai dit que c’était grâce à moi qu’il avait été choisi, il ne s’imaginait pas que je puisse influencer un metteur en scène.
Tout a été tourné en studio, quand les gens marchaient ça faisait « boum » « boum » car tout était en bois. Au début du film, ça commence dans la lande irlandaise avec le vent qui souffle. Heathcliff marche difficilement avec un vent de face, s’arrête devant la maison et quelqu’un vient lui ouvrir en tenant une bougie. Dans le film avec Laurence Olivier, la bougie était protégée du vent par une cage en verre, alors que dans le téléfilm français il n’y avait aucune protection, et la bougie ne bougeait pas, imperturbable. C’était la cata (rires).

DLODS : Que pensez-vous du doublage aujourd’hui ?

Je trouve qu’il y a un manque d’implication, de rigueur, de professionnalisme, d’intérêt au métier, et de lucidité face à la chance immense que nous avons, chance qui est d’autant plus grande pour des comédiens qui débutent, que maintenant qu’il y a internet, des bases de données, etc. vous avez parfois la possibilité de garder à vie –hélas parfois- un comédien que vous doublez. Les directeurs de plateau ont le pouvoir. Alors que peu ont l’oreille musicale, on les croit comme si c’était le bon dieu qui parlait.

Je me souviens encore de cette séance dans les années 90, peu de temps après la grève, Michel Roux est convoqué à 14h et arrive à 12h50, il se pose dans le studio et ferme les yeux : «- Vous dormez ? » «- Non, je ne dors pas ». Je n’avais jamais osé le tutoyer, je n’avais pas souvent travaillé avec lui, à part des petites choses dans Amicalement vôtre ou La Légende des Strauss où je débutais et où il avait toujours été très bienveillant.
Après avoir entendu la première boucle, où les jeunes qui étaient là ne savaient pas ce qu’il se passait dans le film et n’avaient pas l’air intéressés par ce qu’ils faisaient, le directeur artistique leur dit « Amour, joie, bonheur, (son slogan), première boucle, one take. C’est-y pas merveilleux ? ». Il n’avait donné aucune indication, deux ou trois scènes se passent comme ça avec les autres, et puis tout d’un coup arrive notre tour à Michel et à moi. Michel Roux doublait Tony Curtis et moi je ne sais plus qui. A l’image, Tony Curtis arrive en nage et en colère. On fait une première prise, Michel ne bouge pas d’un poil, toujours très statique devant un micro, et fait quelque chose de parfait.  Et là le directeur artistique, pour montrer qu’il est un grand metteur en scène de théâtre, un auteur dramatique et directeur de plateau avisé lui dit : « -Michel, je voulais vous demander : vous avez vu sa jugulaire ? » «- Non, pourquoi? » « - Je pense que si vous l’aviez vue vous ne l’auriez pas jouée comme ça. Quand on a la jugulaire gonflée comme ça, ça veut dire qu’on est très très très en colère » «- Ah» « -Bon, on la refait». On refait la scène et là il lui dit « Eh bien voilà, il suffisait simplement de vous parler de sa jugulaire ». Il n’arrêtait pas de dire des conneries. Michel, imperturbable s’assoit, et me dit pendant le changement de bobine : « Ca a bien changé, le doublage !» (rires).

DLODS : Vous avez quand même participé à quelques beaux doublages, et dans de bonnes conditions, ces derniers temps ?

Virginie Méry
Oui, les derniers se sont bien passés : Le Crime de l’Orient-Express (Judi Dench) pour Michel Derain avec qui je travaille souvent, deux Glenn Close (un pour Olivia Luccioni, que j’ai connue toute petite et un pour Franck Louis qui connaît merveilleusement son sujet), Sandy Wexler(Jane Seymour) pour Isabelle Leprince que je ne connaissais pas.
Et dans quelques jours je vais doubler Helen Mirren dans un film d’horreur, sous la direction de Virginie Méry. J’aime travailler avec Virginie, elle est dynamique, vous pousse à vous dépasser. Je l’ai découverte il y a longtemps comme comédienne chez Alter Ego (société de doublage d’Hervé Icovic, ndlr) pour un film que je doublais avec Patrick Floersheim. Elle doublait une petite jeune fille avec une émotion à fleur de peau : en un plan séquence elle témoignait au tribunal contre son père qui avait violé ses petites sœurs et elle, et finissait par tout raconter avec une espèce de courage, qui sortait comme un vomissement, tout en restant très pudique. Virginie venait de s’enquiller trois scènes sans bavure, sans cafouillage, avec toutes les nuances, et quand elle a fini sa boucle, tout le monde faisait un silence de mort sur le plateau, on était scotché.
Et là j’entends la directrice artistique qui lui dit « -On va la refaire… » «-Ah bon ? » « -Oui, la labiale n’était pas en place », j’étais au fond du studio, et ça a été plus fort que moi, je n’ai pas pu m’empêcher de crier un « Oh non ! » de désespoir.Parce que la labiale n’était pas en place, la directrice de plateau allait foutre en l’air ce travail plein d’émotion, de pudeur, tout y était. Tout ça pour demander à Virginie de refaire de façon mécanique une scène qui méritait d’être gardée telle quelle.

Je regrette qu’on me fasse souvent enregistrer seule, mais il paraît que je « terrifie » certains comédiens. De toute façon, on me regarde de travers dans tous les cas, donc autant dire ce que je pense. En tout cas, sur le dernier Unter Verdacht que j’ai doublé pour Claudio Ventura, je me suis détestée, c’était d’une tristesse à mourir, on sentait que j’étais seule et que je ne parlais à personne. J’ai dit à Claudio que pour le prochain épisode (la comédienne dit à chaque fois qu’elle arrête, et ne peut s’empêcher de continuer), si aucun comédien n’est là pour enregistrer avec moi je quitterai le plateau.

DLODS : Vous accordez aussi beaucoup d’importance à la technique.

Chez les ingénieurs du son, j’adore Emmanuel Mertens, c’est une merveille, digne de Pierre Davanture avec qui j’avais fait La Guerre des Etoiles. Il a une poésie, un amour du travail bien fait, il est avec vous (les comédiens et le directeur artistique), il joue, participe, c’est comme ça que je comprends le métier, ce n’est pas chacun dans son coin, où tu te fais engueuler « -Hé, pourquoi tu parles à l’ingénieur du son ! » «-Pour savoir si ma voix passe… » «-Tu n’as qu’à le demander à moi ! ».
J’ai également un souvenir fantastique de Benoît Jolly, qui était ingénieur du son chez Dubbing Brothers, puis qui a travaillé en solitaire comme monteur à Epinay. Je travaillais pour la première fois avec lui à Dubbing, et au moment de finir, je vais lui dire « -Au revoir et merci » « -C’est normal, j’ai fait mon métier » « -Tant mieux si vous considérez la chose comme ça, mais j’avais la voix dans un triste état, j’avais l’impression d’entendre une roulette dès que j’ouvrais la bouche, et vous avez fait du très bon boulot… » « -Je ne vous connaissais pas, Evelyn. A présent qu’on ne s’avise pas de dire devant moi du mal de vous sinon je lui casse la gueule ; j’ai travaillé avec une vraie professionnelle ».  Sur le chemin du retour, je me retenais pour ne pas partir en sanglots. Il a fallu attendre que ce soient des gens avec qui je travaille pour la première fois pour qu’elles me disent des gentillesses, contrairement à certains avec qui j’ai fait toute ma carrière…

DLODS : On parlait il y a quelques instants de votre regret de ne pas avoir un peu plus joué au théâtre, au cinéma ou à la télévision. Parmi toutes les comédiennes que vous avez doublées, est-ce que vous vous êtes sentie plus « proche » de l’une d’entre elles en terme de personnalité, à tel point que vous auriez presque pu jouer le rôle à sa place si vous en aviez eu l’occasion ?

Glenn Close
Celle dans laquelle je suis rentrée le plus facilement c’était Jaclyn Smith, c’était gentil mais il n’y avait pas grand-chose à prouver.
Les autres, ça serait prétentieux de ma part de dire qu’elles me correspondaient et que j’aurais pu jouer leur rôle. C’est pour ça que j’aime ce métier. Elles étaient tellement sublimes comme Glenn Close, Meryl Streep dans Out of Africa (à ses débuts dans Kramer contre Kramer, doublée par Annie Sinigalia, je la trouvais formidable, et je l’ai moins aimée dans d’autres films qui ont suivi, où elle reprenait les « tics » de ses débuts), ou la géniale Helen Mirren. Mais toutes ces comédiennes que j’ai doublées m’ont permis d’être moi, différente. Etre un jour une pute, une aristo, une intello, une cinglée… De Brigitte Nielsen qui braille comme une folle à Helen Mirren ou Glenn Close, toutes en nuances. Je n’ai jamais eu le même rôle, c’était toujours différent, il fallait trouver au fond de soi cette chose qui correspondait au personnage qui était en face de nous. Cette chance on ne la donne pas aux comédiens, surtout en France, où au théâtre on ne m’a distribuée que dans des rôles de « filles du soleil ». Aux Etats-Unis, les comédiens se déplacent, un jour ils jouent un gangster, le lendemain un ministre de l’intérieur, alors qu’en France, une fois que vous avez été remarquée dans un rôle vous ne pouvez plus en bouger. Et vous ne pouvez pas être à la fois comédienne, chanteuse et danseuse, c’est suspect...


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Jeu-concours "Jean-Claude Vannier: l'arrangeur des arrangeurs"

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En partenariat avec les éditions Le Mot et le Reste, j'ai le plaisir de vous offrir le livre Jean-Claude Vannier : l'arrangeur des arrangeurs (de Rémi Foutel et Julien Vuillet), hommage vibrant à un grand auteur-compositeur-interprète, et témoignage passionnant sur le métier d'arrangeur et le monde des séances d'enregistrement.
Deux gagnants seront tirés au sort demain matin parmi les participants.

Toutes les modalités sont sur la page Facebook de Dans l'ombre des studios.

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Fiches voxographiques Disney, 7ème partie: De Robin des Bois à Winnie l'Ourson

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Voici la suite de la synthèse des recherches sur les premiers doublages Disney que j'ai effectuées en collaboration avec François Justamand (La Gazette du Doublage), Olikos (Grands Classiques) et Greg Philip (Film perdu). 


ROBIN DES BOIS (1973)

Doublage français unique (enregistrement en avril 19741, sortie française le 30 octobre 1974) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Studio : Studios de Boulogne 1
Direction artistique : Serge Nadaud 2
Direction musicale : Georges Tzipine 2
Adaptation des dialogues : Louis Sauvat 2
Adaptation des chansons : Louis Sauvat 2 et Christian Jollet 2
Supervision : Jack Cutting 1

Robin des Bois : Dominique Paturel 2
Petit Jean : Claude Bertrand 2 (Dialogues)
Petit Jean : Jean Stout 2 (Chant)
Prince Jean : Philippe Dumat 2
Triste Sire : Roger Carel 2 (Dialogues et Chant)
Belle Marianne : Michèle André 2
Dame Gertrude : Huguette Morins 2
Adam de La Halle : Pierre Vassiliu 2 (Dialogues et Chant)
Frère Tuck : Pierre Tornade 2
Le shérif de Nottingham : Jacques Marin (Dialogues et Chant)
Pendard : Albert Augier 2
Niquedouille : Francis Lax 2
Bobby (lapin) : Christophe Bruno 2  
Veuve Lapin : Marie Francey 2
La soeur aînée de Bobby : Béatrice Bruno 2
Tagalong, la petite sœur de Bobby : Aurélia Bruno 2
Toby (tortue) : Fabrice Bruno 2
Corniaud : Henry Djanik 2
Le Capitaine : Georges Atlas 2
Croquenote : Guy Piérauld 2
Mère Souris : Colette Ripert 2
Roi Richard Cœur-de-Lion : Jean Martinelli 2
Chanteuse soliste « Hier, deux enfants » : Franca di Rienzo 2
Narrateur séquence d’ouverture : Nicolas Silberg 1
Chœurs : Janine de Waleyne2, Géraldine Gogly2, Anne Germain 2, Claudine Meunier 2,  Jean Stout 2, Jean Cussac 2, Michel Barouille 2 et Olivier Constantin 2
Remarques :
-L’expression « Oo-de-lally » est prononcée de manière différente en fonction des protagonistes et des répliques (« Oh-da-loully », « Oh-de-lally », etc.).
-Petite erreur d’adaptation sur une réplique de Pendard (« sarbacane » au lieu d’ « arbalète »).
-Il s’agit de l’un des rares doublages effectués par Huguette Morins (comédienne, épouse d’un administrateur de théâtre, M. Busson), avec qui j’avais pu échanger quelques mots par téléphone il y a une dizaine d’années.
-Certainement l’un de meilleurs doublages Disney en terme de jeu. On est au théâtre, les comédiens prennent un plaisir extraordinaire, et nous aussi.

Fiches voxographiques de Robin des Bois réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 14 avril 2018.
Sources :
1Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios (remerciements à Philippe Dumat, Dominique Paturel et Béatrice Bruno),
2Carton DVD/Dossier de presse. 


LES AVENTURES DE BERNARD ET BIANCA (1977)

Doublage français unique (enregistrement en juillet 19771, sortie française le 30 novembre 1977) :
Société et studio : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Direction artistique : Jean-Pierre Dorat 2
Direction musicale : Georges Tzipine 2
Adaptation des dialogues : Natacha Nahon 2
Adaptation des chansons : Pierre Delanoë 2

Bernard : Roger Carel 2 (Dialogues et Chant)
Bianca : Béatrice Delfe 2 (Dialogues)
Bianca : Anne Germain 1 (Chant « S.O.S. Société »)
Penny : Aurélia Bruno 2
Madame Medusa : Perrette Pradier 2
Monsieur Snoops : Philippe Dumat 2
Orville : Francis Lax2
Annie Bouée : Jane Val 2
Luke : Gérard Hernandez 3
Le Président de la S.O.S. Société : Georges Riquier
Rufus : Teddy Bilis 2
Chanteuse soliste (« Le voyage », « Demain est un autre jour » et « Quelqu’un viendra ») : Dominique Poulain2
La tortue : Henry Djanik 1
Le lapin : Serge Lhorca 3
Le hibou : Albert Augier 4
Bulldozer la taupe : Pierre Garin 4
L’ambassadrice allemande : Géraldine Gogly 1 (Chant)
Le journaliste : Jean Berger 4
Chœurs : Françoise Walle1, Géraldine Gogly1, Anne Germain1, José Germain 1, Jean Cussac 1,  etc.
Remarques :
-Le générique crédite par erreur Serge Lhorca sur Luke (alors que Luke est doublé par Gérard Hernandez, et Serge Lhorca double quant à lui le lapin).
-Petites erreurs dans le générique : « Jeanne » (au lieu de Jane) Val et Teddy « Billis » (au lieu de Bilis)
-Le passage où Orville chantonne (sans paroles) l’air de l’U.S. Air Force est laissé en V.O. Le raccord voix avec Francis Lax n’est pas « évident ».
-A l’époque, pour le chant soliste, Anne Germain, sa fille Isabelle Germain, Françoise Walle, Géraldine Gogly et Dominique Poulain avaient passé des essais. C’est finalement Dominique qui a été choisie.

Fiches voxographiques des Aventures de Bernard et Bianca réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 14 avril 2018.
Sources :
1Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios(remerciements à Philippe Dumat, Anne Germain et José Germain),
2Carton VHS


PETER ET ELLIOTT LE DRAGON (1977)


Doublage français d’origine (enregistrement en juin 19781, sortie française le 18 octobre 1978) :
Société et studio : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2
Direction artistique : Jean-Pierre Dorat 2
Direction musicale : Georges Tzipine 2
Adaptation des dialogues : Natacha Nahon 2
Adaptation des chansons : Pierre Delanoë 2 et Henry Lemarchand 2
Détection des chansons : Daniel Danglard 1

Peter : Morvan Salez 2 (Dialogues)
Peter : Rachid Arhab 1 (Chant)
Nora : Nicole Croisille 2 (Dialogues et Chant)
Lampie : Maurice Baquet 2 (Dialogues et Chant)
Docteur Terminus : Philippe Clay 2 (Dialogues et Chant)
Hoagy : Philippe Dumat 2 (Dialogues et Chant)
Lena Gogan : Paule Emanuèle 2 (Dialogues et Chant)
Merle Gogan : Jacques Deschamps 3 (Dialogues et Chant)
Grover Gogan (le barbu) : Dominique Collignon-Maurin 3 (Dialogues et Chant)
Willie Gogan (casquette) : Yves-Marie Maurin 3 (Dialogues et Chant)
Miss Taylor : Jocelyne Darche 4
Le Maire : Claude Bertrand 3
Paul : Marc de Georgi 3
Le second de Paul : Henri Labussière 1
Le porteur d’œufs : Henri Labussière 5
Ford (commerçant roux et barbu) : Claude d’Yd 3
Le maçon : Alain Dorval 3
Le laitier : Jean-Pierre Leroux 3
La vigie : Henry Djanik1
L’homme à la clôture : Alain Dorval 3
L’homme à la chevelure rose : Pierre Marret1
Villageois « Doux Jesus, regardez-moi ça ! » : Alain Dorval 3
Marin 1 (moustachu) : Pierre Garin1 (Dialogues)
Marin 1 (moustachu) : José Germain1 (Chant « quel pote ! »)
Marin 2 (âgé) : Georges Atlas1 (Dialogues)
Marin 2 (âgé) : Henri Tallourd1 (Chant « quel homme ! »)
Marin 3 (ciré jaune) : Claude Joseph1 (Dialogues)
Marin 3 (ciré jaune) : José Germain1 (Chant « quel frère ! »)
Chanteuse soliste « Un petit point de lumière » : Nicole Croisille1
Chœurs d’adultes : Anne Germain1, Henri Tallourd1, José Germain1, Pierre Marret1, etc.
Chœurs d’enfants : Les Petits Chanteurs d’Asnières alias Les Poppys2
Remarques :
-Dans la première fiche établie par les voxophiles du Forum de La Gazette du Doublage, une inversion a été faite pour les rôles de Grover et Willie. De même, Miss Taylor a été attribuée à Danielle Volle alors qu’il s’agirait plutôt (comme dans le redoublage) de Jocelyne Darche. Erreurs réparées.
-La voix chantée de Peter était assurée par Rachid Arhab (qui n’a rien à voir avec son homonyme journaliste), jeune chanteur des Poppys. Merci à Daniel Danglard (membre des Poppys, et détecteur des chansons sur ce doublage).
-Si les chœurs étaient généralement enregistrés « en direct », les rôles chantés solistes bénéficiaient parfois d’une petite répétition avant l’enregistrement. Dans les agendas de Philippe Dumat, on apprend ainsi qu’il a « répété chez Georges Tzipine » le 16 juin 1978 (6 jours avant d’enregistrer ses chansons).
-Doublage exploité en salles, Laserdisc et dans certaines éditions DVD (durée : 101 minutes) et VHS.

Deuxième doublage français (enregistrement en 20031, sortie française en octobre 2003) :
Société : Cinéphase 2
Direction artistique : Perrette Pradier 2
Direction musicale : Georges Costa 2
Adaptation des dialogues originaux : Natacha Nahon 2
Adaptation des chansons originales : Pierre Delanoë 2 et Henry Lemarchand 2
Adaptation des nouveaux dialogues et chansons : Luc Aulivier 2

Peter : Maxime Baudouin 6 (Dialogues et Chant)
Nora : Brigitte Virtudes 6 (Dialogues et Chant)
Lampie : Jean-Claude Donda 6 (Dialogues et Chant)
Docteur Terminus : Bernard Alane 6(Dialogues et Chant)
Hoagy : Pierre-François Pistorio 6 (Dialogues et Chant)
Lena Gogan : Elisabeth Wiener 6 (Dialogues et Chant)
Merle Gogan : Gérard Rinaldi 6 (Dialogues et Chant)
Grover Gogan (le barbu) : Michel Mella 6 (Dialogues et Chant)
Willie Gogan (casquette) : Emmanuel Jacomy 6 (Dialogues et Chant)
Miss Taylor : Jocelyne Darche 6
Le Maire : Marc Alfos 6
Paul : Jean-Louis Faure 6
Le porteur d’œufs : Frédéric Cerdal 7
Ford (commerçant roux et barbu) : Pierre Dourlens 3
La vigie : Frédéric Cerdal 7
Villageois de couleur : Pascal Casanova 7
La femme « bombonne » : Martine Latorre1
L’homme à la chevelure rose : Jean-Claude Briodin1
Villageois « Je m’en remets à lui moi aussi » : Thierry Murzeau 8
Marin 2 (âgé) : Jean-Michel Farcy8(Dialogues)
Marin 2 (âgé) : Jacques Mercier1 (Chant)
Marin 3 (ciré jaune) : Olivier Constantin1 (Chant)
Chœurs d’adultes : Francine Chantereau2, Grazziella Madrigal 2, Dominique Poulain 2, Martine Latorre 2, Michel Costa2, Olivier Constantin2, Jean-Marie Marrier2, Georges Costa2, Jacques Mercier2 et Jean-Claude Briodin2.
Chœurs d’enfants : Nicolas Costa2, etc.
Remarques :
-Dans la chanson « On a un acte de vente », il y a une inversion de voix (Michel Mella chante une réplique de Willie et Emmanuel Jacomy chante une réplique de Grover).
-Dans la chanson « Passamaquoddy », il y a une erreur dans le relevé des chansons du 1er doublage. Bernard Alane dit « La médecine doit être chantée » au lieu de « La médecine doit être charité ».
-Redoublage réalisé pour la sortie de la version longue.
-Doublage exploité dans certaines éditions VHS et DVD (durée : 142 minutes), DVD Z1 (avec les crédits du 1erdoublage) et Blu Ray ZA (avec les crédits du 1er doublage).

Fiches voxographiques de Peter et Elliott le dragon réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 14 avril 2018.
Sources :
1Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios(remerciements à Philippe Dumat, Anne Germain, José Germain, Daniel Danglard et Georges Costa),
2Carton VHS,



LES AVENTURES DE WINNIE L'OURSON (1977)

Doublage français d’origine du segment « Winnie l’Ourson et l’arbre à miel » (enregistrement fin 1966-début 1967, sortie française en mars 1967 (sous forme de court-métrage en première partie de Quatre bassets pour un danois) et le 3 juin 1977 intégré au long-métrage Les Aventures de Winnie l’ourson) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 1
Direction artistique : Henri Allegrier-Ebstein 1
Direction musicale : André Theurer 1
Adaptation des dialogues et chansons: Louis Sauvat 1
Supervision : Wally J. Hardouin 1

Winnie l’Ourson : Roger Carel 1 (Dialogues et Chant)
Jean-Christophe : Benjamin Boda 1 (Dialogues et Chant)
Coco Lapin : Roger Carel 1
Grignotin : Jo Charrier 2
Maître Hibou : Henry Djanik 1
Bourriquet : Pierre Marret 2 (Dialogues et Chant)
Le Narrateur : Michel Gudin 3
Chanteur soliste dans la chanson « Mains en l’air » : Pierre Marret 2
Remarques :
-Les voix de Maman Gourou et Petit Gourou ne peuvent être identifiées avec certitude. (Les noms de Suzy Dornac et de la choriste Michelle Dornay se retrouvent sur des pochettes de livres-disques, mais à prendre avec de grandes pincettes).
-Doublage exploité en salles, VHS (sauf l’édition de 1997) et DVD. En DVD, sous sa forme long-métrage, les transitions entre les trois parties sont celles du deuxième doublage (par Patrice Baudrier, Roger Carel et Jackie Berger).

Doublage français d’origine du segment « Winnie l’Ourson dans le vent » (enregistrement en mai 19692, sortie française le 20 mars 1970 (sous forme de court-métrage) et le 3 juin 1977 intégré au long-métrage Les Aventures de Winnie l’ourson) :
Société : Société Parisienne de Sonorisation (S.P.S.) 2

Winnie l’Ourson : Roger Carel 1 (Dialogues et Chant)
Jean-Christophe : Gaston Guez 2
Tigre Dingo : Jacques Hilling 2 (Dialogues et Chant)
Coco Lapin : Roger Carel 1
Porcinet : Roger Carel 1
Grignotin : Jo Charrier 2
Maître Hibou : Henry Djanik 1
Bourriquet : Pierre Marret 2 (Dialogues et Chant)
Le Narrateur : Michel Gudin 3
Chœurs : Anne Germain 2, José Germain 2, etc.
Remarques :
-Les voix de Maman Gourou et Petit Gourou ne peuvent être identifiées avec certitude. (Les noms de Suzy Dornac et de la choriste Michelle Dornay se retrouvent sur des pochettes de livres-disques, mais à prendre avec de grandes pincettes).
-Doublage exploité en salles, VHS (sauf l’édition de 1997) et DVD. En DVD, sous sa forme long-métrage, les transitions entre les trois parties sont celles du deuxième doublage (par Patrice Baudrier, Roger Carel et Jackie Berger).

Doublage français d’origine du segment « Winnie l’Ourson et le Tigre fou » (enregistrement entre 1974 et 1977, sortie française a priori le 3 juin 1977, intégré au long-métrage Les Aventures de Winnie l’ourson) :

Winnie l’Ourson : Roger Carel 1 (Dialogues et Chant)
Jean-Christophe : Christophe Bruno 1
Tigrou : Christian Marin 2 (Dialogues)
Tigrou : Jacques Hilling 2 (Chant, repiquage de la chanson « C’est merveilleux d’être un tigre » du précédent court-métrage)
Coco Lapin : Roger Carel 1
Porcinet : Roger Carel 1
Le Narrateur : Michel Gudin 3
Remarques :
-Les voix de Maman Gourou et Petit Gourou ne peuvent être identifiées avec certitude. (Les noms de Suzy Dornac et de la choriste Michelle Dornay se retrouvent sur des pochettes de livres-disques, mais à prendre avec de grandes pincettes).
-Doublage exploité en salles, VHS (sauf l’édition de 1997) et DVD. En DVD, sous sa forme long-métrage, les transitions entre les trois parties sont celles du deuxième doublage (par Patrice Baudrier, Roger Carel et Jackie Berger).

Deuxième doublage français de l’intégralité des Aventures de Winnie l’ourson(enregistrement en 1997, sortie française le 5 août 1997) :
Société : Télétota 1
Direction artistique : Patricia Angot 1
Direction musicale : Georges Costa 1
Adaptation des dialogues et chansons originaux : Louis Sauvat 1
Adaptation des nouvelles chansons : Luc Aulivier 1

Winnie l’Ourson : Roger Carel 1 (Dialogues et Chant)
Jean-Christophe : Jackie Berger 1
Tigrou: Patrick Préjean 1 (Dialogues et Chant)
Coco Lapin : Roger Carel 1
Porcinet : Roger Carel 1
Grignotin : Guy Piérauld 1
Maître Hibou : Henry Djanik 1
Bourriquet : Henry Djanik 1
Maman Gourou : Claude Chantal 1
Petit Gourou : Jackie Berger 1
Le Narrateur : Patrice Baudrier 1
Chanteurs solistes « Les éphélants et les nouifs » : Georges Costa 2 (« dehors », « ils sont partout », « mon Dieu qu’ils sont laids », etc.), Michel Costa 2 (« voleurs, menteurs », « en pyjama », etc.), Jean-Claude Briodin 2 (« jongleurs, tricheurs », etc.) et Jean Stout 2 (« ils s’entortillent les bras, les chevilles », etc.)
Choeurs: Dominique Poulain 2, Michel Costa 2, Georges Costa 2, Jean-Claude Briodin 2, Jean Stout 2, etc.
Remarques :
-Redoublage effectué pour harmoniser le film avec les nouvelles voix des personnages.
-Doublage exploité en VHS (édition de 1997) et Laserdisc.

Fiches voxographiques des Aventures de Winnie l’ourson réalisées par François Justamand (La Gazette du Doublage), Rémi Carémel (Dans l’ombre des studios), Greg Philip (Film perdu) et Olikos (Les Grands Classiques). Ces fiches ont été vérifiées par plusieurs spécialistes mais peuvent contenir des erreurs. Pour toute reprise de ces informations, veuillez noter en source ce lien. Mise à jour : 14 avril 2018.
Sources :
1Carton VHS,
2Rémi  Carémel / Dans l'ombre des studios(remerciements à Roger Carel, Anne Germain, José Germain et Georges Costa),

Jacques Brel enregistrant "Fils de" en 1967

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"Je suis partisan du direct, il y a plus d'ambiance quand ça se fait tous ensemble: les musiciens et le monsieur qui chante".






Jacques Brel enregistrant "Fils de" le 2 janvier 1967 au studio Hoche (Barclay). François Rauber dirige l'orchestre, Lionel Gali est le premier violon. On peut reconnaître parmi les saxophonistes les frères Joseph et Marcel Hrasko, et aux ondes Martenot Sylvette Allart (sur laquelle nous n'avons aucune information, aucune photo, etc. Si sa famille ou ses amis me lisent, qu'ils n'hésitent pas à me contacter à danslombredesstudios@gmail.com), qui avec Janine de Waleyne faisait partie des ondistes les plus demandées à l'époque.
En cabine, l'ingénieur du son Gérard Lehner (décédé en 2010) qui travaille sur magnétophones Ampex 2 pistes et 3 pistes et Studer 4 pistes, le chef d'orchestre Pierre Chaillé (directeur du studio Hoche), Jean Fernandez (directeur artistique pour Brel et Ferré) et Georges Pasquier dit "Jojo" (secrétaire de Jacques Brel).




Pendant l'interview de Jacques Brel par Michel Drucker, l'orchestre répète "Mon enfance".

(Remerciements à Gérard Delassus, Jean-Claude Briodon, Sébastien Merlin et Alaric Perrolier)

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Mémoires de José Bartel (Partie 6)

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Musicien, chef d'orchestre, directeur artistique, comédien, chanteur, etc. José Bartel (voix de Guy dans Les Parapluies de Cherbourg et du Roi Louie dans Le Livre de la Jungle) était un artiste à multiples facettes. 
Quelques mois avant sa disparition en 2010, il avait fini d'écrire ses souvenirs (intitulés: Faire comme si... Ou l'enrichissante mais peu lucrative balade d'un mec qui avait les dents trop courtes), que je vous propose de découvrir ici en exclusivité sous la forme d'un "feuilleton", publié avec l'aimable autorisation de sa veuve, Norma, et de son fils, David.

Dans le précédent épisode (Partie 5), José raconte l'enregistrement des Parapluies de Cherbourg, ses débuts de chanteur soliste et la création du groupe Jupiter Sunset...


DAVID…

Lola et moi sommes installés à La Celle St Cloud depuis peu lorsque le 31 décembre 1965 naîtra notre fils, David. Comment rêver mieux pour débuter l’année, que d’aborder l’avenir béatement installés sur notre petit nuage bleu ? Particulièrement bouleversé par cette naissance, je ne puis malgré tout m’empêcher d’espérer que jamais mon fils n’aura à ressentir lui aussi, le sentiment de frustration qui me suivra durant tant d’années après la séparation de mes propres parents. Une certitude cependant: quoiqu’il advienne, si plus tard, au cours de sa vie d’homme, d’éventuelles épreuves s’avèrent pénibles à surmonter ou plus simplement, s’il ressent le besoin de donner ou recevoir de la tendresse, comme ça, sans arrières pensées, il est important que David sache que toujours, il trouvera auprès de l’un ou l’autre d’entre nous, la compréhension, l’amour et le réconfort …

Aujourd’hui, bien que depuis longtemps déjà Lola et moi ayons choisi d’autres chemins, l’affection comme le respect n’ont en rien changé et grâce à Dieu, nous sommes toujours là. Alors si c’est O.K. avec « Lui », le Grand, là Haut,  nous tâcherons de rester disponibles le plus longtemps possible !



LA COMPAGNIE

Trop de responsabilités. Trop de problèmes pour renouveler le répertoire et faire accepter par l’équipe la nécessité de répéter de temps à autres. Trop d’argent à sortir pour renouveler (à mon compte, bien sûr) la sono ou les costumes et surtout, exaspéré d’être constamment forcé d’évoquer le respect des engagements pris par contrat. Quant ce n’est pas la nécessité d’également rappeler de temps à autres, la considération due au public. Un public qui progressivement, semble préférer les discothèques à la musique « live ». D’autant plus que mis à part l’effet de mode, cette désaffection pourrait aussi partiellement s’expliquer par l’attitude sur scène de certains des éléments de l’équipe musicale.
Comment ne pas comprendre par exemple, qu’il soit assez déplaisant pour les clients d’un night-club en principe destiné au divertissement et à la danse, d’être regardés de travers par un ou deux d’entre nous qui ostensiblement,  souhaiteraient voir se terminer la soirée au plus vite. Impatients qu’ils sont d’aller "faire le bœuf" avec les copains puis  se taper des spaghettis et boire un dernier pot en parlant de « vraie musique » avant d’aller se coucher.  
Est-ce la déception ?  Une certaine lassitude de la routine ?  Qu’importe, ma décision  est prise : La saison d’été 1967 au Casino du Palm Beach de Cannes sera ma dernière en tant que chef d’orchestre. D’autant plus que depuis quelques temps déjà, j’ai le désagréable sentiment de faire du sur place. Alors, il va falloir que ça bouge. 
Peu après la rentrée, c’était effectivement chose faite et sans que j’en aie vraiment conscience, une direction inattendue s’imposait dans mon choix de vie. 

Du statut de chanteur, musicien, compositeur, arrangeur, orchestrateur je passais en un temps record, à celui de responsable tout court en acceptant le poste de directeur artistique qui m’était offert par « La Compagnie », une nouvelle société d’édition et de production dirigée par un sympathique, ambitieux et compétent entrepreneur : Norbert Saada. Un ancien collaborateur et à présent, concurrent de l’homme au cigare et au costume blanc agrémenté de l’immuable bleuet à la boutonnière : L’importantissime industriel du disque Eddie Barclay ! 

Quant à mes nouvelles fonctions, mis à part la supervision des enregistrements et le suivi d’un certain nombre de  productions, mon nouveau job consistera également à collaborer avec la branche « édition » de la société. L’objectif étant d’augmenter l’importance et la valeur commerciale de notre catalogue. C’est en particulier par le biais de contacts avec les artistes, les compositeurs et les auteurs en vue du moment  que pour ma part,  j’étais censé acquérir le plus d’exclusivités possibles en droits d’édition et d’enregistrement. Une tâche  grandement facilitée sur le plan « relations publiques »  par le fait que des artistes comme Hugues Aufray, France Gall, Gilles Dreu ou Nicole Croisille,  étaient déjà pour la plupart, associés à « La Compagnie ». D’autre part,  s’agissant de relations publiques (donc de la promotion de nos disques auprès des programmateurs- radios et télévisions.) cette expérience a indiscutablement constitué pour moi une étape importante. Une expérience durant laquelle je me familiariserai aussi bien avec l’édition musicale qu’avec les plus récentes techniques d’enregistrement. Ce qui sera plus qu’utile pour la suite de ma carrière, à savoir : la communication , le marketing et la gestion de société.

Egalement c’est grâce à ce bout de chemin parcouru avec La Compagnie qu’il me sera donné l’occasion de croiser des personnages hors du commun et aussi divers que Lucien Morisse, Jacques Paoli, Hubert Wayaffe, Philippe Bouvard, Jean Bernard Hebey, Pierre Bouteiller, José Arthur, Jacques Martin, Jean Claude Laval, Jean Pierre Foucault, Michel Denisot, Pierre Lescure… L’incontournable et flamboyant Eddie Baclay étant bien sûr, à inclure lui aussi dans cette liste ! Enfin, un autre privilège particulièrement appréciable me sera accordé : Pouvoir apprécier dans les conditions les plus propices, le talent de grands artistes et créateurs. Comme par exemple Gilbert Bécaud, Jacques Brel, Raymond Devos, Eddy Mitchell, Claude Nougaro, Dalida, Serge Gainsbourg, Joe Dassin, Henri Salvador, Claude François, Mort Schuman, Eddy Marnay, Jean-Pierre Bourtayre, Michel Magne, Daniel Balavoine, Nino Ferrer et bien d’autres encore ..  Rapidement, il m’a fallu admettre qu’à présent, je me trouvai  dans une galaxie radicalement  différente de celle qui fut la mienne depuis tant d’années. Un système totalement commercialisé et déjà formaté ! Ou les radios F.M. et la télévision menaient un jeu à l’intérieur duquel, la musique et la création artistique demeuraient tout de même indispensables. Mais uniquement en tant qu’éléments fonctionnels nécessaires à la compréhension supposée des goûts du public. Ou si possible, la manipulation de celui-ci. Compte tenu du nombre d’options offertes  par l’évolution du métier, il m’apparut évident qu’à présent,  la voie à suivre était toute tracée.  Je continuerai dans le show-biz « nouvelle version » jusqu’à ce qu’arrive le moment de créer (pourquoi pas) mon propre label.



BIENVENUE A CUBA... COMPANERO ! 

1968 - Cette année là, j’ai l’honneur de recevoir de l’Ambassade cubaine à Paris, l’invitation à participer en tant que chanteur et artiste français, au Festival mondial de la Jeunesse de Varadero. Une occasion formidable d’enfin connaître - au terme toutefois, d’un voyage pour le moins louvoyant - le pays de mes ancêtres paternels. S’agissant de « voyage louvoyant », il faut en effet savoir que fin 68, pour se rendre à Cuba , on devait tout d’abord embarquer sur un vol Air France de Paris à Prague. Ensuite, après une escale d’un jour dans la capitale tchèque,- mais en vérité après deux jours de retard pour cause de réparations d’un turbo-propulseur défectueux – prendre le vol hebdomadaire de la Cubana de Aviacion pour rejoindre La Havane via  Shannon (Irlande) Gander (une partie du Canada), et de nouveau, un petit bout d’Atlantique car il était évidemment hors de question pour un avion cubain, de survoler le territoire américain. 
Comment ne pas être soulagés de pouvoir s’envoler hors de ce qui était alors le Rideau de fer ?  Même si paradoxalement, quitter Prague, ait pu au moment du départ, susciter une certaine frustration. Celle de n’avoir pu mieux connaître une si belle, mais en ces temps de guerre froide, si triste ville …
Dès notre arrivée à Cuba - la révolution et l’avènement du socialisme n’étant pas des événements si lointains- le contraste est cependant total. L’atmosphère change du tout au tout et la passerelle à peine descendue, l’ambiance générale se met instantanément au beau fixe. 
Le soleil bien sûr, mais aussi, la convivialité générée en permanence par la traditionnelle hospitalité cubaine. D’autant plus qu’en dépit des rumeurs de l’époque parlant de chape de plomb sur le pays, d’Etat policier et de « barbudos à la mine patibulaire »,  je dois reconnaître que rien de tout cela m’est apparu évident.  A moins que durant les périodes où seul et sans « guide-interprète- ange- gardien » je quittais l’hôtel Nacional où logeait la délégation française pour déambuler librement dans la ville,  quelque chose m’ait échappé. Mais non. Vraiment.  En toute honnêteté, le seul détail qui m’ait alors particulièrement frappé, c’est  que tout au long de mes balades dans les rues de la capitale cubaine, un nombre impressionnant de fenêtres et de balcons - y compris ceux en fer forgé du vieux Havane - diffusaient plein pot les principaux programmes F.M.de Floride ! Toutes portes -fenêtres grandes ouvertes et semble-t-il,  sans aucunes craintes de représailles.…
                                                                 
Mais je m’aperçois qu’il serait peut-être temps d’évoquer les circonstances ayant favorisé cette invitation officielle. Alors voilà : mon copain Ben (qui dirigeait alors l’orchestre de danse du Lido) était  littéralement fasciné par la « Musica Cubana ». Cette passion, lui ayant progressivement attiré - en tant qu’authentique spécialiste de cette musique - l’amitié et la considération de la communauté « habanera » de Paris, Ben finira par devenir l’un des familiers de la Résidence de l’Ambassadeur de Cuba en France. Une rare faveur qui pour Ben, à l’occasion d’un de ses fréquents entretiens à bâtons rompus avec le diplomate, eût pour conséquence de favoriser le déclenchement (involontaire ?) d’un processus exceptionnel me permettant d’enfin connaître mon lointain pays d’origine !
Effectivement, c’est au cours d’un dîner à la Résidence (le sujet de conversation portant sur les cubains de Paris) que Ben, probablement pour l’anecdote, évoque une amusante co-incidence : « Saviez-vous que dans le film « Les Parapluies de Cherbourg,  l’interprétation chantée du partenaire à l’écran de la jeune Catherine Deneuve a été assurée par un certain José Bartel ? Un français qui  se trouve être aussi … le petit fils du Général Quintin Bandéras ! »  
C’est ainsi que grâce à Ben, je me suis retrouvé quelques semaines plus tard, , intégré dans la délégation d’artistes chargés de représenter la France au Festival Mondial de la Jeunesse de Varadero à Cuba !
                                                              
Il est près de 22 heures, le Festival est déjà bien engagé. Et je me trouve dans les coulisses, prêt à passer. En dépit de mon air faussement calme,  je suis en vérité vert d’appréhension. Avec en plus le cœur qui bat la chamade et les mains moites du type dont ça va bientôt être le tour d’apporter à une manifestation de cette envergure, sa modeste participation. 
Puis c’est l‘annonce :  "De Francia …el nieto de Quintin Bandéras … José Bartel !"  
Une précision toutefois car il s’agit là d’un point de détail important. Un détail qui je pense, est susceptible de mieux expliquer l’incident qui va suivre : 
Par la presse, les officiels ou les organisateurs du Festival, le grand public est déjà informé des origines cubaines de l’artiste venu de France pour le Festival. En raison de quoi,  le soir de mon passage sur la scène du festival, un bouleversement émotionnel rare dans la vie d’un homme allait se manifester :
Je n’ai pas même le temps d’atteindre le micro, que le stade entier est debout et que s’élève une impressionnante et interminable ovation. Un accueil extraordinairement émouvant qui en fait, ne m’est pas véritablement destiné. En toute vraisemblance et ce n’est que Justice, cet hommage s’adresse bien sûr et surtout, au héros national qu’était mon grand-père : Le Général Quintin Bandéras. 
Les minutes passent et bien que le tonnerre continue,  es quatre-vingt musiciens du grand orchestre de la radio nationale attaquent enfin l’introduction de ma chanson. Mais je reste muet, foudroyé, incapable de sortir un son. Tant j’ai la gorge serrée et les yeux embrouillés de larmes. 
Un siècle passe, durant lequel, après avoir arrêté l’orchestre et m’être dominé le mieux possible, je suis finalement en mesure de reprendre et terminer ma prestation. Une prestation qui malgré  mon hébétude, semble avoir finalement été entendue et appréciée par le public. Il ne fait aucun doute que mon émotion la plus forte restera à jamais, le bonheur qui m’a été accordé cette nuit-là : Vivre un moment d’une incomparable intensité. Peut-on rêver meilleur retour aux sources ? Il serait superflu je pense - pour ne pas dire ingrat - d’espérer moissonner à nouveau de si émouvants souvenirs.  Mais tout a une fin. Le congé pris à la Compagnie arrive à son terme. Il va me falloir rentrer à Paris…. 

Dès mon retour à La Compagnie, le travail reprend donc de façon positive et sans a-coups. Sur le plan matériel également je n’ai pas à me plaindre car  l’écriture  de « jingles » publicitaires ou la post-synchronisation de films me fournissent à l’occasion, des compléments de salaire appréciables. Puis petit à petit, ça déraille.  Comme dit encore l’autre : « Tout a une fin, même les bonnes choses » ou encore, «  Après le soleil vient la pluie, etc» … Des poncifs usuels bien sûr mais le problème, c’est que ces citations ringardes vont bientôt devenir d’une cuisante actualité. Motif ? La Compagnie ayant sans crier gare fini par déposer son bilan, je me réveille une nouvelle fois sans job, sans salaire, et «cadre » de rien du tout. Conclusions ?  
Je vais devoir à nouveau décrocher le téléphone et pousser les feux sur l’écriture d’arrangements et d’orchestrations. Décrocher des séances d’enregistrement comme choriste, ou le doublage de films musicaux américains dont la version française du Livre de la Jungle vu par Disney. Quitte à me transformer en Roi des singes pour l’occasion. ( ! )  
C’est dire qu’à part une reprise accélérée d’activités occasionnelles, il m’était alors impossible de sérieusement imaginer jusqu’où ces pérégrinations me conduiraient. Et pourtant, succédant à une série de boulots intermittents entrecoupés d’expériences musicales peu rémunératrices - malgré Jupiter Sunset - le miracle s’est produit .  
En effet, grâce à l’aide inespérée et le support d’un ami conseiller juridique, j’ai finalement réussi, par une belle journée du printemps 1971, a réunir les conditions qui permettront la constitution de ma propre société d’édition : « Grenadine Music ». Ouf !


José Bartel chante "Etre un homme comme vous" dans Le Livre de la Jungle (1968)


GRENADINE MUSIC

Dans la mesure du possible, la collaboration d’une « locomotive » - accompagnée de l’exclusivité éditoriale de tout ou partie de son catalogue -  peut s’avérer très utile au démarrage d’une édition embryonnaire telle que Grenadine Music. Le terme de « locomotive »  étant bien entendu utilisé ici, comme synonyme de vedette reconnue susceptible (en fonction de sa popularité et de la régularité de ses ventes) de « tirer » vers le succès une nouvelle société de production. Par conséquent, pour nous, la chasse était ouverte. A savoir : la course intensive au placement des titres composant notre catalogue avec pour finalité, leur enregistrement par des artistes déjà célèbres. Ces chansons étant comme il se doit, généralement concoctées sur mesures par les auteurs et compositeurs adéquats. Mais il faut malgré tout reconnaître que le choix des  Stars se portait plutôt sur les « tubes »  confirmés  (ou « covers »)  acquis par la branche internationale de Grenadine Music pour traduction et promotion en France. S’agissant de la rentabilité de la version française de ces titres (presque toujours américains ou anglais à quelques exceptions près) force est d’admettre que le fait de s’être déjà confirmés comme de gros succès commerciaux dans leur pays respectifs, rendait ces tires indéniablement  plus attractifs aux producteurs français. Comme par exemple le tube espagnol : Borriquito. Le pari que nous avions pris en sortant la version originale de ce titre se confirmera en opération réussie car « Borriquito » connut en 1971 un appréciable succès en France. Compte tenu de ces positifs mais modestes débuts dans la jungle de l’édition et du show-biz, pouvions-nous interpréter notre premier « succès » comme un signe d’encouragement ?  Certainement. Mais ce ne pouvait être que temporaire puisque très vite, afin de vraiment stabiliser financièrement notre société d’édition et faire progresser notre chiffre d’affaires, il est apparu incontournable de tout d’abord  affirmer en premier, notre image de producteurs discographiques. Faute de quoi,  comment rentabiliser le catalogue et garantir la viabilité de Grenadine Music sans promouvoir de nouveaux artistes ? Et pour cela, assumer leurs frais de production et de démarrage ?  Pour faire tourner la boîte, nous ne pouvions plus ne compter que sur l’hypothétique enregistrement d’un de nos titres par une vedette établie. Mais plutôt, investir d’avantage dans la production de disques portant notre propre label.       

Une évidence qui petit à petit fera son chemin et nous mènera finalement à la création des disques Agave destinés à la diffusion et la commercialisation de nos propres productions. Suite à ces ajustements, les affaires commenceront à évoluer favorablement pour Grenadine Music. Quoiqu’en ce qui concerne les disques Agave et l’accueil positif de la profession et du public, la réussite commerciale permanente ne sera, elle, jamais au rendez-vous. Malgré tout, il m’arrive aujourd’hui encore, de me remémorer sans aigreur aucune mais plutôt avec fierté, quelques unes de nos productions d’alors. Entre autres, Magic Garden, un 33 tours instrumental  magnifique enregistré par l’exceptionnel harmoniciste Claude Garden, soutenu pour les arrangements, par Michel Colombier et Vladimir Cosma. Je pense aussi à la bande originale du film de Charles Matton L’Italien des Roses lauréat du Prix de la Critique 72 à Venise. Et tout spécialement, l’excellente qualité musicale des deux albums conçus et réalisés par le groupe Nemo…


Nemo : Doin' nuthin' (1974)

A la différence d’autres formations françaises de tendances diverses - comme Magnum ou Gold par exemple - Nemo se singularisait par l’option que le groupe avait choisi pour s’exprimer. C’est-à-dire baser son répertoire sur des créations originales comportant des textes anglais et interprétées dans cette langue pratiquement sans accent, ce qui rendait Nemo beaucoup plus à même d’accrocher un public international et pour Grenadine Music, présentait l’avantage d’exporter leur album dans les conditions les plus favorables à une  possible distribution à l’étranger. 
Quelle ne fut donc pas ma joie après le superbe travail effectué par le groupe, d’apprendre qu‘Herb Alpert à Los Angeles et Nesuhi Ertegün (Atlantic Records) à New York, très favorablement impressionnés par la musique des « frenchies », étaient plus que partants pour sortir le disque! A la condition toutefois – probablement pour la touche « exotique » ? - que  Nemo consente à  inclure dans l’album au moins un titre en français. 
Sachant d’autant plus qu’à la même époque,  « Kraftwerk » (un groupe européen venu d’Allemagne) faisait un carton aux  U.S.A. avec son single : « Autobahn »,  tous les espoir étaient permis pour Nemo.  Or il se trouve qu’à mon retour des Etats Unis, ce que je pensais être « la » bonne nouvelle du siècle, s’est transformé en douche froide... En effet, la majorité de l’équipe fut intraitable :  Afin de maintenir la continuité dans le style et la couleur sonore du groupe, il était hors de question d’insérer dans l’album un titre chanté dans une langue autre que l’anglais. Alors … ce serait :  Non ! 
                                              
Même si cela devait compromettre la signature d’un contrat U.S. Je comprends et respecte  évidemment leur décision tout en déplorant malgré tout, une intransigeance qui à mon sens n’avait pas lieu d’être… D’évidence, il devint alors inévitable qu’en raison de positions et d’exigences de ce type, nos projets et nos rêves de carrière internationale commencent par s’estomper pour ensuite - mis à part notre amitié- disparaître complètement. C’est bien dommage…
Enfin, la vie continue et sur le plan boulot, je n’ai pas à me plaindre . Quoique pour ce qui concerne ma vie privée, le ciel se soit passablement assombri car depuis des mois ce ne sont qu’inquiétude et morosité qui m’attendent chaque matin... Entre Lola et moi tout va mal et nos relations se sont détériorées au point qu’à présent, c’est l’orage permanent. Va-t-il nous falloir bientôt envisager séparation ? J’ai bien peur que oui… 

David, lui, a bien sûr tout compris. Il est bouleversé de nous voir constamment nous déchirer.  Il sait aussi, heureusement, combien nous l’aimons et qu’il ne se retrouvera  jamais seul, quoiqu’il arrive. Malgré tout, avec une maturité inattendue chez un enfant de son âge, il essaie à sa façon de nous aider à surmonter l’épreuve et renoncer à une séparation qui hélas, ne saurait tarder…Mais en vain..

Partie 1 (enfance, Marseille), Partie 2 (débuts avec Aimé Barelli, caves de jazz à Saint-Germain-des-Prés), Partie 3 (Monte-Carlo), Partie 4 (Algérie, retour à Paris, Istamboul), Partie 5 (Parapluies de Cherbourg, Jupiter Sunset), Partie 6 (La Compagnie, voyage à Cuba, Grenadine Music)... (A suivre)

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Danielle Licari et Jackye Castan : Rhapsodie pour deux voix (Partie 1/3)

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Pour leurs proches ou les gens du métier qui ont eu le bonheur de travailler avec elles, difficile de parler de Danielle Licari sans évoquer Jackye Castan, et inversement. Danielle et Jackye ? La soprano et la contre-alto, qui avec d’autres choristes ont « façonné » le son de la variété française des années 60. Mais aussi la chanteuse soliste virtuose (voix de Catherine Deneuve dans Les Parapluies de Cherbourg et première interprète du célèbre Concerto pour une voix de Saint-Preux) et sa pianiste surdouée qui fut l’une des très rares femmes arrangeuses. Plus de cinquante ans de vie commune et de collaboration musicale, que je vous propose de retraverser avec elles dans ce « portrait croisé ».

(Entretiens réalisés entre le 15 novembre 2015 et le 21 décembre 2018. Remerciements à Gilles Hané et Jean-Luc Meyster)


Enfance et débuts de Danielle Licari

Danielle Licari
Le 30 novembre 1936, les bonnes fées se donnent rendez-vous à Boulogne-sur-Mer pour offrir une voix d’or à la petite Danielle Licari (de son nom de jeune fille Danielle Cuvillier) qui vient de naître.
A l’âge de trois ans, la France est en guerre, et Boulogne-sur-Mer bombardée. « Grâce à un marin, maman et moi sommes parties chez ma marraine à Plouha en Bretagne. Nous avons traversé une partie de la Manche sur un dragueur de mines, nous étions sur le pont, exposées à la pluie et au vent, car il n’y avait pas de cabines. Mon père, qui était cheminot, est resté à Boulogne, réquisitionné comme ses collègues. Puis plus tard nous avons déménagé à Paris. »

Danielle baigne dès l’enfance dans un environnement musical. En dehors de son métier de cheminot, son père joue en semi-professionnel de la trompette, du violon et des timbales dans différents orchestres et Danielle assiste à ses concerts. A six ans, elle prend des cours de piano et de solfège chez une voisine d’immeuble et chante dans une chorale réservée aux enfants de cheminots, tout en suivant une scolarité ordinaire dans son école de quartier.
« A l’école, nous avions un professeur de chant. Lors d’une rentrée il a été remplacé par une nouvelle professeure qui nous a tous fait chanter un par un pour répertorier nos voix. Quand elle m’a entendue elle m’a dit « Toi, il faut que tu rentres à la Maîtrise ! ». J’avais onze ans et demi, et la Maîtrise je ne savais pas du tout ce que c’était, je lui ai répondu « Ah non, je veux rester dans la Chorale des Chemins de Fer » (rires).  Elle a vu mes parents et leur a proposé de me faire travailler afin de me faire intégrer la Maîtrise. »
Maîtrise de la RTF
La Maîtrise de la Radio-Télédiffusion-Française, créée en 1946, permet à des jeunes filles (et quelques garçons) de suivre une école alternant enseignement classique et enseignement musical (chant, solfège, etc.).
« La rentrée à la Maîtrise était déjà passée depuis un mois, donc je devais postuler hors-concours. Ma voix n’avait jamais été travaillée, ma professeure m’a fait travailler si intensément que le jour de l’audition j’étais complètement enrouée. Heureusement, comme j’avais un bon niveau en solfège, j’ai réussi l’examen, et on m’a proposé de repasser l’audition de chant une semaine après, où là j’ai été prise. Ça a enchanté mes parents, et moi aussi. »
Danielle se plaît à la Maîtrise, où elle a parmi ses meilleures copines d’école Nicole Robin (que les voxophiles connaîtront plus tard comme voix française chantée de Charmian Carr (Liesl) dans La Mélodie du Bonheur (1966)). Chaque année, un examen de passage permet de continuer la Maîtrise… ou de la quitter. Danielle y reste jusqu’à ses dix-huit ans. 
A l’issue de la Maîtrise, la voie classique est généralement d’intégrer les chœurs de l’O.R.T.F. C’est ce qu’elle fait avec d’autres camarades, et participe à de nombreux enregistrements et concerts symphoniques, pour des grands chefs comme Herbert Van Karajan.

Le Quatre de Coeur
Mais la chanson française lui manque. En 1960, avec des anciens amis de la Maîtrise, elle monte un groupe vocal à la couleur très lyrique, Les Baladins des Champs-Elysées. Promu par le pianiste Jack Diéval dans ses émissions radiophoniques, le groupe est constitué de quatre femmes (Danielle Licari, Nadine Doukhan, Nicole Filoze et Jacqueline (dite Catherine) Sarassat) et trois ou quatre hommes (dont Jean Hoffmann et Gérard Friedmann) selon les enregistrements. L'année suivante, il est rebaptisé Les Baladins de Paris, et le grand François Rauber en assure la direction musicale. 
De ces Baladins, le pianiste Oswald d'Andrea en garde les quatre filles (et épousera Nicole Filoze, alors mariée au chef d'orchestre Georges Cour), pour créer en 1962 Le Quatre de Cœur, à la couleur plus "pop". Le destin des Baladins de Paris et du Quatre de Coeur sera tragiquement abrégé par la disparition prématurée de Catherine Sarassat, lors d’un accident de voiture. Danielle restera pendant longtemps très marquée par le décès de celle qui fut un temps sa meilleure amie.

 Le Quatre de Coeur : N'oublie jamais (1963)
De g. à d. : N. Doukhan, N. Filoze, C. Sarassat et D. Licari (soliste)

Contrairement à ce qu’on peut parfois lire, Danielle Licari n’a jamais fait partie des Djinns, ensemble vocal créé après son départ de la Maîtrise. Elle suit en revanche le groupe lors d’une tournée. « C’est là, lors de la préparation d’un concert à Auch, que des filles m’ont dit « Regardez, il y a une fille au piano ». Des femmes pianistes c’était extrêmement rare, je suis allée regarder avec les autres, et j’ai vu une fille en robe et grands talons. Cette fille, c’était Jackye. C’est la première fois que je l’ai vue, sans lui parler. Elle était pianiste de l’orchestre des Cha Cha Boys, qui faisait un gala au même endroit. »

Les Barclay (1960)
A l’époque, les choristes lyriques sont parfois demandés en renfort pour des séances de variétés, c’est comme ça que Danielle est repérée par Christiane Legrand et intègre en 1960 Les Barclay, ensemble vocal constitué d’une douzaine à une trentaine de chanteurs en fonction des enregistrements. Dans Les Barclay se retrouvent, en fonction des séances, des choristes de variétés (Jean-Claude Briodin, Claudine Meunier, etc.) et des musiciens sachant chanter (Jacques et Claude Denjean, Jean-Claude Dubois, Bob Quibel, Jean-Claude Casadesus, etc.). Les coordonnées de Danielle circulent, et elle est immédiatement appelée dans les séances de chœurs pour des artistes de variétés, séances tellement nombreuses qu’elle arrête progressivement le classique.

Dans les séances d’enregistrement de la période 1960-1963, les sopranos qui ont le « lead » des chœurs et décrochent des soli sont alors principalement Janine de Waleyne, Christiane Legrand, et deux futures alti (Anne Germain et Claudine Meunier). Un événement, ou plutôt un film, va bousculer cet « ordre ».
« Christiane m’a dit un jour « Tu veux passer des essais pour un film ? Mon frère Michel va faire la musique, ils ont besoin d’une fille pour chanter le rôle de l’infirmière ». Quand j’ai auditionné chez Jacques Demy pour le rôle secondaire de Madeleine, Michel Legrand (qui m’accompagnait au piano) et lui ont dit « C’est la voix de Geneviève, il faut que ce soit elle qui fasse le rôle principal » ».
D. Licari, C. Legrand et C. Meunier
déchiffrant les partitions
des Parapluies de Cherbourg
L’orchestre des Parapluies de Cherbourg est enregistré à Charcot/Europasonor, et les voix au Poste Parisien, en juillet 1963. « Charcot faisait très hall de gare, c’était difficile d’enregistrer dans de bonnes conditions les voix et l’orchestre en même temps, ou alors il aurait fallu d’immenses paravents. On a donc fait les voix au Poste Parisien, qui se trouvait à côté du Cinéma Normandie, sur les Champs-Elysées. Il n’y avait pas de répétitions, tous les chanteurs (José Bartel, Christiane Legrand, etc.) lisaient très bien la musique et pouvaient chanter avec les paroles immédiatement. Comme le film n’était pas encore tourné, Jacques Demy nous indiquait ce qu’il se passait scène par scène afin qu’on y mette les intentions qu’il fallait : « là c’est la scène du départ, elle est en larmes, etc. ». Dès qu’on avait compris ce qu’il voulait et que ça convenait, c’était dans la boîte. J’ai enregistré le rôle de Geneviève en cinq jours (du 8 au 12 juillet 1963 inclus, NDLA) ».
Des disques sont ensuite pressés pour que les acteurs puissent répéter de nombreuses fois afin d’être parfaitement synchrones avec les voix lors du tournage.


D. Licari et M. Legrand
Si plusieurs acteurs du film, comme Nino Castelnuovo (Guy) ou Danièle Ajoret (qui devait interpréter Madeleine, avant d’être remplacée par Ellen Farner pour des raisons de coproduction), assistent aux séances d’enregistrement pour s’imprégner du texte et guider les chanteurs, Catherine Deneuve, elle, travaille de son côté.
« Moi en revanche je suis allée sur le tournage, car j’étais dans les environs à ce moment-là, et nous nous sommes également croisées par hasard à Noirmoutier, elle était en vacances dans le moulin de Jacques Demy et Agnès Varda, et j’avais une maison là-bas. A l’époque, la production n’a jamais voulu qu’on dise que ce n’était pas elle qui chantait dans le film. Michel Legrand, bien des années plus tard, m’a invitée à chanter en duo avec lui à la télévision la chanson des Parapluies « L’adieu à la gare ». »

Michel Legrand et Danielle Licari : Medley Les Parapluies de Cherbourg (1978)

Le film étant 100% chanté (donc sans une seule fois la vraie voix de Catherine Deneuve), on peut dire que le rôle de Geneviève doit son succès à 50% au travail de Danielle. Et pourtant son nom est tronqué au générique (« D. Licari »), elle n’est pas invitée aux événements liés au film (Festival de Cannes, où il reçoit la Palme d’or), et sa participation est pratiquement « cachée ».  Quand on lui demande si elle n’a pas été frustrée par cette situation, Danielle relativise : « C’est la vie, ça ne me gêne pas, j’ai fait mon excellent travail de chanteuse. Et à côté de ça, Michel Legrand nous a fait signer une feuille attestant que nous n’avions aucun droit sur les disques vendus. On a eu un cachet pour faire notre travail en studio, et terminé ! Ce n’est pas terrible ! Ce n’est vraiment pas bien moralement.»

Si le grand public en 1964 ne connaît pas le nom de Danielle Licari, les gens du métier et notamment les arrangeurs (qui font la pluie et le beau temps dans le monde des studios de l’époque) se rendent compte du potentiel de sa voix, à la fois puissante, aux aigus parfaitement assurés, et une interprétation mélodieuse et d’une grande sensibilité.
La plupart des arrangeurs en activité font appel à elle, et en particulier Jacques Denjean, qui l’associe avec son amie Nadine Doukhan et une certaine… Jackye Castan.


Enfance et débuts de Jackye Castan

Jackye Castan
Jackye Castan (de son vrai nom Jacqueline Castan, et longtemps orthographiée Jackie Castan sur les pochettes de disque) naît le 20 mars 1938 à Montpellier. Son père, antillais, étudiant en médecine à la faculté de Montpellier, ne la reconnaît pas à sa naissance. Elevée seule par sa mère (jusqu’à ce que celle-ci se remarie six ans après), la petite Jackye subit le racisme de ses camarades. « A l’époque, il ne devait y avoir que quelques personnes de couleur à Montpellier, donc à l’école on me traitait de bâtarde et de négresse. Pour faire face au rejet des autres, je me suis créé mon petit monde à moi, notamment en me lançant à fond dans le piano, que j’avais découvert étant petite fille grâce à un oncle qui jouait du piano « de routine » comme on disait avant, à savoir qu’il ne savait pas lire la musique mais quand il écoutait une chanson il pouvait la refaire au piano. »
Vers l’âge de six ans, elle entre au conservatoire, suit des cours de solfège, de piano, et de violoncelle, instrument pour lequel elle reçoit un prix d’excellence à l’unanimité.
Elle reçoit un premier prix de solfège, et surtout un prix d’accessit de piano qui lui permet d’accompagner les vedettes de passage dans les casinos de la région : « Pendant que je travaillais l’après-midi au Casino de Palavas pour faire répéter les attractions, je voyais à travers les grandes baies vitrées les jeunes filles de mon âge jouer au volley-ball, se baigner, etc. Cela me faisait envie. Mais d’un autre côté, bosser cela me permettait d’aider financièrement mes parents à qui je donnais l’intégralité de mon salaire, papa étant hémiplégique. A l’époque, nous n’avions pas beaucoup d’aides. Ils étaient heureux de savoir que j’étais là leurs côtés ».

Ses compétences de « lectrice » sont nécessaires afin de déchiffrer rapidement les partitions pour les concerts du soir.
« Après la guerre, beaucoup de musiciens se sont mis à faire du jazz, avec plus ou moins de talent. C’était la porte ouverte à l’improvisation. Ca faisait « américain » pour certains. Pour d’autres c’était « au secours, rendez-vous à la coda ! ». Mais je pense qu’après ce qu’avaient vécu les Français, les oreilles étaient d’une très grande complaisance.»

Mac Kac
La rencontre avec les batteurs Philippe Combelle et Mac Kac, de passage au Casino de Palavas à quelques semaines d’intervalle, va être déterminante. Tous deux la convainquent de « monter » à Paris. « Inconsciemment j’en avais un peu marre de Montpellier car je tournais en rond, j’avais fait tous les orchestres et je m’ennuyais musicalement. Mes parents m’ont dit « on a trois mois de sous pour te payer le voyage et un petit hôtel », et je suis partie à Paris vers 1958 ».

« A Paris, je suis allée au Club Saint-Germain, où Mac Kac m’avait fait entrer. Mais je n’y jouais pas. Les pianistes étaient René Urtreger, Georges Arvanitas et Maurice Vander, j’avais des étoiles plein les yeux. J’étais la  « groupie des pianistes ». »

Dans un autre club, Le Caméléon, elle retrouve Philippe Combelle qui lui propose de devenir pianiste dans l’orchestre de son père, le grand saxophoniste et chef d’orchestre Alix Combelle. Le début d’une grande aventure. A l’époque, les musiciennes sont peu nombreuses dans les orchestres classiques (à part pour des instruments particuliers comme la harpe ou les ondes Martenot) et encore moins dans le jazz. Jackye est à ce moment-là l’une des premières et seules femmes pianistes de jazz en France: « Le monde des orchestres était à 99% masculin, à part les chanteuses d’orchestre. Il m’est arrivée de me retrouver seule femme en tant que pianiste avec huit ou dix musiciens, croyez-moi ce n’est pas triste ! Les conversations : filles, bouffe, foot et politique pour les intellos. Somme toute, comme c’était toujours pareil, c’était assez reposant. Sauf deux ou trois fois, je n’ai jamais eu à me plaindre de gestes déplacés. Mon arme secrète: je les menaçais de leur apprendre le solfège (rires).»

Jackye se souvient de sa première répétition avec l'orchestre Combelle: « Le premier jour, répétition place Blanche où Alix avait un très grand appartement, et un studio de répétition. C’étaient mes débuts à Paris: j’ai pris le métro toute seule à Odéon à 13h et je me suis retrouvée toujours toute seule à 14h... à Odéon. Je suis arrivée 1h30 en retard à la répétition, avec honte et appréhension. Je sonne à la porte, et là une femme à la Marilyn Monroe m’ouvre la porte. Je n’avais jamais vu en vrai une femme aussi belle, et en plus gentille et souriante. Il faut dire que moi de mon côté j’avais une dégaine qui sentait bon le terroir: un manteau vert deux pièces fait par maman, tout parfait, quoi. Claude Nesle, la femme d’Alix Combelle, ayant senti mon désarroi, m’a mis tout de suite à l’aise. Arrivée à l’étage qui dominait la Seine, j’ai vu tout l’orchestre, et le pianiste que je devais remplacer, Jacky Knudde, qui est mort en Inde quelques temps plus tard. La répétition terminée, Alix m’a prise à part, et nous avons joué plusieurs thèmes. J’étais très jeune mais j’avais déjà de la bouteille. Il m’a donc engagée. C’était un vrai swingman, chorusman et une belle personne.»

La vie de tournée avec un orchestre n'est pas morose: «Alix avait son car personnel avec à l’intérieur dix-huit couchettes. Après les galas qui se terminaient vers 2 heures du matin selon les mairies, nous n’avions pas d’autres choix que d’aller nous allonger comme à l’armée, trois couchettes superposées,  avec un petit hublot pour voir dehors, et la lumière pour lire. Je passe sous silence beaucoup de bruits incongrus pour dire que la chaleur aidant, ces messieurs se découvraient au fur et à mesure, ce qui fait que le matin, allongés sur leurs couchettes, au hasard des regards nous n’avions que le choix (rires) ! Avec la chanteuse de l'orchestre, Danièle Bonal (femme d’un très grand guitariste de jazz, Jean Bonal, qui jouait à l’époque de Moustache), nous avons préparé une petite vengeance féminine bien méritée. En arrivant sur la place du village un matin, nous avons laissé les portes du fond du car ouvertes, et comme ils dormaient tous avec des boules quiès et des masques, ils n’ont rien vu ni rien entendu. Les villageois qui allaient au marché, surtout les femmes, profitaient d’un spectacle gratuit et exceptionnel. Ce n’était pas bien méchant, mais les musiciens nous ont fait la gueule pendant tout le gala. »

Jackye se rend une fois par semaine au fameux « marché aux musiciens » entre la place Blanche et Pigalle, où tous les musiciens parisiens se retrouvent pour s’échanger des bons plans et décrocher des engagements : galas dans des casinos de province, bals, événements privés, cabarets, etc.

Lisant bien la musique et bonne en jazz, elle court le cachet et enchaîne les orchestres comme par exemple Leo Clarens, Jacques Hélian, etc. Elle fait répéter (dans l’hôtel où elle vit alors, rue Gay-Lussac) des chanteurs comme Francis Linel, Jacqueline Danno ou P.A.O.L.A., fait des remplacements pour des galas (spectacle de Fernand Raynaud à Clermont-Ferrand)… ou des revues dans des cabarets plus ou moins recommandables. « Un jour un pianiste m’a demandé de le remplacer une semaine dans un cabaret. J’ai accepté, il fallait bien manger. Il n’y avait que des maquereaux et des prostituées. Un soir quelqu’un a tiré un coup de revolver, je me suis planquée derrière le piano. Ce pianiste que j’avais remplacé faisait dépression sur dépression, j’ai compris pourquoi. »

Dans les clubs de jazz, elle joue régulièrement au Caveau de la Huchette avec François Jeannot, remplace occasionnellement Georges Arvanitas (« On s’aimait beaucoup ; mais je n’avais pas autant de talent que lui »), et joue au Keur Samba (dans un groupe constitué notamment de Pierre Dutour, Jacques Nouredine et Jacky Césaire, fils du grand poète Aimé Césaire), où elle finit tous les matins à cinq heures.

Un événement va lui faire changer de trajectoire : dans l’orchestre des Cha Cha Boys, où Jackye joue du piano, le chef lui demande un jour de chanter une chanson en antillais. Saxophoniste dans l’orchestre (et choriste déjà important dans les studios parisiens, et membre des Double Six), Jean-Claude Briodin repère ainsi Jackye et donne son numéro de téléphone à plusieurs choristes.

« Un jour, je venais de rentrer chez moi à 5h du matin, et je reçois un coup de fil de Jeanette Baucomont (choriste, et ex-Swingle Singers). Elle m’appelle de la part de Jean-Claude, et me supplie de la remplacer pour une séance à 9h. J’arrive en retard au studio, la voix un peu fatiguée, mais j’assure quand même. Alors, petit à petit on a commencé à m’appeler quand il y avait des trous. Christiane Legrand convoquait souvent les chœurs dans les séances, et j’ai eu le privilège de travailler avec elle. Elle avait parfois du mal à chanter car je sortais des blagues monstrueuses et elle était très rieuse. Comme j’avais vécu dans un univers uniquement masculin je ne me rendais pas compte des énormités que je disais. Christiane savait, elle connaissait la mentalité des musiciens.»

Parmi les premiers artistes qu’elle accompagne, Henri Salvador. « Il m’appelait « petite sœur », avec lui j’ai fait notamment les chœurs sur « Le travail c’est la santé », entrecoupé de rires. On a eu du mal à enregistrer car il faisait des plaisanteries. »

En studio, la choriste Michèle Dorney lui parle de Danielle Licari comme de l’une des plus belles voix du moment, mais il faut attendre une séance fin 1963-début 1964 où Danielle et Jackye sont toutes deux convoquées par Janine de Waleyne, pour qu’une vraie rencontre ait lieu. « Danielle était mariée à ce moment-là. Je la faisais mourir de rire. Je crois que ça change les femmes de rire. Et ça fait cinquante-quatre ans que nous sommes ensemble. »


Pour lire, la suite de l'article (Partie 2), cliquez ici.
(Partie 1/3: Enfance et débuts de Danielle Licari et Jackye Castan, Partie 2/3: Les Fizz et les grandes années studio, Partie 3/3: Le Concerto pour une voix et l'après-Barclay)

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Danielle Licari et Jackye Castan : Rhapsodie pour deux voix (Partie 2/3)

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Pour lire, la précédente partie de l'article (Partie 1), cliquez ici.
(Partie 1/3: Enfance et débuts de Danielle Licari et Jackye Castan, Partie 2/3: Les Fizz et les grandes années studio, Partie 3/3: Le Concerto pour une voix et l'après-Barclay)


Les Fizz (Danielle, Jackye et Nadine) et les grandes années studio

Les Fizz (Olympia 1966)
Danielle Licari et Jackye Castan se retrouvent au cœur de ce qui peut être considéré comme l’âge d’or des studios d’enregistrement français. Du début des années 60 au milieu des années 70, les studios tournent à plein régime, jour et nuit, pour enregistrer chansons, orchestres (c’est la grande époque des Paul Mauriat, Franck Pourcel, Raymond Lefèvre, etc.), musiques de film, musiques de catalogue, génériques d’émissions de télévision, publicités (souvent chantées), jingles, covers, etc.

Danielle témoigne de ce rythme effréné : « Nous faisions parfois trois à quatre séances de chœurs par jour : 9h-12h, 13h30-16h30, 17h-20h, 21h-minuit, allant de studio en studio : Barclay, Polydor, Charcot, Pathé, etc. On travaillait énormément, on a accompagné tout le monde. Comme nous savions lire parfaitement la musique, il n’y avait pas besoin de répétitions, on nous mettait les partitions dans les mains, et c’était parti. Donc nous n’avions pas besoin de mémoriser le texte, la musique, etc. Les artistes n’étaient pas toujours là, donc parfois on ne savait même pas pour qui on chantait. C’est pour ça que j’ai gardé très peu de souvenirs des titres que j’ai enregistrés. La mémoire retient mieux les tournées, où là nous étions plus proches des artistes»
Jackye : « Pendant un moment on passait même une journée par semaine chez Pathé-Marconi à accompagner de jeunes débutants qui venaient passer des auditions. Il y avait sur place piano, guitare, basse, batterie, et des chœurs. Dans l’équipe il y avait Louis Aldebert, membre des Double Six et super pianiste et arrangeur. On reçoit un jour un groupe de rock’n roll. Dans le rock il n’y a pas beaucoup d’harmonies, et le garçon enchaînait « La bémol, si bémol, la bémol, si bémol… ». Et là, Louis, qui était d’ordinaire la douceur et la gentillesse mêmes, n’en pouvant plus, s’écrie « Changez d’accords! » (rires) »

François Deguelt et Danielle Licari: Le ciel, le soleil et la mer

Danielle et Jackye travaillent avec tous les grands arrangeurs du moment, dans des centaines de séances : Alain Goraguer, Christian Chevallier, Jean-Michel Defaye, Jean Claudric, Jean Leccia, Jean Bouchéty, Bernard Gérard, François Rauber, Paul Mauriat, Raymond Lefèvre, Franck Pourcel, Paul Piot, André Borly, etc. puis plus tard Christian Gaubert, Jean-Claude Petit, etc. Mais celui qui les a le plus mis en valeur dans ses arrangements est certainement Jacques Denjean. Appréciant le « rythm and blues » et la pop américaine, Jacques Denjean se spécialise notamment dans les adaptations de succès anglo-saxons. Pour retrouver ce son et une couleur de chœurs dans le genre des Supremes ou de Martha and the Vandellas, il associe à partir de 1964 Danielle Licari (soprano), Nadine Doukhan (mezzo) et Jackye Castan (alto) régulièrement dans ses séances. A tel point que sur une idée de Sacha Distel, il leur crée un trio, Les Fizz, qui enregistrera trois 45 tours (un chez Polydor et deux chez La Voix de son Maître) avec leur propre répertoire.
« On avait trouvé une façon de chanter proche de ce que faisaient les choristes américaines, un peu comme des chèvres. On nous surnommait d’ailleurs les « chèvres » de Jacques Denjean » s’amuse Jackye. « Ensuite Nadine est tombée enceinte, et nous avons laissé tomber le groupe. »
Jacques Denjean ne se doute peut-être pas qu’un an plus tard, il va arranger les trois plus gros succès de l’été 1965 (« Capri c’est fini » pour Hervé Vilard, « Aline » pour Christophe et « Le ciel, le soleil et la mer » pour François Deguelt), et, par ce coup d’éclat, devenir pendant deux ou trois ans l’arrangeur le plus demandé sur la place de Paris (Johnny Hallyday, Sylvie Vartan, Lucky Blondo, Alain Barrière, Richard Anthony, Sacha Distel, etc.), ce dont bénéficient évidemment… ses choristes préférées.

Les Fizz: Toute ma vie (1966)

Séance de choeurs pour Léo Ferré
De Waleyne, Licari, Dorney et Conti
Photo: Hubert Grooteclaes
Parmi la multitude d’artistes que Danielle et Jackye accompagnent comme choristes dans les séances d’enregistrement : Richard Anthony, Charles Aznavour, Alain Barrière, Guy Béart, Gilbert Bécaud, Lucky Blondo, Petula Clark, Dalida, Pascal Danel, Joe Dassin (« Le chemin de papa »), Sophie Daumier (album L’oiseau de jour, l’oiseau de nuit), Jean-Jacques Debout, Michel Delpech, François Deguelt (« Paris c’est trop loin de la mer »), Sacha Distel, Gilles Dreu, Jacques Dutronc (« Ne pas t’oublier »), Léo Ferré (« Mes petites amoureuses », album La Chanson du Mal aimé), Nino Ferrer, Claude François, Stan Getz (album Communications 72), Juliette Greco, Johnny Hallyday (« Quand revient la nuit », album Hamlet), Françoise Hardy, Zizi Jeanmaire, Serge Lama, Gloria Lasso, Philippe Lavil, Enrico Macias (« El Porompompero »), Mireille Mathieu, Eddy Mitchell (« Mon nom est Moïse »), Monty, Mouloudji, Nana Mouskouri (« Soleil Soleil »), Nicoletta, Pierre Perret (« Tonton Cristobal »), Annie Philippe (« Tchakaboum »), Demis Roussos, Tino Rossi, Michel Sardou, Henri Salvador, Sheila (« Arlequin »), Alain Souchon (« Un coin de solitude »), Stella, Stone et Charden (« Faï doucement »), Michèle Torr, Charles Trénet, Sylvie Vartan, Hervé Vilard, Dionne Warwick, John William, Marcel Zanini, Rika Zaraï, Zoo, etc.

Sans compter toutes les fois où Danielle, auréolée par le succès des Parapluies de Cherbourg, est sollicitée pour faire des voix solistes d’accompagnement avec ou sans paroles (duo, contre-chant, seconde voix) : Charles Aznavour (« Non, je n’ai rien oublié », « Les plaisirs démodés », « Mon émouvant amour »), Dalida (« Le printemps sur la colline »), François Deguelt (« Le ciel, le soleil et la mer »), Michel Delpech (« Chez Laurette »), Sacha Distel (duo « On est si bien ici », « Roméo et Juliette »), Jean Ferrat (réenregistrements de « Deux enfants au soleil » et « C’est beau la vie »), Léo Ferré (« Préface », « L’adieu », « Il n’y a plus rien »), Pierre Perret (« Fillette, le bonheur est toujours pour demain »), Alan Stivell (« Brocéliande »)…
« Les chanteurs aimaient ma voix, savaient que j’étais bonne musicienne et que je chantais bien. Ca leur faisait une plus-value car un joli solo derrière c’est toujours agréable à entendre. »

Sacha Distel et Danielle Licari: On est si bien ici (Olympia 1966)

Danielle et Jackye sont également sollicitées par Claude Bolling pour enregistrer les deux premiers quarante-cinq tours des Parisiennes, en compagnie de Nadine Doukhan, Nicole Croisille et Michèle Dorney. « Les Parisiennes c’était nous. On a fait ce disque avec Claude Bolling qui a fonctionné. Ensuite on nous a demandé de faire la scène, mais il fallait danser et, à part Nicole Croisille, nous n’étions pas danseuses. Mais ils ont quand même eu l’honnêteté et l’élégance de nous le proposer. »

Dans les séances de l’époque, les choristes sont généralement convoqués par l’arrangeur lui-même, ou un musicien (souvent Roger Berthier ou Jean-Claude Dubois) ou choriste (au début, principalement Janine de Waleyne et Christiane Legrand, puis Anne Germain, Jean Stout, Jean-Claude Briodin, Claudine Meunier, Danielle et Jackye elles-mêmes, etc.) ayant le rôle de contracteur et touchant ce qu’on appelle des « frais de régie ».
Roger Berthier
Jackye tient à rendre un hommage particulier au violoniste Roger Berthier, personnage très important dans le métier à l’époque, car beaucoup d’arrangeurs (comme Raymond Lefèvre) lui confiaient le soin de choisir et convoquer musiciens et choristes : « Roger Berthier était plus âgé que nous, mais c’était un homme très ouvert d’esprit et en avance sur son temps. Quand il a su que Danielle et moi vivions ensemble, il nous a comprises. Il nous aimait beaucoup, et au lieu de nous séparer comme certains ou certaines l’ont fait, il veillait toujours à nous convoquer toutes les deux ensemble dans ses séances. Il a aidé Danielle à trouver sa place. »

Pour Raymond Lefèvre, Roger Berthier convoque également les musiciens et choristes des émissions télé de variétés dans lesquelles Raymond dirige l'orchestre. Danielle et Jackye accompagnent ainsi de nombreux artistes dans Le Palmarès des Chansons, Cadet Rousselle, Ring Parade, etc.

Michel Delpech : Chez Laurette (1966)
accompagné par Les Fizz (Nadine, Danielle et Jackye)

La voix de Danielle est généralement très reconnaissable même au milieu d’une douzaine de choristes. Si le son de sa voix est souvent associé au tout début à ses amies « Fizz », celle qui fut sa plus grande « complice » de micro est certainement Anne Germain (choisie par Michel Legrand et Jacques Demy pour prendre la succession de Danielle en voix chantée de Catherine Deneuve dans Les Demoiselles de Rochefort (1967) et Peau d'âne (1970) afin de raccorder avec la voix parlée de l'actrice).
A. Germain, H. Salvador et D. Licari
« Anne était la meilleure des « deuxièmes voix » de Danielle, leurs voix s’accordaient parfaitement, comme Christiane Legrand avec Claudine Meunier, ou Bob Smart avec Jean-Claude Briodin. Anne admirait la façon de chanter de Danielle et la suivait du bout des lèvres, avec beaucoup d’humilité. Elle respirait comme Danielle, il y avait une vraie complicité entre elles. Regardez quand elles chantent à la télé « Count Basie » avec Henri Salvador, il y a quelque chose qui se passe. Et puis elle avait un vrai esprit « musicien » comme les Dorney, Legrand, etc. Dans les filles qui sont arrivées après nous, même parmi celles qui avaient un vécu musical et lisaient la musique, ce n’était plus pareil, c’était un état d’esprit différent.»

Danielle : « En plus d’Anne, j’aimais bien notamment Claudine Meunier, qui, comme Roger Berthier, veillait toujours à nous convoquer toutes les deux Jackye et moi».

Janine de Waleyne
Quant à Janine de Waleyne, autre grande personnalité des studios, une anecdote de Jackye : « Janine a pendant un moment été la choriste qui avait le plus de pouvoir à Paris car elle convoquait les chœurs pour la plupart des arrangeurs au début des années 60 ; après, petit à petit, d’autres s’y sont mis : Christiane Legrand, Claudine Meunier, Danielle… Elle avait un fort caractère, et quand quelqu’un la contrariait, elle le mettait en quarantaine. Et quand vous étiez mis en quarantaine par Janine, qui avait le monopole des séances, vous restiez chez vous. Certains comme Jacques Hendrix en ont fait les frais. Ça me pétrifiait.
Un jour, lors d’une séance pour Henri Salvador, on m’a présenté à Lalo Shiffrin, compositeur entre autres du générique de Mannix, qui m’avait déjà vu jouer du piano dans un club de jazz. Il me demande de convoquer vingt choristes pour un remake américain du film Casque d’or. Aussitôt dit, aussitôt fait, j’ai convoqué tout Paris sauf Janine, car elle avait mis des gens en quarantaine. Curieusement, elle ne m’en a jamais voulu, on n’en a jamais parlé. Elle avait compris la leçon.
Finalement après des heures d’enregistrement, Lalo Shiffrin s’est disputé avec Christian Chevallier qui avait fait des arrangements que je trouvais magnifiques –Quel orchestrateur ! Ecoutez ce qu’il a fait pour Danielle sur « Été 42 »! -  mais qui ne correspondaient pas à ce que Lalo voulait. Et de toute façon, le tournage du film a été abandonné, le film n’est jamais sorti. »

Danielle Licari (musique: Vladimir Cosma): La Mélopée de Falbala
extrait de la musique du film Astérix et la Surprise de César (1985)

Puisque nous évoquons Lalo Shiffrin et les musiques de film, la mode de l’époque est également aux chœurs (Morricone, etc.) dans ce domaine ; la voix de Danielle est exploitée par tous les compositeurs, que ce soit en voix solo, soprano lead ou simple choriste (souvent avec Jackye) : John Barry (Moonraker(1979)), Claude Bolling (Vivre la nuit(1968), Lucky Luke : Daisy Town(1971)), Jean-Pierre Bourtayre (générique de la mini-série Gaston Phébus (1978)), Gérard Calvi (Le Viager (1971), Vos gueules les mouettes (1974), Les Douze Travaux d’Astérix (chœur « L’île du plaisir »,1976)), Vladimir Cosma (Clérambard (1969), Astérix et la Surprise de César (en 1985, vocalise solo « Mélopée de Falbala »)), François de Roubaix (L’Homme Orchestre (1970)), Alain Goraguer (La Planète Sauvage (1973)), Michel Legrand (on reconnaît Danielle et Jackye sur plusieurs répliques du « Massage des doigts » de Peau d’âne (1970)), Michel Magne (Tout le monde il est beau tout le monde il est gentil (1972)), Alain Pierre (générique de la série d’animation Les Aventures de Pierrot (1974)), Jean Wiener (générique de la série Les Gens de Mogador (1972)) et évidemment Francis Lai.
« Je connaissais bien Francis Lai car à l’époque où je faisais les tournées de Mireille Mathieu, il était dans l’orchestre, à l’accordéon. Il n’avait pas encore la place qu’il a eue plus tard. »
Francis Lai
Francis Lai et son arrangeur Christian Gaubert (qui travaille également avec Danielle sur tous les Aznavour de l’époque et la dirige dans le téléfilm musical Perrault 70, en voix chantée de l’actrice Thalie Fruges) sollicitent Danielle dans la plupart de leurs collaborations : House of Cards / Un cri dans l’ombre (chant solo du générique, 1968), La leçon particulière (1968), Love Story (chant « Snowfrolic », 1970), Madly(duo de vocalises avec Anne Germain, 1970), Hello-Goodbye (1970), Le Voyou (1970), La Modification(1970), Les Pétroleuses (1971), Le Petit Poucet (vocalise solo « Le Petit Poucet », 1972), Un homme libre (1972), La Bonne Année(1972), Les Hommes (1973), Un amour de pluie (1973), etc.

Danielle participe aussi à beaucoup de doublages de films. « C’est une technique différente, mais on prend vite le coup, il suffit de suivre la bande, de la même manière qu’on suit la partition dans une séance normale. »Elle chante en soliste dans Camelot(voix chantée de Vanessa Redgrave/Guenièvre, 1967), La Vallée du Bonheur (voix chantée de Barbara Hancock/Susan la muette, 1968), Un violon sur le toit (voix chantée de Michèle Marsch/Hodel, 1971), Alice au Pays des Merveilles (voix chantée de la rose blanche, redoublage de 1974), Heidi (chant solo du générique de la série d’animation de 1974), Pinocchio(chant solo du générique « Joli Pantin » de la série d’animation de 1976), Cendrillon (générique de début, redoublage partiel en 1978 du doublage de 1950), Bambi (voix chantée de Féline, redoublage de 1979), La Belle au Bois dormant (voix chantée de la Princesse Aurore dans La Belle au Bois dormant, redoublage de 1981)…
Danielle se retrouve aussi (souvent avec Jackye) dans les chœurs de Mary Poppins(1964), Sur la piste de la grande caravane (1965), Oliver ! (1968), L’Apprentie sorcière (1972), Peter et Elliott le Dragon (1978), Popeye (1982), Pinocchio (chœurs de « Quand on prie la bonne étoile » en 1982, en complément du doublage de 1975), Le Noël de Mickey (1983), etc.

Extraits de doublages de Danielle Licari (Camelot, La Vallée du Bonheur,Un violon sur le toit, Alice au Pays des Merveilles (deux extraits), Heidi, Bambi et La Belle au Bois dormant)

Sa voix se prête également bien aux disques religieux (La vie de Jésus orchestrée par François Rauber avec Anne Germain et Jean Cussac, Sanctus de Marian Marciak) et aux disques pour enfants (Minizup et Matouvu (le dessinateur Barberousse lui offrira un dessin à cette occasion) avec Jean Stout, Les Chansons de Kiri le Clown avec Guy Piérauld, etc.).

Et évidemment les publicités radio, cinéma ou télévisées, qui sont en grande partie chantées dans les années 60/70 : Tupperware (publicité mythique de 1972 réalisée par Agnès Varda, pastichant Demy-Legrand), Bernardaud porcelaine de Limoges, etc.

Olympia Sacha Distel
(D. Warwick, M. Mathieu, Les Fizz...)
On l’évoquait précédemment, les souvenirs de Danielle et Jackye sont plus précis sur les concerts et tournées, car généralement en studio elles n’avaient pas le temps de s’imprégner de ce qu’elles chantaient, ni de discuter avec les artistes qu’elles accompagnaient. Au début des années 60, il y avait une « institution » : l’orchestre de l’Olympia. Jackye s’en souvient : « A l’Olympia, il y avait un orchestre maison, comme à l’Opéra. Quand les artistes s’y produisaient, ils venaient généralement avec leur pianiste et profitaient de l’orchestre (cuivres, chœurs, etc.) sur place, payé au mois, et dont le directeur musical était Daniel Janin. Ça n’a duré que quelques années car ça coûtait beaucoup trop cher.
Un jour on m’a demandé de jouer de l’orgue pour accompagner Coccinelle à l’Olympia. J’en jouais assez rarement, et j’étais donc beaucoup moins à l’aise qu’au piano. Dans le premier morceau qui attaquait le concert, la mélodie était jouée par l’orgue, qui donnait le signal du lever de rideau. Et là, malheur, j’arrive en voiture place de la Concorde, une femme prise de panique par la circulation avait fui sa voiture en la laissant en plein milieu de la place. J’étais juste derrière, il y avait un embouteillage monstre, j’arrive à l’Olympia, le concert aurait dû commencer il y a un quart d’heure, je vois Bruno Coquatrix qui fait les cent pas devant l’entrée des artistes, très inquiet. Je passe mes clés de voiture au gardien du parking pour qu’il la gare, je cours jusqu’à la fosse et joue pour que le rideau puisse s’ouvrir.
Il n’y avait pas beaucoup de femmes pianistes à l’époque, et Bruno Coquatrix m’aimait bien. Il m’appelait « mon petit ».»

Jerry Lewis et ses choristes
Un grand souvenir à l’Olympia, Jerry Lewis en 1976. « Jackye, Jean Stout, Olivier Constantin et moi avions répété en amont avec son pianiste, mais on ne savait pas concrètement ce qui allait se passer. On découvre le numéro lors de la première répétition avec Jerry, il nous dirige façon chorale, en faisant des tas de grimaces que le public ne voyait pas forcément. Il avait une choriste américaine qui était dans la connivence et interagissait avec lui pour le sketch. Et nous, nous essayions de rester professionnels et nous nous retenions de rire. Quand il a compris qu’on se retenait, il nous a autorisés à rire, à nous lâcher, c’était bon pour le sketch.
On a passé au moins trois semaines avec lui à l’Olympia, c’était super. A la fin il nous a offert à chacun une bouteille de Mouton-Rothschild. Il a été charmant et très pro. Un soir de spectacle, Doudou, le régisseur de l’Olympia, lui lance des coulisses sa canne, et Jerry ne la rattrape pas. Doudou était très inquiet, mais Jerry a été adorable avec lui, lui a dit « Ce n’est pas de ta faute, c’est de la mienne », tandis que tant d’autres artistes auraient fait porter le chapeau au régisseur. »

Jerry Lewis à l'Olympia (1976)
avec D. Licari (perruque brune), J. Castan, J. Stout, O. Constantin et une choriste américaine

A l’Olympia, Danielle et Jackye accompagnent de nombreux artistes, comme Dionne Warwick (dans un programme Sacha Distel, avec Mireille Mathieu et Les Brutos), mais aussi Gilbert Bécaud et Claude François, pour lesquels elles rodent d’abord le spectacle deux ou trois semaines à L’Ancienne Belgique (à Bruxelles). « Claude François était très gentil avec nous. A la fin de l’Olympia, nous avons eu chacune un grand bouquet de roses et un grand flacon de parfum Shalimar pour nous remercier. »

Parmi les preuves de générosité de certains artistes, elles gardent un bon souvenir de Sammy Davis Jr. même si elles n’ont pas travaillé avec lui directement : « Les choristes chantaient dans l’orchestre avec un voile devant donc ils ne le voyaient pas sur scène. Après avoir pris le soin de faire un enregistrement de bande orchestre et chœurs (c’était possible à l’Olympia car il y avait une cabine de son), Sammy a offert une soirée-concert aux musiciens, choristes et techniciens et à leurs familles et amis, afin qu’ils puissent le voir en tant que spectateurs et profiter du spectacle. C’était très généreux. Nous avons été invitées par des amis choristes et nous gardons un souvenir incroyable de cette soirée. »

Mireille Mathieu et Jackye Castan
(Londres, 1966)
Il y a aussi les grandes tournées, notamment avec Mireille Mathieu et Michel Delpech : « Je me souviens qu’on avait un car avec lequel on tournait dans toute la France. Pierrette Bargoin, Jackye et moi étions les choristes, on s’était installé des lits de camp dans le fond du bus. Le bus était tellement chargé, car le matériel sonore était énorme à l’époque, qu’un jour il a calé et le chauffeur nous a demandé de descendre et de prendre la côte à pied. Il fallait nous voir sur le bas-côté à marcher à côté du bus, Gérard Majax, Ginette Garcin, Max Fournier, Paul Préboist (et son frère Jacques) et nous (rires). »
Jackye complète : « Je souhaite à tout artiste de vivre un jour une tournée avec autant de rires. Préboist et Garcin notamment étaient extraordinaires. Voir Paul en charentaises avec son pantalon en velours côtelé comme dans les campagnes suffisait à déclencher un fou rire. Quant à Mireille Mathieu, il est de bon ton chez certains chroniqueurs de se moquer d’elle, mais je crois avoir rarement entendu une voix aussi solide dans le métier, elle pouvait réattaquer rapidement après tout un tour de chant. C’est une artiste réellement connue dans le monde entier.»
Une autre anecdote sur cette tournée de Mireille Mathieu, lors d'un concert en Espagne: « Danielle était au centre, Pierrette à sa droite, et moi à la gauche de Danielle. Dans le tour de chant de Mireille, il n'y avait pas des choeurs sur toutes les chansons, et parfois il n'y avait que trois mesures. Ce soir-là, nous étions en plein air. Je vois arriver sur scène un gros scorpion noir. Je suis née dans le midi, j’ai l’habitude d’en voir dans les pierres sèches, et ça ne me retourne pas. Il arrive vers nous. Danielle le voit et me demande « -C’est quoi ça ? » « -Un scorpion ! ». Je vois Pierrette et Danielle toutes les deux avec leur micro suivre le scorpion et se mettre dos au public. Le public voyait une choriste de face (moi) et deux choristes de dos.»
Parfois, le spectacle est aussi dans la salle: « Lors d'un concert en Bretagne, on avait commencé le spectacle, on en était à la deuxième chanson, et là on voit une femme qui arrive en retard, tout le monde se lève pour la laisser s'asseoir. Elle avait une coiffe bigoudène très grande, et les gens se penchaient autour d'elle car ils n'y voyaient rien. De la scène on aurait dit une gerbe de fleurs.»

Tom Jones : Green green grass of home (Midem de Cannes, 1968)
accompagné par J. Castan, D. Licari et A. Germain

N’oublions pas les festivals du disque, comme le Midem de Cannes, où Danielle, Jackye et Anne Germain accompagnent lors de plusieurs éditions (1968, 1969, 1970…) en trio les plus grands artistes internationaux du moment, dont Tom Jones. « Anne Germain et moi avons failli perdre la vie lors d’un Midem. Nous étions toutes les trois sur une plateforme qui était très en hauteur. Anne et moi reculions, nous étions sur le point de nous appuyer sur le rideau de fond, sans savoir que derrière le rideau c’était le grand vide. Jackye, prise d’un pressentiment, est devenue livide, et nous a tirées vers l’avant par les mains. Juste à temps... »

Raymond Lefèvre
A une époque où les voyages dans les pays lointains sont loin d’être aussi « démocratisés » que maintenant, certaines tournées prennent des allures de périples, comme s’en souvient Danielle : « On part un jour avec Raymond Lefèvre à Tokyo pour un concours de la chanson. Le départ avait lieu à Roissy un vendredi saint, donc il y avait partout des embouteillages sur les routes, l’équipage arrive en retard. Ensuite on nous fait changer d’avion en raison d’un problème technique. Résultat, nous partons avec trois heures de retard. A notre escale à Phnom Penh, nous ne pouvons pas sortir pour des raisons de sécurité, mais on nous autorise quand même à descendre sur le tarmac. Je me retrouve en bas de l’avion avec le commandant de bord, Raymond Lefèvre et sa femme. Le commandant, très soucieux nous dit « Ce retard est embêtant car du coup nous allons arriver à Tokyo de nuit, et je n’ai jamais atterri à Tokyo de nuit. L’atterrissage est assez dangereux car on frôle les immeubles ». Et de son côté Raymond, qui était dans son problème, disait « On va arriver en retard, on n’aura pas assez de temps pour répéter …». L’un et l’autre parlaient de leurs problèmes sans s’écouter, c’était très spécial (rires). » 

De tous ces enregistrements, concerts, etc. avec ces artistes prestigieux, Danielle en a gardé peu de photos : « A l’époque on n’avait pas les smartphones. En séance, on voyait Johnny, Sylvie, Sheila, Claude François, etc. mais ça ne nous serait jamais venu à l’idée de nous prendre en photo avec eux. Je n’ai d’ailleurs jamais vu aucun choriste sortir son appareil photo, ça ne se faisait pas. »


Pour lire, la suite de l'article (Partie 3), cliquez ici.

(Partie 1/3: Enfance et débuts de Danielle Licari et Jackye Castan, Partie 2/3: Les Fizz et les grandes années studio, Partie 3/3: Le Concerto pour une voix et l'après-Barclay)

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Danielle Licari et Jackye Castan : Rhapsodie pour deux voix (Partie 3/3)

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Pour lire, la précédente partie de l'article (Partie 2), cliquez ici.
(Partie 1/3: Enfance et débuts de Danielle Licari et Jackye Castan, Partie 2/3: Les Fizz et les grandes années studio, Partie 3/3: Le Concerto pour une voix et l'après-Barclay)



Concerto pour une voix… et un piano

Saint-Preux
En 1969, alors que Danielle est toujours très sollicitée comme choriste, un événement va la faire passer de l’ombre à la lumière : « J’étais dans le studio A du studio Davout avec deux autres filles pour faire des chœurs. Dans le studio B, juste à côté, Saint-Preux, essayait d’enregistrer « Le Concerto pour une voix » avec un instrumentiste. Ca ne collait pas, alors le technicien désespéré lui a dit « dans l’audi d’à côté, il y a Danielle Licari ». Le technicien est venu me chercher, m’a présenté à Saint-Preux que je ne connaissais pas. On m’a donné la partition, il n’y avait aucune parole d’écrite puisque c’était fait pour être joué par un instrument, donc j’ai fait des onomatopées, en deux prises c’était bon. J’ai signé une feuille de présence de choriste, sans me rendre compte du succès futur. »

En effet, le disque, sorti en décembre 1969 chez AZ et Festival, provoque un ras-de-marée.
Grâce à Roland Vincent (compositeur pour qui elle avait notamment chanté les chœurs de Chez Laurette (Michel Delpech)), Danielle signe chez Eddie Barclay, qui lui propose alors de lui faire réenregistrer le concerto chez Barclay (avec un nouvel arrangement, signé Pierre Porte) afin qu’elle puisse profiter financièrement de son succès et se lancer dans une vraie carrière soliste.


Danielle Licari: Concerto pour une voix

Dans la lignée du Concerto pour une voix, la plupart des chansons qu’elle enregistre pendant sa carrière soliste chez Barclay sont constituées des paroles les plus universelles qui soient : des onomatopées (parmi les rares exceptions : « Tout autour de la Terre » de Roland Vincent et « Je balance » sur une musique de Jackye et des paroles de Charles Level). Comment constituait-elle son programme ?
Jackye au piano
« Avec le directeur artistique Jean Claudel et Jackye, on discutait de ce que j’allais enregistrer. Je cherchais dans mes souvenirs classiques des mélodies qui me plaisaient et que je pouvais chanter sans texte, à la manière d’un instrument. J’avais le choix final, on ne pouvait pas m’imposer un titre, car il fallait que je sois bien dedans. Avec Jackye, je répétais, car il y avait beaucoup de mises en place. Et on voyait ensuite dans quel ordre mettre les morceaux dans le disque : alterner les airs tristes et gais, etc. c’était tout un travail car comme il n’y avait pas de texte il ne fallait pas lasser les gens. »
Des classiques (Concerto pour piano et orchestre de Tchaïkovsky, etc.), mais aussi des créations originales, des airs de musiques de film ou de folklore. Quand on lui demande pourquoi elle ne s’est pas « attaquée » à la musique brésilienne : « J’aimais beaucoup mais je ne pense pas que ça aurait marché ; les gens n’avaient peut-être pas l’oreille pour. »

Au fil des sorties des disques, Danielle fait quelques « promos » à la télévision, mais toujours grâce à l’invitation d’autres artistes comme Sacha Distel, Jacques Martin ou un certain… Louis de Funès.
« Avec plusieurs amies choristes (Anne Germain, Christiane Cour, Françoise Walle, etc.) nous avons joué les bonnes sœurs qui chantent avec Louis de Funès dans « Le Gendarme et les Extra-terrestres » (1979). Je me souviens qu’il faisait tellement froid que nous avions gardé nos pantalons sous nos robes. Louis de Funès, qui était un homme intéressant, m’avait demandé après ça de chanter dans une émission de Drucker.»

Scène des Gendarmes et les Extra-terrestres (solistes: A. Germain, C. Cour, F. Walle et D. Licari)
suivie de "Rhapsodie pour deux voix" (musique : Jackye Castan)

Soirée d'Eddie Barclay avec Danielle
Le succès en France des disques de Danielle reste assez limité. « Le concerto tout le monde connaissait, quand c’est passé en radio la première fois ça a fait un succès terrible. Mais pour ce qui est du reste, à part Serge Reggiani qui a voulu que je sois vedette anglaise dans son programme à l’Alhambra, ça n’a pas pris. »
En revanche, Barclay distribue ses disques notamment au Japon et au Canada où le succès est énorme. « Barclay s’est vraiment bougé, ils ont fait ce qu’il fallait, et grâce à Marouani je suis partie en tournée. »
Jackye se souvient de ce premier concert canadien: « On a fait le choix des morceaux, répété toutes les deux et décidé de prendre, en plus de Danielle au chant et moi au piano, six musiciens (dont Pierre Defaye au violon) et un couple de danseurs. Sans se le dire, chacune de nous pensait « on va se prendre une gamelle » ; on est arrivé à la salle des Beaux-Arts à Montréal… et on a fait un triomphe. Les gens étaient debout, alors que nous n’avions rien prévu pour les rappels. Ça fait partie des plus grandes émotions de ma vie. Et on a continué sur cette lancée dans tout le Canada. Je me souviens d’une interview pour la radio canadienne, le journaliste dit à Danielle « Beaucoup de gens avant de s’endormir fument un joint et écoutent vos disques ! » (rires) ».
Danielle reste très attachée à son public canadien : « Il m’est resté très longtemps fidèle, et c’est grâce à des labels canadiens que j’ai pu sortir mes derniers disques, Lonely Shepherd(1984) et Danielle Licari chante les plus grands (1995) ».

Danielle fera une tournée au Brésil et plusieurs tournées au Canada ou au Japon, où elle apprendra phonétiquement des phrases en japonais pour parler au public et présenter ses chansons. « Je voulais expliquer ce que ces chansons, qui n’avaient pas de texte, représentaient pour moi. J’avais demandé à Barclay s’ils pouvaient trouver une traductrice afin de m’écrire  mes textes de présentation en japonais. On m’a donné un texte mais on m’a fait remarquer après un concert que c’était écrit comme si c’était un homme qui parlait, ce n’était pas assez féminin, dans la langue japonaise il y a une vraie différence de langage si c’est un homme ou une femme qui parle. Du coup une autre traductrice a refait le travail, et c’était beaucoup mieux. »
A propos du public japonais : « Le public était extraordinaire. Quand au Japon on finissait de chanter, il y avait un espace d’une seconde de silence puis c’était un flot d’applaudissements. Les gens attendaient que la dernière note soit jouée pour se manifester afin de ne pas gêner les artistes, je n’avais jamais vu ça. Et à Hiroshima, des gens qui étaient venus me voir en loge pleuraient, je leur faisais des dédicaces sur le dos, les bras, etc. Ils étaient très sensibles et impressionnés. C’est un souvenir incroyable. »

Vocalement, tenir un tel récital relève de l’exploit. « Je faisais des concerts de deux heures : une heure, quinze minutes d’entracte et de nouveau une heure. Beaucoup de choses que j’ai enregistrées étaient très difficiles pour la respiration, comme il n’y a pas de mots. Sur scène il fallait que ce soit le plus parfait possible, malgré le trac. Mais ça s’est toujours très bien passé. »
Jackye surenchérit : « Monter les contre-uts, faire deux heures de vocalises et une ou deux chansons avec texte (dont l’air des Parapluies de Cherbourg), il fallait le faire. Elle a une voix en béton. Jusqu’à présent, personne n’a pu faire ça en solo sur scène».
Et quand la santé n'est pas au rendez-vous, la scène produit des miracles inexpliqués, comme s'en souvient Danielle: « Quand on est sur scène, ce n’est pas du tout comme dans la vie normale. Je me souviens d'un retour de croisière, j’étais très enrhumée, je me mouchais sans arrêt, à tel point qu'en prévision j'avais mis une boîte de mouchoirs dans le piano. Pendant les deux heures du concert, je ne n’ai pas eu besoin de me moucher une seule fois. Je rentre en coulisses et là ça recommence. C’est une sensation bizarre...»

Danielle Licari : Licari Sound (1980)
Musique de Jackye Castan

Pour avoir un programme de chansons « sur mesure », Danielle peut compter sur Jackye comme compositrice, pianiste et arrangeuse. « Je composais déjà un peu, mais par amour pour Danielle je me suis mise à prendre des cours d’harmonie avec Julien Falk (grand professeur d’harmonie, et beau-père de notre amie choriste Alice Herald) et André Hodeir, afin de m’enrichir musicalement. Je n'ai certes pas composé "Le Concerto pour une voix" mais je lui ai quand même composé quelques airs qui ont bien marché ("Rhapsodie pour deux voix", "Licari Sound", "Planet 2000" (paroles d'Eddy Marnay), etc.) et elle a pu faire sa carrière avec une épaule sur qui s’appuyer.»
Le morceau "Licari Sound" offre à Danielle la possibilité de montrer un concentré de ce qu’elle fait de mieux.

Jackye Castan dirigeant une
séance d'orchestre (studio Hoche)
Jackye se souvient de sa première séance de chef d’orchestre : « La première fois où j’ai dirigé un orchestre, c’étaient quarante musiciens, au studio Hoche (Barclay). Quelle émotion, j’en tremble encore ! Connaissant la triste mentalité des musiciens et la misogynie régnant à l’époque, ce n’était pas gagné d’avance. Choriste ça passait, pianiste ça passait, mais chef d’orchestre, non, ça ne passait pas. Je sentais déjà des regards ironiques et hostiles. Pour couronner le tout, le morceau que j’allais diriger était de ma composition et de mon orchestration, « Sagittarius » pour Danielle. J’allais m’enfoncer comme dans un sous-bois, accompagnée d’une multitude de notes, en espérant voir enfin le jour ! Les fausses notes pour me « tester » n’ont pas tardé à fuser, heureusement j’ai l’oreille absolue donc je les ai calmés, et Roger Berthier a mis bon ordre à tout ça. C’était ça le calvaire des femmes au quotidien : toujours avoir besoin d’un homme pour se défendre. » 
Jackye garde un autre souvenir, assez étrange, de cette « première fois » : « Quand on dirige un orchestre, on entend instantanément les premiers pupitres (comme les violons), mais le son des instruments qui sont au fond (les contrebasses, etc.) nous arrive avec un très léger retard, ce décalage est très perturbant, et si on ne fait pas attention, on ralentit. Cela m’a fait faire un cauchemar pendant plusieurs années : je suis sur un bateau, j’entends les premiers pupitres, et avant que n’arrive le reste de l’accord il se passe un laps de temps que je n’arrive pas à contrôler, la proue du bateau n’arrive pas à se soulever pour m’envoyer le reste des notes ! »
                
Jackye est rapidement sollicitée comme arrangeuse pour des artistes autres que Danielle: « J’ai longtemps travaillé pour Pierre Porte, qui m’a fait confiance et je l’en remercie. Je faisais ses orchestrations pour plusieurs émissions de variétés dont il dirigeait l'orchestre comme les émissions de Jacques Martin : Taratata, Musique and Music, etc. » On la voit aussi régulièrement comme pianiste dans ces émissions.

Thierry Le Luron
Elle est aussi arrangeuse pour un spectacle de Thierry Le Luron : « On m’avait demandé de venir chez Thierry Le Luron pour tester les tonalités de ses chansons afin d’écrire ses arrangements. Je gare ma voiture dans la cour de son hôtel particulier à Saint-Germain-des-Prés. Il n’était pas réveillé et je l’ai attendu pendant deux heures, avant qu’il ne se lève, la voix complètement en vrac, ce qui n’était pas pratique pour tester les tonalités (rires). Après ça, je suis repartie en métro, et en rentrant Danielle me dit « Où est la voiture ? ». Comme je suis un peu tête-en-l’air, et que j’avais été énervée et perturbée de l’avoir attendu pendant autant de temps, j’avais oublié ma voiture chez lui ! (rires) »

Jackye compose les génériques et musiques de plusieurs émissions de Gérard Majax, comme La Caverne d’Abracadabra : « J’ai connu Gérard lors de la fameuse tournée avec Michel Delpech et Mireille Mathieu. J’aimais bien la magie, et Gérard était très sympa. Il m’a demandée de l’accompagner au piano dans une émission de télé. J’étais en cabine avec mon piano et n’avais pas de scénario, ni aucune musique écrite, tout était dans l’improvisation, suivant ce que Gérard faisait devant moi. Je soulignais ce qu’il faisait par des musiques, je faisais parfois des impros jazzy, bossa nova, etc. comme au temps du cinéma muet. Le problème de l’improvisation, c’est que quand il a fallu déclarer à la SACEM mes musiques afin de toucher quelques sous, il a fallu que je réécoute toutes les émissions et relève, en dictée musicale, tout ce que j’avais improvisé. L’horreur ! (rires) J’étais épuisée. »
Elle arrange en outre en 1978 la musique du film Hôtel de la plage composée par Mort Shuman.

Gilbert Bécaud et ses choristes
(C. Chauvet, J. Stout, A. Rippe,
C. Garret, B. Houdy et J. Castan)
Pendant cette période, Jackye continue les séances de chœurs en studio, concerts et télévision (notamment pour Gilbert Bécaud). Danielle continue à en faire également en studio (musiques de film, variétés, doublages, etc.), mais en revanche ne peut plus apparaître comme simple choriste lors de concerts ou émissions de télévision. Elle trouve la parade en portant occasionnellement une perruque brune (émission Podium 70, concerts de Jerry Lewis à l’Olympia (1976), etc.).


Charles Aznavour et Danielle Licari: Mon émouvant amour (1980)

Ce statut de célébrité lui permet d’être plus souvent créditée sur les pochettes de disques lorsqu’elle fait une voix d’accompagnement, et d’être présentée au public par les artistes qu’elle accompagne en tournée, comme Charles Aznavour en 1980 : « J’ai fait une tournée avec lui aux Etats-Unis et en Italie, nous chantions deux chansons en duo, « Mon émouvant amour » et « Ave Maria », mais j’étais en guest star, on me présentait. Une fois j’ai eu un très bel article à New-York.»
Charles Aznavour et Danielle Licari
De son côté, Jackye est pianiste sur cette tournée : « Charles, en interprétant, se baladait beaucoup rythmiquement. L’erreur que faisaient beaucoup de ses nouveaux musiciens était d’essayer de le suivre alors qu’il fallait tenir le rythme car il savait où il allait et retombait toujours sur ses pattes. Evidemment, les nouveaux étaient toujours un peu surpris. Je me souviendrai toujours d’un grand guitariste, qui venait d’arriver dans la tournée. Lors de sa première répétition avec nous, il s’arrête et dit : « Excusez-moi, vous pourriez chanter un peu plus en mesure ? ». Charles a cru à un gag. »
Danielle se souvient d'un concert en Belgique: « Il y avait dans la première partie Jean-Paul Dréau (compositeur du "Coup de soleil" pour Richard Cocciante). Malheureusement, le son tombe en panne. Jean-Paul s’assied en bord de scène, et chante sans micro, sa voix portait bien. Une fois sa chanson terminée, pour détendre l'atmosphère, il dit « Je vais vous raconter une histoire: vous savez pourquoi les pets sentent mauvais ? Pour que les sourds en profitent » et là le public, qui venait voir Charles Aznavour, n'a pas rigolé, ça a jeté un grand froid, un bide incroyable. Jackye a rapidement enchaîné au piano.» 
C'est aussi au cours de cette tournée que Jackye expérimente l'un des premiers synthétiseurs: « Lorsque je suis arrivée dans l'équipe de musiciens de Charles, je n’étais pas du tout habituée aux synthés. Ils étaient d’une complexité terrible. Lors d'un gala, il arrive une chanson où je devais jouer l’intro avec un son piccolo. Manque de chance pour moi, la lumière tombe sur le synthé, je n’y vois rien, je me trompe de bouton et je joue avec un son atroce, façon moteur de bateau. J’étais dans un état épouvantable. Charles se retourne, et continue, imperturbable. Il n’en avait rien à faire, il aurait pu jouer sans orchestre, il se suffisait à lui-même. C'étaient ses chansons, elles faisaient partie intégrante de son individu. Et contrairement à ce que certains pensent, sa gestuelle n'était jamais la même en fonction des chansons. Lui et Gilbert Bécaud étaient des grands, des monuments.»  


L’après-Barclay

En 1978, Eddie Barclay vend les parts de sa maison de disque. « Pour Danielle, ça n’a pas été trop important car a pu avoir des contrats grâce à une amie, Marie-Christine Porte, qui travaillait au Japon et dans d'autres pays étrangers. Par contre, il y a eu un soucis avec les séances de chœurs. Installées confortablement dans notre métier avec notre savoir (lire vite) nous n’avons pas vu arriver le danger. De nouveaux choristes sont arrivés, beaucoup plus jeunes, ne sachant peut-être pas lire la musique, mais avec un son nouveau (Alain Chamfort, Daniel Balavoine, les frères Costa, les Fléchettes (groupe de quatre filles)). Les chefs d’orchestre se sont jetés sur ces nouveaux éléments. Il faut dire que certains avaient besoin d’un sang nouveau. Mais leur façon d’écrire les orchestrations n’a pas évolué pour autant. Ainsi va la vie… »

Danielle avec ses élèves
(Christophe Lambert et Richard Anconina)
Danielle se met à donner des cours particuliers de chant : « On avait arrêté les tournées –la dernière c’était pour Charles Aznavour aux Etats-Unis- et je donnais des cours à la maison pour Douchka, le Trio Esperança, Christophe Lambert et Richard Anconina (pour le film Paroles et musique (1984) d’Elie Chouraqui),etc.. Un jour, une jeune femme m’a demandée de la faire travailler car elle voulait intégrer une école qui était en train d’être créée par la SACEM. »
Cette école, c’est le Studio des Variétés. Danielle en parle à Jackye, qui va se renseigner auprès de la SACEM : « Je suis allée voir ce qu’il se passait, je leur ai demandé « Vous avez pensé à un pianiste répétiteur ? », j’ai lu comme un grand point d’interrogation dans leur regard (rires), avec tous les chanteurs qu’ils allaient former ils n’avaient même pas pensé à un pianiste accompagnateur. J’ai finalement postulé comme pianiste, devant un jury constitué notamment de Jean-Claude Petit, Pascal Sevran, etc. et j’ai été prise. »

Jackye entre donc comme pianiste répétitrice (bientôt rejointe par Gérard Gambus) et professeur de solfège, puis grâce au directeur du Studio des Variétés (Jean-Claude Ghanassia), fait entrer Danielle comme professeur de chant variétés (Christiane Legrand assurant les cours de chant jazz, et Nicole Falien le chant lyrique).

« Il y avait des gens biens dans l’équipe, comme Guy Bontempelli ou Bob Socquet. Bob était directeur artistique dans des maisons de disques, c’était lui qui avait eu l’idée de génie de réunir Alain Souchon et Laurent Voulzy. »

Dans leur enseignement au Studio des Variétés, le monde des chœurs n’est jamais loin : « Comme les élèves étaient parfois ennuyés par le solfège, j’avais eu une idée. Je prenais un disque, un Ray Charles par exemple, où il n’y avait pas de chœurs, et j’écrivais des chœurs. Tout le monde chantait autour du disque, c’était sympa, même si on y a passé du temps ; la plupart ne lisaient pas la musique donc il fallait leur apprendre voix par voix. »

Parmi leurs élèves, Marie-Charlotte Leclaire et Renaud Marx (deux comédiens que les voxophiles connaissent bien, l’une prêtant sa voix à Minnie et l’autre à John Travolta), Jacques Haurogné, Pierre Sayah, ou bien encore le fils de Bernard Fresson, qui les impressionne. « Plusieurs ont fait le métier, mais assez peu ont « percé ». Il y avait des jeunes qui y croyaient vraiment, écrivaient leurs textes, etc. et d’autres qui venaient un peu en dilettante. »
Danielle : « C’était dans notre petit circuit, ils n’étaient pas mis en lumière comme à la Star Academy, et n’étaient peut-être pas assez épaulés. »

En 1995, Danielle enregistre le dernier CD de sa carrière, Danielle Licari chante les plus grands, grâce à un ami de Jackye et elle, le guitariste Serge Eymard. Jackye tient à saluer son travail: « A l'époque, les croisières Paquet offraient une croisière à des artistes en contrepartie d'une prestation de leur part, en général un ou deux mini-concerts. Dans la même croisière que nous, il y avait nos amis Gérard Majax et Jean Roucas. En ce qui me concerne je devais jouer deux mini-concerts en trio jazz. Au cours des répétitions, nous avons rencontré Serge Eymard, guitariste très talentueux et très gentil. Rapidement à Paris, il s'est fait une place dans les séances d'enregistrement. Nous avons fait des tournées avec lui: Japon, Canada, etc. En 1990, Serge et moi avons fait un CD orchestral pour des publicités. C'était une idée de moi à la con, car ça n'a même pas rapporté un centime. J'avais composé les musiques et écrit quelques orchestrations, et sachant après coup tout le temps que Serge avait passé en studio, j'avais la honte. Et pourtant, quelques années plus tard, nous avons recommencé en faisant faire à Danielle son dernier CD dans le studio de Serge. A 58 ans, Danielle montrait que sa voix était toujours puissante et belle. Il y a beaucoup de beaux titres qu'on peut retrouver sur Youtube: Et maintenant, La Mer, Honesty, etc. Et vu le nombre d'internautes qui ont vu les vidéos, c'est formidable, et pour Danielle c'est que du bonheur. A l'unisson, nous te disons: merci Serge! »

Jackye et Danielle en octobre 2018
(Photo : Midi Libre)
En 2000, elles quittent Boulogne-Billancourt et s’installent dans un village à 12 kilomètres de Montpellier et 2 kilomètres de la mer :« Nous y avons fait venir la mère de Danielle, toute heureuse d’être auprès de sa fille. Comme nous venions auparavant tous les étés et certaines vacances dans le coin, nous y avions acheté un mazet dans la garrigue avec 5000 mètres carrés de terrain.
Tous les dimanches, rendez-vous au mazet avec mes copains musiciens, qui avaient eu la gentillesse de me garder une place au Jazz Club de Montpellier. Apéro, grillades, paëlla. Quand on avait fini, on faisait le bœuf. Le piano et la guitare étaient branchés sur groupe électrogène. Vu la chaleur et le reste, on faisait la sieste. Nos mamans n’ont jamais souffert de l’absence de petits-enfants étant donné qu’elles sont devenues nos enfants, elles nous suivaient partout. La mienne est décédée en 2003 à 87 ans, et celle de Danielle en 2004 à 103 ans. Ce fut très très dur, nous avons continué notre route sans elles. Puis au fil du temps, le jazz club a perdu des notes et des sons. Ainsi va la vie… Danielle a arrêté de chanter, quant à moi je continue de jouer du piano de temps à autre.
Roland Vincent
Nous avons la chance d’avoir retrouvé d’anciens amis au hasard de la vie, ils habitent Avignon. Roland Vincent, compositeur, et Cécile sa femme, éditrice de musique. Cécile et Danielle sont devenues très amies, elles se téléphonent pratiquement tous les jours. Quant à Roland et moi on s’échange quelques accords bien pourris, histoire de voir si nous avons toujours l’oreille absolue. Et puis on parle de l’âge d’or des séances d’enregistrement, et de nos souvenirs communs. La vie tranquille et simple. Malgré de très gros problèmes de santé que Danielle a surmontés avec une force inouïe, cela n’a pas altéré sa joie de vivre. Elle écoute beaucoup de musique sur Youtube, dans tous les styles. »


Danielle Licari : Tout autour de la Terre
(musique: Roland Vincent, paroles: Claudine Daubisy)

Si Danielle n'est pas du genre à se réécouter, à revoir des images d'elle, etc., Jackye tient à préciser : « Danielle est très discrète, mais je ne vous remercierai jamais assez de nous avoir envoyé des DVD d’archives, car ça c’est un bonheur. Elle était très émue que vous ayez fait tout ce travail, c’est un accompagnement musical et affectif extraordinaire. Et nous transmettre des mots de collègues, fans ou anciens élèves du Studio des Variétés nous fait toujours très plaisir. Merci, très cher Rémi!»

Ce qui frappe les personnes qui, comme moi, ont eu le bonheur de les rencontrer, c’est leur grande complicité, le tout avec beaucoup d’humour, d’admiration et de tendresse. « S’il y a des couples qui s’ennuient ce n’est pas nous, au bout de cinquante ans on a toujours des choses à se raconter. Nous avons eu la chance de croiser la route de grandes célébrités comme Ginger Rogers, la Reine d'Angleterre, Tom Jones, Jerry Lewis, Sammy Davis Jr, Liza Minnelli, Mannix, les Black Panthers, etc. On a rencontré aussi des gens formidables qu'on a aimés et qui nous ont aimés... »


INFOS ET BONUS

Danielle Licari, voix chantée de Thalie Fruges (Jenny) dans le téléfilm musical Perrault 70 (1970)
Musique de Christian Gaubert

Générique alternatif de Cendrillon chanté par Danielle Licari
(Redoublage partiel de 1978, inédit)


Vous pouvez vous procurer une compilation de Danielle Licari (avec ses plus grands succès, dont plusieurs compositions de Jackye Castan) sur le site de Marianne Mélodie : https://www.mariannemelodie.fr/fr/cd-chansons-lyrique/variete-francaise-annees-70/danielle-licari/7529340.html

Une page est consacrée à Jackye Castan (et Danielle Licari est évoquée par plusieurs arrangeurs) dans l’excellent livre de mon confrère et ami Serge Elhaïk qui vient de paraître : Les arrangeurs de la chanson française (2.160 pages, éditions Textuel).




Partie 1/3: Enfance et débuts de Danielle Licari et Jackye Castan, Partie 2/3: Les Fizz et les grandes années studio, Partie 3/3: Le Concerto pour une voix et l'après-Barclay

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Philippe Videcoq-Gagé : Le Retour de Mary Poppins

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Sébastien Roffat (webmaster de l'excellent site chansons-disney.com) et moi avons eu le privilège d'assister à la projection du Retour de Mary Poppins (2018) avec l'adaptateur des dialogues et chansons de la version française à nos côtés. Evidemment, nous en avons profité pour lui poser quelques questions !


Philippe Videcoq-Gagé
SR : Bonjour Philippe Videcoq-Gagé, vous êtes l’adaptateur et le sous-titreur du Retour de Mary Poppinsà la fois pour les dialogues et pour les chansons. Quel défi particulier a représenté le film ? On mesure la difficulté au grand nombre de chansons et surtout aux paroles qui sont particulièrement nombreuses !

PV-G : Bonjour à vous deux. Le film comporte neuf nouvelles chansons et cinq reprises, parfois avec un texte légèrement différent, soit environ 45 minutes chantées et dansées. Se voir confier toute l’adaptation d’un film aussi attendu (et « attendu au tournant ») par un public de tous âges, représentant un tel enjeu commercial (un budget de 130 millions de dollars), est une marque de confiance de la part de Disney, dont on mesure vite la responsabilité. Il faut répondre à la fois aux attentes du distributeur (dont le mot d’ordre était : « Tout doit être parfait ») sans décevoir les adultes, qui compareront forcément le film au premier Mary Poppins, et les enfants d’aujourd’hui, souvent moins habitués à la comédie musicale « classique ». J’ai probablement éprouvé un peu du vertige qu’ont dû ressentir Marc Shaiman et Scott Wittman, compositeurs des chansons originales, mais j’ai eu la chance de partir de leur travail exceptionnel, en espérant ne pas le trahir. Et mon défi consistait à produire l’adaptation la plus fluide possible en dépit des énormes contraintes de synchronisme, dans la mesure où les chansons doivent pouvoir être écoutées seules avec le même plaisir, sans l’image qui impose souvent une précision chirurgicale. Les textes ne doivent pas s’en ressentir.

SR : Quelle chanson a été la plus difficile à adapter ? Certaines de vos propositions initiales ont-elles été rejetées par Disney ? Comment se passent les allers retours à ce sujet ? Combien de temps a pris l’adaptation et à quel moment avez-vous pu travailler sur le film?

PV-G : La plus difficile a été, sans conteste, la berceuse « Where the lost things go », mais j’y reviendrai. On m’a confié le film au mois de mai 2018. Le film était alors en phase finale de montage, et j’ai demandé et obtenu immédiatement une copie ne comportant que les scènes chantées, afin de pouvoir y travailler dès que possible (je n’ai adapté les dialogues qu’en septembre). L’adaptation des chansons s’est étalée sur deux mois environ (tout en menant à bien d’autres projets). Mon premier critique, bienveillant mais ferme, était mon mari, Jean-Luc Gagé, qui m’a permis de peaufiner mon travail. J’ai ensuite moi-même sollicité des réunions de vérification préliminaires dès que j’avais quatre chansons à présenter, pour m’assurer que j’étais bien sur la bonne voie. Boualem Lamhene et Virginie Courgenay (de Disney Character Voices, responsables des doublages) ont un sens très aigu de ce qu’ils veulent ou pas, et je revenais avec une liste de choses à modifier, le plus souvent sur des passages en gros plan où l’exigence de synchronisme ne m’avait pas encore permis de trouver une version satisfaisante.

SR : Pourquoi y a-il des différences de traduction entre la version française doublée et la version originale sous-titrée?

PV-G : Depuis plusieurs années, Disney préfère que le sous-titrage colle au texte original, partant du principe que les spectateurs qui ont opté pour la VO ne veulent pas se voir imposer l’adaptation VF des chansons. Il m’a donc fallu reprendre tout mon travail, trouver de nouvelles rimes et réadapter l’ensemble, en essayant juste de conserver un lien minimum avec la vf, par exemple « Où vont les choses » ou « Luminomagifantastique ». Mais j’ai conservé « le merveilleux ciel de Londres », éliminé au doublage pour des raisons de synchronisme et de fluidité.

RC : Quelle est la place que tient le premier film Mary Poppins (1964) dans votre vie, et quel est votre regard sur l'adaptation de l'époque (dialogues de Louis Sauvat et chansons de Christian Jollet) ?

PV-G : J’avais huit ans à la sortie du premier Mary Poppins, qui m’a émerveillé bien sûr. Je n’avais pas alors le recul pour juger des lyrics français, mais, avec le temps, j’avoue avoir porté un regard plus sévère sur l’adaptation de Christian Jollet, pleine de phrases alambiquées et de trop nombreuses élisions en début de phrases, rendant le texte difficile à comprendre ou, parfois, à chanter. On connaît tous « le morceau de suc’ qui aide la médecine à couler », mais il y a aussi, entre autres, « une banque anglaise march’ sur la précision », « j’avale une pilule bien cruelle » ou « D’suivr’des chemins arides le cœur très fier ». Christian Jollet a fait un bien meilleur travail sur les films d’animation comme Le Livre de la Jungle ou Les Aristochats, et je pense qu’il a été handicapé par le synchronisme, parfois au détriment du texte. Ce qui importe, à mon sens, c’est de restituer l’émotion et la fluidité d’une chanson, et pour cela, une adaptation vaut souvent mieux qu’une traduction trop stricte, même si le but est de concilier au mieux l’un comme l’autre. Je connais, pour le pratiquer, la difficulté de l’exercice, et je ne voudrais pas donner l’impression de vanter mon travail au détriment du sien. J’ai évidemment moi-même des défauts dont je n’ai pas forcément conscience. Mais Mary Poppins est un monument, devenu culte au fil du temps, et Disney s’oppose à rafraîchir l’adaptation, sans doute à raison. J’aimerais voir un jour un Blu-ray offrir le choix entre la VF originale et un doublage rénové, mais ça n’arrivera pas.

RC : Est-ce possible de commenter en quelques lignes votre adaptation pour chacune des chansons principales du film, et notamment ce "Luminomagifantastique", encore plus "Frères Sherman" que l'originale ?

PV-G :

- Pour chaque chanson, j’ai commencé par travailler les plans les plus synchrones, donc les plus compliqués, ce qui a déterminé en grande partie la construction du reste du texte. Pour la chanson d'introduction, j’ai tout de suite vu que le « London Sky » récurrent était inadaptable tel quel, dans la mesure où « Londres » n’aurait pas du tout été synchrone sur « Sky » (sans compter qu’aucune rime ne colle vraiment avec « Londres »), d’où le choix de « Jour de chance », qui a amené « faites confiance à la providence », etc... J’ai casé « le ciel de Londres » dès le premier vers pour en être « libéré-délivré ».
Sur cette chanson, la difficulté majeure a été la réplique « And MayBe soon, FroM uP aBoVe » qui comporte sept labiales en huit syllabes. J’ai fini par trouver « vous Fera Bientôt ViVre un Beau Rêve » qui est très synchrone, et a entraîné « Tout là-haut, le vent qui se lève » juste avant.

«Une conversation», la chanson « parlée/chantée » de Michael, dans le grenier, est très touchante. Comme elle se situe au début du film, Disney a insisté pour que je réécrive un paragraphe pour que le père cite ses trois enfants (ce qu’il ne fait pas en VO). Le passage difficile (parce que très synchrone) était le plan à la fenêtre où il dit « Winter has gone / But not from this room / Snow's left the lane / But the cherry trees forgot to bloom » qui est devenu « Les saisons changent / Mais pas l'amertume / Tout semble étrange / Même les cerisiers sont dans la brume ».

- Ma première version de « Can you imagine that ? »était « Qui donc imagine ça ? ». je l’ai modifiée, à la demande de Disney, en « A-t-on jamais vu ça ? », plus « british ». Sur cette chanson, la difficulté était, au début, les deux répliques en gros plan « For intellect can wash away confusion » et « Most folderol's an optical illusion », où, dans les deux cas, le « u » est soutenu pendant une seconde. Le geste des mains de Mary Poppins, dans la première, m’a fait trouver « Votre intellect s'envole au loin en tous sens », qui a logiquement entraîné, pour la suite, « Méfions-nous des fariboles et du non-sens », où les labiales sont très en place (vérifiez !)

- La chanson « Royal Doulton Music Hall » est courte, mais c’est la plus proche, à mon sens, du « Jolly Holiday » du film original. Pour conserver le côté joyeux et insouciant de la chanson, j’ai volontairement simplifié le texte original qui m’est apparu inutilement compliqué (« Where each day crowds make their way upon the sun's descent / To a mythical, mystical, never quite logistical tent” ou “Yes in this dearly dynamical simply ceramical Royal Doulton Bowl / There's a cuddly and curious furry and furious animal watering hole”).

- Disney m’a présenté « A cover is not the book » comme un défi d’adaptation, avec une intro parlée/chantée en plan rapproché, une rythmique et un dynamisme de cabaret à respecter, et un slam très long de Lin-Manuel Miranda racontant une histoire en une succession de phrases en rimes de cinq à huit syllabes. « Il faut se méfier des apparences » ou « Les apparences sont trompeuses » m’ont permis de mener la chanson avec l’énergie nécessaire, et je suis très satisfait de l’interprétation de Pascal Nowak sur la version française du slam, qui m’a demandé un long travail de synchronisme.

- Disney voulait que la berceuse "Where the lost things go" soit le point d’orgue du film (elle est située exactement au milieu, à la minute près). C’est probablement la plus mélodieuse du film, et qui doit être émouvante sans être sirupeuse, puisqu’elle parle en fait du deuil. Elle devait, en français, « mettre les poils », selon l’expression de Boualem Lamhene. C’est celle qui comporte le plus de gros plans. En raison du nombre de répétitions, j’ai commencé par traduire "Where the lost things go" en « Voir où vont les choses », ce qui a entraîné nombre de rimes en « ose », et, à part les noms de maladies, il n’y en a pas tant que ça. Je me suis ensuite penché sur tous les gros plans. J’ai mis très longtemps à trouver « Mais ils se cachent comme les rimes sous la prose », qui s’est imposé à moi presque par surprise, alors que je désespérais de trouver une ultime rime en « ose ». Et, cerise sur le gâteau, j’ai dû réécrire tout le dernier couplet lorsque, dans une copie suivante, ils ont ajouté la scène où, plus tard, les enfants Banks reprennent la berceuse a capella pour leur père. Les plans étaient quasiment tous synchrones, plus rien ne collait, ce qui m’a conduit à jongler entre les deux chansons pour trouver enfin une version commune satisfaisante. Et Disney a enfin fait réenregistrer l’ensemble de la chanson par Léovanie Raud pour une interprétation plus sobre et plus simple. Elle est, à mon sens, remarquable.

- Pas grand-chose à dire sur « Turning turtle », si ce n’est que ce n’est pas ma séquence préférée du film. Il fallait seulement une chanson un peu folle et amusante. Dans la mesure où l’idée que le monde est comme une tortue à l’envers est explicitée avant la chanson, j’ai choisi de ne pas en faire le thème principal de la chanson. J’ai préféré « Le monde est devenu fou », qui tient mieux la route lorsqu’on écoute la chanson en dehors de toute référence au film.

- L’expression « Trip a little light fantastic » est fabuleuse en anglais, mais totalement intraduisible sans perdre sa sonorité et sa fraîcheur. J’ai donc très vite opté pour "Luminomagifantastique", quitte à être « plus "frères Sherman" que l'original », comme vous me l’avez dit. Je m’attendais à devoir argumenter pour faire approuver ce choix par Disney, mais ce ne fut absolument pas le cas, c’est passé comme une sorte d’évidence, et je crois que les avis du public ont été très favorables. C’est, en tout cas, dans l’esprit de Mary Poppins. La difficulté de cette chanson a été le long passage où les personnages parlent « falotier », c’est-à-dire un langage décalé, aussitôt retraduit. J’ai dû reprendre tout ça à la demande de Disney pour y introduire plus de folie. Entre parenthèses, on m’a reproché d’avoir fait dire à Mary Poppins « Chez le Prince Edward » alors que le film se déroule dans les années 30. Eh bien, il y avait à l’époque un Edward VIII, nommé prince de Galles en 1911. Et j’ai aussi vérifié avant de faire dire à Jack « Vous pouvez marcher au radar », le radar ayant été inventé au tout début des années trente.

- Pour « la magie des ballons », si on retrouve les "hop" du « Beau cerf-volant » du premier Mary Poppins, c’est un peu malgré moi. Je souhaitais trouver autre chose sur « Nowhere to go but up » et j’ai fait deux propositions différentes à Disney (dont je ne me souviens plus), mais ils m’ont convaincu de revenir à « Et hop » qui, je l’avoue, colle mieux avec la gestuelle d’Angela Lansbury au début de la chanson.

RC : Avez-vous pu assister aux enregistrements des voix françaises ?

La difficulté, quand on s’investit à ce point sur un texte, est de savoir « lâcher prise » au moment des enregistrements, ce que j’ai parfois du mal à faire. Les chansons imposent aussi de faire un point précis sur les nombreuses options de « placement » de certaines répliques. Or Claude Lombard (qui a dirigé les chansons) n’était pas à Paris au moment de la validation des textes. J’ai donc fait un point complet avec elle au téléphone. C’est là qu’on a par exemple opté pour « Un livre est beaucoup plus que l’on pense » à la place d’« Un livre est beaucoup plus qu’on ne pense » pour qu’on ne risque pas d’entendre « Un livre est beaucoup plus con... ». Mais j’ai tenu à être présent pour l’enregistrement de la berceuse, pour veiller au synchronisme d’une ou deux répliques. J’ai aussi fait une session de montage sur les chansons, avant mixage, les logiciels de montage son permettant d’allonger certaines voyelles et de décaler d’une image ou deux les labiales de façon tout à fait transparente, sans porter atteinte à la rythmique.

SR : Y a-t-il une anecdote ou un fait marquant par rapport à votre travail sur le film ?

Ce fut un énorme travail mais aussi un plaisir trop rare, et on ne doit jamais perdre de vue que c’est un travail d’équipe. Et, cette fois, tous les acteurs sont aussi les chanteurs (sauf les voix d’Emily Mortimer et Julie Walters, qui ne chantent qu’une réplique), ce qui évite les problèmes de raccords voix. Mon autre satisfaction est que mes chansons soient aussi intégrées à la version française canadienne. Le seul regret, peut-être, est que Michel Roux ne soit plus des nôtres pour prêter sa voix à l’infatigable Dick Van Dyke ! Et, si on peut qualifier cela d’anecdote, pour les dialogues, la moindre référence au premier Mary Poppins a été conservée (comme le « Vous avez toujours l’air d’un poisson hors de l’eau » à Michael et le « Toujours une fâcheuse tendance à ricaner » à Jane). A tel point que lors de son caméo, Karen Dotrice (la Jane Banks originale de 1964, qui joue la dame qui demande son chemin, Allée des Cerisiers) répond « Many thanks, sincerely », qui est la dernière réplique de la chanson « Petite annonce pour une nounou » de 1964. J’ai donc conservé son « Merci, très sincèrement », alors qu’on entend discrètement les six dernières notes de la chanson dans la bande son.

Merci beaucoup Philippe Videcoq-Gagé d'avoir bien voulu répondre aux questions de Chansons Disney et de Dans l'ombre des studios. Et encore bravo pour cet incroyable travail d'adaptation ! Et bien évidemment nous saluons toute l'équipe française et les comédiens et chanteurs du doublage.

Le Retour de Mary Poppins est sorti au cinéma le 19 décembre 2018 et la bande originale du film est disponible chez Walt Disney Records (avec toutes les paroles des chansons dans un très beau livret !).

Pour redécouvrir mon interview d'Eliane Thibault (voix française de Julie Andrews dans le premier Mary Poppins), c'est ici...
Pour la distribution vocale du premier Mary Poppins, c'est ici...
Et pour le nouveau, toutes les infos ci-dessous:


LE RETOUR DE MARY POPPINS (2018)

Direction artistique : Claire GUYOT
Direction musicale : Claude LOMBARD
Adaptation des dialogues et chansons : Philippe VIDECOQ-GAGÉ
Enregistrement des dialogues : Nicolas POINTET
Enregistrement des chansons : Estienne BOUSSUGE
Montage : Guillaume BÉRAT
Supervision : Boualem LAMHENE et Virginie COURGENAY
Société et studio d’enregistrement : DUBBING BROTHERS
Société et studio de mixage : SHEPPERTON INTERNATIONAL

Emily Blunt ... Mary Poppins … Léovanie RAUD (Dialogues et Chant)
Lin-Manuel Miranda ... Jack … Pascal NOWAK (Dialogues et Chant)
Ben Whishaw ... Michael Banks … Jean-Christophe DOLLÉ (Dialogues et Chant)
Emily Mortimer ... Jane Banks … Rafaèle MOUTIER (Dialogues)
Emily Mortimer ... Jane Banks … Claire GUYOT (Chant)
Pixie Davies ... Anabel … Lévanah SOLOMON (Dialogues et Chant)
Nathanael Saleh ... John …  Noah REYNIER (Dialogues et Chant)
Joel Dawson ...Georgie … Simon FALIU (Dialogues et Chant)
Julie Walters ...Ellen … Josiane PINSON (Dialogues)
Julie Walters ...Ellen … Prisca DEMAREZ (Chant)
Meryl Streep ... Cousine Topsy … Isabelle FERRON (Dialogues et Chant)
Colin Firth ... Wilkins / Loup … Edgar GIVRY
Jeremy Swift ... Gooding / Blaireau … Guillaume LEBON (Dialogues et Chant)
Kobna Holdbrook-Smith ... Frye / Belette … Jean-Baptiste ANOUMON (Dialogues et Chant)
Dick Van Dyke ... Mr. Dawes Jr. … Jean-Pierre LEROUX (Dialogues et Chant)
Angela Lansbury ... La Dame aux Ballons … Christine DELAROCHE (Dialogues et Chant)
David Warner ... Amiral Boom … Michel PAPINESCHI *
Jim Norton ... Monsieur Boussole … Michel RUHL *
Noma Dumezweni ... Miss Penny Farthing … Audrey SOURDIVE **
Tarik Frimpong... Angus … Dan MENASCHE 
Sudha Bhuchar ... Miss Lark ... Isabelle GANZ *
Christian DIXON … Le Laitier … Christophe DESMOTTES **
Chris O’Dowd … Voix de Shamus le cocher … Xavier FAGNON *
Edward Hibbert … Voix du Parapluie Perroquet … Christophe DESMOTTES **
Voix parlées diverses : Eve LORACH, Patrick DELAGE, Florent BICOT DE NESLES, Patrick BORG, Jacques FAUGERON, Clotilde MORGIEVE, Bertrand DINGÉ, Stéphane ROUX, Pierre CARBONNIER, Cindy TEMPEZ, Corinne MARTIN et Clara SOARES
Voix chantées diverses : Michel MELLA, Jean-Claude DONDA et Guillaume BEAUJOLAIS
Chœurs : Magali BONFILS, Mery LANZAFAME, Rachel PIGNOT, Olivier CONSTANTIN, Arnaud LEONARD et Richard ROSSIGNOL

Sources: Générique de fin, Rémi Carémel / Dans l'ombre des studios *, RS Doublage**



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Décès de William Sabatier (1923-2019)

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J’ai appris avec une très grande tristesse la disparition de William Sabatier hier soir à Limoges, à l’âge de 95 ans. Immense comédien, il était l’un des derniers « survivants » de la création française de Rhinocéros d’Eugène Ionesco et de Casque d’or de Jacques Becker. Au doublage, il avait prêté sa voix à Marlon Brando, Richard Harris, Trevor Howard (sublime Richard Wagner dans Ludwig ou le Crépuscule des Dieux), et occasionnellement à Gene Hackman, John Wayne, etc. William était aussi un ami proche, drôle et érudit.

William Sabatier naît le 22 mai 1923 à Gentilly, d’un père ouvrier et d’une mère commerçante.
C’est pendant la guerre, où il interrompt ses études, qu’il découvre le théâtre amateur et rencontre dans un train en 1942 le grand amour de sa vie, Marie-Aimée (« Michou »). Ils se marient en 1946 contre l’avis de la principale cliente du salon de coiffure de Michou, qui est aussi l’une de ses amies… Edith Piaf : « Il est beau ton gars, couchez ensemble mais ne vous mariez pas, ce serait une bêtise ! ».

Météorologiste dans l’armée de l’air (aux côtés d’un certain Robert Lamoureux), mais toujours piqué par le virus de la comédie, William s’inscrit au cours de M. De Ruys, qui le prépare à la scène d’Horace pour l’entrée au Conservatoire. Il fait partie des trente reçus (sur quatre-cents candidats, nombre élevé en raison de la reprise d’activité après-guerre) et intègre la classe de Georges Le Roy auprès de Jean Le Poulain, Bernard Noël, etc. avec dans les autres classes Jeanne Moreau, Robert Hirsch, Louis Velle, etc.
En 1948, il rate le concours de sortie (ne recevant qu’un accessit en tragédie), mais Georges Le Roy le recommande à Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault qui viennent de faire scission avec la Comédie-Française pour créer leur propre compagnie.

La Compagnie Renaud-Barrault devient rapidement une référence aussi importante que la Comédie-Française ou le TNP de Jean Vilar, les plus grands comédiens (Maria Casarès, Pierre Brasseur, Jean Desailly, etc.) s’y retrouvent, et les plus beaux textes y sont joués, que ce soit  des grands classiques ou  des créations contemporaines (de Claudel, Ionesco, etc.), avec des musiques de scène composées par les jeunes Pierre Boulez et Maurice Jarre, au Théâtre Marigny, à l’Odéon, ou lors de grandes tournées à l’étranger (Amérique du Sud, Liban, U.R.S.S.).
De 1948 à 1968 (où les événements de mai ont provoqué des tensions dans la troupe et le départ de plusieurs membres, dont William), William Sabatier fait partie de la plupart des distributions de la Compagnie, dont la création française de Rhinocéros (1960) d’Eugène Ionesco où il joue Monsieur Jean.
Bien qu’également à l’aise dans le registre comique, son physique impressionnant et sa voix puissante l’amènent à jouer beaucoup d’empereurs et généraux dans les grandes tragédies.
William aimait raconter avec humour cette fois où Jean-Louis Barrault lui avait proposé de jouer Borgia dans la création de Malatesta de Montherlant. Fier qu’on lui ait proposé un tel rôle, il déchante vite en découvrant le texte, seulement quelques répliques pour le cardinal Borgia. « Le soir même je croise Pierre Bertin qui me dit :
-Alors, tu es content, tu vas jouer Borgia ?
-Excusez-moi Pierre, mais c’est une panouille…
-Mais tu sais qu’il est devenu Pape ? »
Chose rare au théâtre, il est sollicité dans trois productions différentes pour jouer un même rôle, le Maréchal Lefebvre dans Madame Sans-Gêne, aux côtés de Madeleine Renaud, Sophie Desmarets et enfin Jacqueline Maillan (pour les besoins de l’émission Au théâtre ce soir).
Il arrêtera le théâtre à la fin des années 80, après avoir joué dans deux spectacles de son ami Robert Hossein (L’affaire du courrier de Lyon et La Liberté ou la Mort).

En parallèle, il fait ses débuts au cinéma dans le rôle de Roland Belle-Gueule, souteneur de Casque d’or dans Casque d’or(1952) de Jacques Becker. Son premier métier de météorologiste lui permet, par temps nuageux, de "sauver" le tournage d'une scène extérieure, si bien que Jacques Becker plaisante avant chaque prise "Demandez à Sabatier si on peut tourner".
Simone Signoret (héroïne de Casque d'or) et Yves Montand l’adoptent alors dans leur bande, William jouera plus tard avec Montand dans Des clowns par milliers (1963, Théâtre du Gymnase) ou bien encore dans Compartiment tueurs (1965) de Costa-Gavras.
Au cinéma, on le voit également en avocat du fils de Philippe Noiret dans L’horloger de Saint-Paul (1973) et dans d’autres films, mais la carrière de William sera bien plus prolifique à la télévision, où il incarne de nombreux rôles historiques comme Napoléon (dans plusieurs téléfilms tournés en direct, qu’on appelait alors « dramatiques »), Savary dans la série Schulmeister, espion de l’empereur, Cadoudal dans Les Compagnons de Jéhu (où Behars, l’incroyable imprésario de William, avait dit au réalisateur qui prévoyait une scène de galop « Sabatier, c’est un centaure ! » alors que William n’était jamais monté à cheval), Jean Jaurès dans Emile Zola ou la conscience humaine, Charles le Téméraire dans Quentin Durward, etc.

Ces dons de comédien lui permettent de tenter un autre volet, important dans sa carrière : le doublage, où il retrouve beaucoup de ses amis du théâtre, dont son meilleur ami, Marc Cassot. Après un essai plutôt raté à la S.P.S., William commence le doublage dans les années 50, notamment pour Gérald Devriès (films M.G.M.) qui dirigeait encore les comédiens « à l’image », sans bande rythmo.
C’est un peu plus tard, dans les années 60, que grâce à Richard Heinz (gérant et directeur artistique du studio Lingua-Synchrone), il obtient ses plus beaux rôles : Marlon Brando (La Poursuite Impitoyable(1966), Reflets dans un œil d’or (1967), Apocalypse Now (1979)), Richard Harris (Un homme nommé cheval (1970)), Gene Hackman (L’épouvantail (1973)), Trevor Howard (Ludwig ou le crépuscule des Dieux (1972)), Anthony Quayle (Les Canons de Navarone (1961)), Rod Steiger (Le Sergent (1968)), Charles Durning (Un après-midi de chien (1975)), Christopher Plummer (La Chute de l’Empire Romain (1964)), etc.

Pour d’autres sociétés de doublage, il double occasionnellement John Wayne (La Conquête de l’Ouest (1962)), Toshirô Mifune (Soleil Rouge (1970) : Terence Young lui avait offert un cigare et une bouteille du whisky pour que sa voix prenne des graves), Alberto Sordi (Un bourgeois tout petit petit (1977)), Anthony Quinn (Les Indomptés (1991)), Clive Revill (Avanti ! (1972)), Gabriele Ferzetti (Au service secret de sa majesté (1969)), David Huddleston (The Big Lebowski (1998)), Glenn Ford (Paris brûle-t-il ? (1966)), Karl Malden (Patton (1970)), Martin Balsam (Des clowns par milliers (1965)), Orson Welles (La Lettre du Kremlin(1970)), etc.
Pour la télévision, Donald Pleasence dans le célèbre épisode de Columbo« Quand le vin est tiré », Fred Dalton Thompson dans New York Police Judiciaire, Howard Keel dans Dallas, John Thaw dans Inspecteur Morse, etc.

William aimait raconter comment, embêté que son fils Jean-Michel refuse tout le temps de manger sa soupe, il avait demandé à Guy Piérauld de l’appeler en se faisant passer pour Kiri le clown…

Toujours parfait dans tous ses rôles (que ce soit au théâtre, au cinéma, à la télévision ou au doublage), William avait dû lever le pied au début des années 2000 car il se déplaçait de plus en plus difficilement en raison de problèmes de dos.  Son dernier cachet date de juillet 2008, pour le doublage de la série Les Tudor.
Après la disparition de son épouse fin 2011, il avait quitté Paris pour rejoindre son fils Jean-Michel à Limoges. Dans sa résidence pour seniors, il continuait à peindre (activité qui comptait pour lui autant (sinon plus) que le théâtre) et recevait de temps en temps de jeunes élèves du conservatoire de Limoges pour les faire répéter. En septembre 2016, il avait été nommé Chevalier des Arts et Lettres par le Ministère de la Culture.

William est parti hier soir rejoindre son grand amour, Michou… A titre personnel, je perds un ami très cher. Lui et son épouse ont beaucoup compté pour moi lors de mes premiers stages à Paris, où ne connaissant alors pas grand monde dans la capitale, je retrouvais en dînant chez eux deux fois par mois une forme de cocon familial. Sa gentillesse et son humour, plein d’auto-dérision, vont nous manquer, et j’ai une pensée toute particulière pour Jean-Michel et ses enfants.



William Sabatier lors de notre première rencontre (en 2006)

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Décès de Don Burke (1939-2019)

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Une bien triste nouvelle, qui m'a été communiquée aujourd'hui par Jean-Claude Briodin: Don Burke, voix chantée de Gene Kelly dans Les Demoiselles de Rochefort et pilier du groupe folk Les Troubadours, vient de s'éteindre à l'âge de 80 ans, emporté par une rupture d'anévrisme.

Donald Burke (dit Don Burke) naît le 28 février 1939 à Halifax (province anglophone de Nouvelle-Ecosse, Canada), dans une famille nombreuse (14 frères et soeurs). Chanteur, joueur de guitare et de banjo, il fait partie de deux groupes folk, The Townsmen Trio (1963-1964) puis The Don Burke Four, avec lesquels il est régulièrement invité à chanter dans l'émission Singalong Jubilee pour la télévision canadienne (CBC).

En 1965, pour ses études (il travaille parallèlement comme professeur de français), il quitte le Canada et emménage en banlieue parisienne (à Draveil). Fréquentant le Centre Américain de Paris (boulevard Raspail), il côtoie de nombreux artistes anglophones vivant à Paris et participe à des soirées folk (Hootenannies) et des scènes ouvertes. C'est au cours de l'une de ces soirées, que le jeune harpiste breton Alan Stivell remarque Don et sa technique de "picking"à la guitare, et finit par s'en inspirer en appliquant sa méthode de jeu à la harpe.
En 1966, Don rejoint le groupe folk Les Troubadours en remplaçant définitivement le ténor Bob Smart (choriste américain qui avait enregistré les deux premiers 45T du groupe), aux côtés de Pierre Urban, Jean-Claude Briodin et Franca di Rienzo. Sa passion pour la musique folk et ses talents de guitariste et banjoïste sont un atout majeur pour le groupe.


Les Troubadours chantent "Polly Maggoo"

Le 11 octobre 1966, une dizaine de jours avant la sortie du film Qui êtes-vous, Polly Maggoo? de William Klein, il enregistre la chanson du générique (musique de Michel Legrand) avec ses amis Troubadours. 
Michel Legrand repère ainsi Don et lui propose d'enregistrer la voix chantée de Gene Kelly dans Les Demoiselles de Rochefort. Tous les autres rôles ont déjà été enregistrés (mars-avril 66), le tournage a été fait pendant l'été 66 (Michel Legrand lui-même a servi de "voix témoin"à Gene Kelly/Andy pour le tournage, et quelques uns de ses "scats" ont été conservés dans le mixage final), mais (d'après Don) pour des raisons de complexité musicale (difficultés à faire les intervalles que la musique de Legrand exigeait), Gene Kelly ne peut se post-synchroniser sur les chansons.
Don enregistre donc les chansons en français des Demoiselles de Rochefort, puis une semaine après la version anglaise ("sans être payé" m'a-t-il précisé).
Le choix de faire doubler Gene Kelly sur les chansons (alors qu'il parlait un très bon français) a été critiqué par les puristes, mais est passé inaperçu par le grand public, preuve que cet enregistrement était réussi.


Don Burke (voix chantée de Gene Kelly): "La chanson d'Andy"

Sans être des "stars", Les Troubadours, inspirés à la fois par le mouvement folk américain (Pete Seeger, Peter, Paul & Mary, etc.) et le répertoire folklorique européen, mènent une belle carrière, pendant plus de dix-sept ans : de nombreux disques avec quelques "tubes" (comme le magnifique "Le vent et la jeunesse") arrangés par Christian Chevallier (mari de Franca), beaucoup de tournées, de collaborations et premières parties (pour Jean Ferrat, Graeme Allwright, Georges Moustaki, etc.) et d'émissions de télévision (dont une participation régulière aux "Bienvenue" de Guy Béart). Don estimera que ces années "Troubadours" seront les plus belles de sa vie.

Parallèlement aux Troubadours, Don compose des chansons (entre autres "L'auto-stop" pour Maxime Le Forestier), et joue dans les disques des copains : Graeme Allwright (premiers albums Mercury), Hugues Aufray (banjo à cinq cordes dans "Des jonquilles aux derniers lilas"). En 1970 et 1971, pour le film d'animation Lucky Luke : Daisy Town, il enregistre pour Claude Bolling la maquette d'"I'm a poor lonesome cowboy", la chanson "Stamp your feet" (version anglaise de "Voilà le quadrille", inédite dans le film mais présente dans le disque avec en crédit "Dan" Burke) puis les choeurs de la B.O. finale du film (mélange de choristes studio habituels (Anne et Claude Germain, etc.) et de chanteurs et musiciens anglophones vivant à Paris).


Maquette d'"I'm a poor lonesome cowboy" (musique: Claude Bolling)
Enregistrement le 1/10/1970 avec Don Burke (chanteur soliste + guitare), Jean Stout (basse profonde), Bob Smart (ténor), Anne Germain (soprano) et Alice Herald (alto)

A la fin des années 80, Don retourne dans sa ville de naissance (Halifax), au Canada. En 2000, il sort son premier CD en solo, enregistré avec des musiciens du cru.

Il y a trois semaines, grâce à Jean-Claude Briodin, j'avais pris contact avec lui par mail et nous avions commencé à échanger (à propos notamment des Demoiselles de Rochefort), le temps ne nous a malheureusement pas permis de faire un entretien complet.
J'ai bien sûr des pensées pour sa famille, mais aussi pour Franca et Jean-Claude.


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Décès de Liliane Patrick (1933-2019)

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J'ai appris la semaine dernière, par l'une de ses amies, la disparition de la comédienne Liliane Patrick lundi 22 avril 2019 à l'âge de 86 ans. Ses obsèques ont eu lieu le 25 avril dans le Lot, dans l'intimité familiale.

Comédienne habituée des grandes scènes de théâtre et des plateaux de télévision, elle avait également participé à de nombreux doublages de films: la mère de Bambi (dans le redoublage de Bambi en 1978), Elizabeth Montgomery (Samantha dans les derniers épisodes de Ma sorcière bien aimée), etc. 
Je vous invite à relire l'entretien (sans langue de bois) qu'elle avait accordé à mon confrère François Justamand pour La Gazette du Doublage:
http://www.objectif-cinema.com/spip.php?article5564
Toutes mes pensées vont à son fils Marc (qu'elle avait eu avec le réalisateur Claude Boissol).

J'ai également une pensée pour deux autres magnifiques comédiens qui ont enchanté l'enfance de beaucoup d'entre nous, et nous ont quittés ces dernières semaines, Christian Alers et Pierre Hatet.

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Rencontre "Groupes vocaux français d'hier et d'aujourd'hui" (Samedi 12/10/2019)

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Le blog "Dans l'ombre des studios" et ses invités vous convient samedi 12 octobre 2019 à 16h au PHONO Museum Paris à une rencontre autour des groupes vocaux français d'hier et d’aujourd'hui.

Des Frères Jacques aux Cinq de Cœur, de Pow woW à Opus Jam, des Double Six aux Voice Messengers, des Blue Stars à Souingue, des Parisiennes aux Coquettes, des Masques à Zazou’ira, rencontre autour des groupes vocaux français des années 30 à nos jours, dans toute leur diversité : leur histoire, leurs influences, leur identité, leurs collaborations.

Pour en parler, autour de Rémi CARÉMEL (auteur du blog « Dans l’ombre des studios »), six invités exceptionnels :
Alain CHENNEVIÈRE, chanteur du groupe Pow woW.
Hubert DEGEX, pianiste, arrangeur et chef d’orchestre des Frères Jacques.
Claudine MEUNIER (The Blue Stars of France) et Jean-Claude BRIODIN (Les Troubadours), chanteurs dans une douzaine de groupes vocaux des années 50/60/70 dont Les Double Six, The Swingle Singers (lauréats de plusieurs Grammy Awards), Les Masques, Les Fontana, Les Angels, Les Riff, etc.
Rose KRONERet Sylvain BELLEGARDE, chanteurs du groupe The Voice Messengers.

Entrée à partir de 10€ (un reçu donnant lieu à une déduction fiscale sera fourni)

L’intégralité des recettes sera versée à l’association Phonoplanète, qui aide à la préservation du PHONO Museum Paris, musée de la musique enregistrée, tenu par des bénévoles.
Sur place, Jalal ARO répondra aux questions des visiteurs sur tous les détails historiques ou techniques.

Samedi 12 octobre 2019 à 16h (durée : 1h30)
PHONO Museum Paris
53 boulevard de Rochechouart
75009 Paris
(Métro : Pigalle ou Anvers)


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Décès de Francette Vernillat (1937-2019)

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J'ai appris avec tristesse (par Jean-François Guyot (AFP) et par Vincent Vernillat, qui m'a apporté des informations complémentaires) la disparition de la comédienne Francette Vernillat (mythique voix française de Tom Sawyer) lundi 2 décembre 2019 à Fontenay-lès-Briis. 

Francette Vernillat (de son vrai nom France Benitte) naît le 16 avril 1937 d'une mère harpiste, musicologue et future directrice de production 
(France Vernillat) et d'un père médecin des armées. Encouragée par ses parents, la petite Francette brûle les planches dès l'âge de sept ans. En véritable enfant de la balle, elle touche à plusieurs aspects de la comédie: cinéma (Monsieur Vincent de Maurice Cloche, qui reçoit un Oscar d'honneur ou Thérèse Raquin de Marcel Carné), théâtre (deux ans au Théâtre de l'Odéon (Louison dans Le Malade Imaginaire, etc.) et des grandes créations dans des théâtres privés, comme Les Sorcières de Salem avec Yves Montand), radio (participation au Club d'essai de la R.T.F., des dizaines d'enregistrements de pièces radiophoniques où elle côtoie Pierre Brasseur, Marcel Aymé, etc.) et doublage (Autant en emporte le vent et Bambià la Libération)... 
En 1955, à 18 ans, Francette met au monde son fils aîné, Vincent, et aura dans les années qui suivent neuf autres enfants. Pendant cette période, sa carrière artistique est en pointillés, même si elle participe occasionnellement à des doublages et à des tournées théâtrales. A la mort de son mari en 1980, ses amis du doublage la soutiennent, et font appel à son talent. Elle devient l'une des voix de petits garçons les plus célèbres dans les années 80, notamment dans les dessins animés doublés à la SOFI: Bouba le petit ourson (Bouba), Tom Sawyer (Tom Sawyer), Petit Boy (Clémentine), etc.
Au début des années 2000, elle est heureuse d'avoir l'opportunité de doubler enfin un rôle important correspondant à son âge, la mère de Tony Soprano dans la série Les Soprano, mais quelques années après elle s'éloigne définitivement des plateaux de doublage.
Lundi 2 décembre 2019, elle s'éteint à Fontenay-lès-Briis, laissant une grande famille et toute une génération de "fans" dans la tristesse.
Ses obsèques auront lieu lundi 9 décembre 219 à 10h, Eglise Sainte-Trinité, à Montlhéry (91310).

Evelyn Selena m'a écrit ce mot, que je reproduis ici avec son accord: "Il y a quelques jours j'ai repensé à elle et à nous en regardant à la télévision "Les Sorcières de Salem", elle ne jouait pas dans le film mais avait participé à la création de la pièce avec la même troupe, quand elle avait 15 ans. Francette était la générosité même, toujours disponible pour ceux qui avaient besoin d'aide. Elle a été pour moi une amie comme on n'en fait plus, jusqu'au jour où elle a quitté sa maison pour une autre, dans une banlieue plus lointaine. Je l'ai remerciée et la remercie encore pour tout ce qu'elle a fait pour moi.Je l'ai connue sur le doublage de "Dallas"à la SOFI où elle faisait la voix de mon fils. Les sociétés du doublage lui confiaient uniquement des voix de petits garçons ; seul Jean-Pierre Steimer (Synchro Mondiale) lui faisait aussi doubler des actrices de son âge..."


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Décès de Jeanette Baucomont (1926-2019)

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Je viens tout juste d'apprendre avec tristesse, par sa famille, la disparition de Jeanette Baucomont (membre fondatrice des Swingle Singers).

Jeanette Baucomont naît Jeanne Duclaux le 28 septembre 1926 à Clermont-Ferrand, mais grandit dans le sud de la France. Elle obtient des premiers prix en chant, piano et solfège au Conservatoire de Montpellier, et monte à Paris.
Les renseignements sur ses débuts sont rares, mais on sait que, soprano soliste, elle chante à l'Opéra et à l'Opéra-Comique, enregistre quelques disques lyriques et fait partie de la Société de Musique Ancienne de la Comtesse de Chambure.

Au milieu des années 50, Jeanette Baucomont intègre les équipes de choristes de variétés qui viennent de se constituer autour de Janine de Waleyne, Mimi Perrin et Christiane Legrand, participation au départ épisodique (car elle est étiquetée "lyrique") puis de plus en plus régulière. Sans avoir la position de soprano soliste et lead de Christiane Legrand ou Janine de Waleyne (ou plus tard Danielle Licari et Françoise Walle), elle devient néanmoins, avec talent, l'une des choristes les plus actives dans la période 1956-1968, et encourage les débuts de plusieurs choristes comme Jean Stout ou Jackye Castan. "Jeanette faisait partie de mes amies préférées parmi notre groupe de chanteurs" se souvient Bob Smart. "Elle était douce, gentille, et avait une voix magnifique."


Jean Leccia et son orchestre (1960)
Choristes: Claude Germain, Inconnu, Jean-Claude Briodin, Jacques Hendrix
Christiane Legrand, Jeanette Baucomont, Janine de Waleyne, Mimi Perrin

Jeanette Baucomont accompagne en studio la plupart des chanteurs de l'époque (Léo Ferré, Eddy Mitchell, Johnny Hallyday, Fernandel, John William, etc.). On la retrouve aussi dans bon nombre de groupes vocaux (Les Fontana, Les Barclay, Les Riff, etc.), musiques de film (Ginny dans Les Parapluies de Cherbourg (M. Legrand), Le Gendarme de Saint-Tropez (R. Lefebvre), etc.), disques orchestraux (vocalise solo de "Oui, devant Dieu" dans Douce ambiance rêve et danse de Jean-Michel Defaye (merci Serge Elhaïk)) et doublages de films musicaux (choeurs de Mary Poppins, Shirley Temple's Storybook, etc.) de cette époque, ainsi que dans quelques créations contemporaines (Laborintus II de Luciano Berio, avec Christiane Legrand et Claudine Meunier).
En soliste, elle chante dans plusieurs titres de l'orchestre Jacques Hélian dans la période 1961-1963.


Jeanette Baucomont (voix de Ginny) dans Les Parapluies de Cherbourg (1964)

En 1963, elle fait partie (comme soprano) de la création des Swingle Singers aux côtés de Christiane Legrand (soprano soliste), Anne Germain et Claudine Meunier (altos), Ward Swingle et Claude Germain (ténors) et Jean Cussac et Jean-Claude Briodin (basses).
Séance d'enregistrement
des Swingle Singers (c.1964)
Jusqu'en 1968, elle enregistre avec le groupe 11 albums (de Jazz Sebastian Bach à Noëls sans passeport) et participe à toutes les tournées (concert à la Maison-Blanche, campagne électorale de Lyndon Johnson à travers les Etats-Unis, création du Sinfonia de Luciano Berio avec Leonard Bernstein). Des ennuis de santé au cours desquels elle perd partiellement ses aigus, lui font quitter le groupe en 1969 (elle est remplacée par Nicole Darde).


The Swingle Singers: Suite anglaise n°2 de Bach (c. 1963)
J.-C. Briodin, J. Baucomont, C. Germain, C. Meunier, 
J. Cussac, C. Legrand, W. Swingle, A. Germain



Enregistrement de Boulevard du Rhum
F. de Roubaix (banjo), M. Barouille,
H. Czarniak, C. Germain, J. Baucomont,
M. Dornay (cachée),
H. Tallourd et J. Stout
(c) Archives François de Roubaix
(Remerciements: Gilles Loison)

Après les Swingle Singers, elle continue pendant quelques années les séances (on la retrouve comme choriste dans les B.O. de Boulevard du Rhum (François de Roubaix), Doucement les basses (Claude Bolling), etc.). Claude Chauvet, qui débute dans les choeurs à ce moment-là, en garde le souvenir d'une "grande pro, un peu intimidante". Mais elle fait partie des choristes progressivement mises sur la touche en raison de l'évolution de la façon de chanter (les voix timbrées laissent la place à des voix beaucoup plus éthérées) et l'arrivée d'une nouvelle génération de choristes pouvant répondre à ce changement.

Son amie Michèle Conti et elle deviennent professeures de piano dans le même conservatoire. En dehors de Claudine Meunier et Alice Herald, elle garde assez peu de contacts dans le "métier". Il y a une dizaine d'années, je partage un échange téléphonique très sympathique avec elle mais elle refusera quelques années plus tard de m'accorder un entretien complet, ayant définitivement tiré un trait sur ses années de studio.

Jeanette Beaucomont s'est éteinte le 1er juillet 2019 à Paris (la nouvelle n'a pas été communiquée à ses amis du métier, je ne l'ai apprise que le week-end dernier, par son petit-fils). Elle était veuve du footballeur Robert Baucomont, et laisse dans la peine trois enfants et plusieurs petits-enfants. Mes pensées vont vers eux.


Jeanette Baucomont interviewée avec les autres Swingle Singers sur ses loisirs
(Le temps des loisirs, 1968)


Jacques Hélian et son nouvel orchestre: Les filles du midi (avril 1961)
Solistes: Jeanette Baucomont et a priori Hubert Giraud et Vasso Marco
(4CD Festival Jacques Hélian et son nouvel orchestre : intégrale 1960-1969, Marianne Mélodie)


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